Chapitre 11

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Trois mois.

Ce fut la durée pendant laquelle Severus profita de sa soudaine entrée dans les favoris du Maître. Il y avait des regards jaloux ou envieux de la part des autres Mangemorts et il se sentait particulièrement puissant.

Il était devenu le favori, lui, le sang-mêlé pauvre, le garçon solitaire rejeté de tous. C'était inespéré et grisant. En quelques minutes, juste en répétant quelques mots entendus dans une taverne, il était devenu le préféré, félicité et encensé par Voldemort en personne.

Le mage noir rappelait régulièrement son don en potions, sa puissance, son intelligence. Severus n'était pas certain que tout soit sincère, mais il aimait être félicité ainsi, pour la toute première fois de sa vie. Il se gorgeait de cette attention, de ces compliments.

Quelques jours plus tôt encore, Lucius l'avait invité dans son immense manoir prétentieux et il lui avait annoncé que son épouse attendait un enfant. Solennellement, le Sang pur lui avait proposé d'être le parrain de son héritier et Severus avait accepté, ému malgré lui. Il savait que sa demande était liée à sa soudaine entrée en grâce auprès de Voldemort et que sans ça, Lucius n'aurait jamais posé les yeux sur lui. Malgré tout, Lucius lui offrait ce qui était le plus proche d'un lien familial et il en était honoré.

D'aussi loin qu'il se souvienne, Severus n'avait jamais été aussi heureux. Même la perte de sa meilleure amie, de sa Lily qu'il aimait toujours autant, se faisait moins douloureuse et il pensait qu'il pourrait bien l'oublier, pour enfin passer à autre chose.

Il avait appris par la Gazette qu'elle s'était mariée à James Potter. La nouvelle l'avait touché, mais il n'avait pas été anéanti comme il aurait pu l'être peu de temps auparavant. Il avait refusé de laisser ça gâcher son bonheur tout neuf.

Puis, il y eut un appel pour une réunion soudaine et imprévue. C'était assez rare pour être intriguant, ces derniers temps rien ne justifiait une telle précipitation. La Marque brûla son bras, le faisant grimacer, et il transplana aussitôt. Tout comme les autres Mangemorts, Severus ne voulait certainement pas être le dernier arrivé, au risque de se faire remarquer et de récolter un doloris ou deux. Ils se retrouvèrent tous autour de leur Maître, tête baissée et en silence, attendant sagement de savoir pour quelle raison ils avaient été appelés avec tant de précipitation. Ils étaient tous des combattants aguerris et ils avaient commis bien des péchés depuis qu'ils avaient reçu la marque et pourtant, ils étaient nerveux comme des enfants ayant fait une bêtise.

Voldemort était debout, les surplombant, impérial. Il était sur une estrade, pour paraître plus grand qu'il n'était, vêtu intégralement de noir, d'une robe sorcière simple, sans la moindre fioriture, sa baguette en main, ses yeux rouges balayant l'assemblée, presque menaçants. Severus se prosterna comme tout le monde, mais il nota la mise en scène claire : tout était fait pour impressionner et pour leur donner à tous l'impression d'être insignifiants.

Le jeune homme était certain que personne n'oserait faire la moindre remarque à ce sujet, sous peine de passer un très long et très désagréable moment avec Voldemort.

Lorsqu'ils furent enfin tous arrivés — le dernier eut droit à un léger Doloris pour le punir de son retard — l'homme commença à parler, d'une voix forte d'un ton qui n'admettait pas la moindre réplique.

— Deux familles proches de Dumbledore attendent un héritier devant naître en juillet. Tout se jouera entre l'enfant Longdubat et l'enfant Potter. Dès que les mères auront accouché, nous localiserons celui qui est concerné et... la menace sera éliminée. Purement et simplement. Ainsi, ce vieux fou qui aime tant les moldus n'aura plus l'appui de cette stupide prophétie.

À la fin de sa diatribe, ses yeux brillaient presque d'une lueur maléfique, alors qu'il faisait de grands gestes des bras, la colère clairement visible sur son visage défiguré par les abus.

Autour de lui, personne ne prononça le moindre mot, personne n'émit la moindre protestation. Ils avaient été formatés à coup de Doloris et tout ce que disait Voldemort était perçu comme un ordre non négociable.

Severus cligna des yeux, avant de réellement comprendre les mots qui venaient d'être prononcés. Une vague de nausée le submergea alors qu'il découvrait que Lily, sa Lily, était enceinte de Potter et portait peut-être l'enfant qui était destiné à tuer son Maître.

Il masqua l'horreur qu'il ressentait, restant calme et immobile, sans se joindre aux bavardages soudains excités de ses camarades maintenant que la pression s'était relâchée. Voldemort s'était reculé et assis dans un large siège, les observant avec un demi-sourire, les laissant prévoir l'assassinat de deux nouveau-nés.

Severus tentait de se convaincre que ce n'était qu'une terrible coïncidence, que ce ne serait pas l'enfant de Lily qui serait choisi. Elle était enceinte au pire moment, bien évidemment. Mais elle était une née-de-moldus après tout. S'il suivait les croyances de Voldemort, elle ne pouvait pas être assez puissante pour donner naissance à un rival... De plus, il connaissait assez son amie pour savoir qu'elle se battrait bec et ongles pour son enfant, ce qui la plaçait en première ligne, face au danger.

Severus savait sans le moindre doute que Lily serait tuée froidement si elle faisait mine de s'interposer. Voldemort n'était ni patient ni complaisant. La moindre résistance se devait d'être réprimée avec le plus de violence et de douleur possible selon lui, afin de donner un exemple à toute personne qui aurait l'idée de s'opposer à lui.

Alors qu'il allait quitter les lieux, hautement perturbé par ce qu'il venait d'entendre, Voldemort lui fit signe d'approcher, d'un geste impérieux. Il obéit, tête baissée, essayant de cacher son envie de fuir et sa nausée. Cependant, il valait mieux pour son intégrité physique qu'il obéisse sans la moindre hésitation et qu'il ne montre pas les doutes qui l'agitaient.

Voldemort le dévisagea longuement, les yeux plissés, comme s'il essayait de lire ses pensées. C'était en ces moments que Severus était reconnaissant d'avoir appris l'occlumentie alors qu'il était encore à Poudlard. Ce qui avait été de la curiosité pour une nouvelle discipline extrêmement complexe à l'époque s'avérait être un talent essentiel pour le maintenir en vie face au mage noir. Finalement, ce dernier hocha la tête et étira ses lèvres en un sourire froid.

— Severus... Tu es celui qui m'a rapporté cette prophétie. Souhaites-tu m'accompagner pour mettre à mort l'enfant ? C'est un honneur que je te fais, crois-moi.

La fille de Severusजहाँ कहानियाँ रहती हैं। अभी खोजें