Chapitre 46

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Elizabeth

- Allo ? la voix grave de mon père résonne dans mon cerveau.

Ma respiration se bloque alors que je ne sais pas quoi dire.

- Elizabeth, il murmure.

- Envoie moi l'adresse de ton hôtel, j'arrive.

Mon ton sérieux me choque moi-même. Je raccroche et attends les indications de mon père.

*****

J'ai un chocolat chaud devant moi ainsi que mon père. Nous nous sommes installés au café de l'hôtel parce que je ne voulais pas monter dans sa chambre. J'ai trouvé qu'un terrain neutre pourrait être plus propice à notre échange. Il m'observe d'un seul œil en buvant sa boisson. Il semble gêné. Mon père attend que je fasse le premier pas et que je parle. Ce que je comprends totalement car c'est moi qui lui ai donné rendez-vous. Je prends mon chocolat dans les mains et commence à boire tout en fixant mon père. Il me sourit et dit :

- Comment vas-tu ?

Je ne prends pas la peine de répondre à ses formalités alors que nous savons très bien que nous ne sommes pas là pour ça.

- Je ne suis pas là pour parler de ça, je réponds la voix dure. Je veux savoir comment tu es venue à faire tout cela.

- Je te dégoûte, il me demande en fixant sa tasse gêné.

J'affiche une mine confuse. Est-ce qu'il pense que je réagi comme cela parce qu'il aime les hommes ?

- Mais enfin papa, bien sûr que non. Le problème n'est pas que tu aimes les hommes, mais que tu nous ai fait croire pendant tout ce temps que tu vivais l'amour fou avec maman alors que tu te tapais son assistant. Et c'est moi qu'on a blâmé pendant un an. Un an ! je m'énerve de plus belle. Pendant plusieurs temps, j'ai cru que tu allais enfin assumer tes actes, mais tu ne l'as jamais fait.

- Je suis désolé... il murmure.

- Tu es désolée ? je lève les yeux au ciel excédé et déçu.

- Je suis désolée que tu te sois retrouvée au milieu de cette affaire alors que ça ne te concernait pas.

- Ça concerne toute notre famille, je réplique.

Mon père relève les yeux vers moi fatigué par cette discussion.

- Je ne sais pas quoi te dire.

- Pourquoi tu ne nous en a pas parlé ? Ça aurait été si simple...

- Tu sais Elizabeth, l'amour ça te tombe dessus. J'ai aimé ta mère de tout mon cœur, je l'ai chérie et je lui heureux d'avoir construit la vie que j'ai eu avec elle. Mais petite à petit, notre amour s'est estompé. Je ne lui suffisait plus et elle ne me suffisait plus. Et puis j'ai rencontré Ethan, et j'ai eu un déclic. Je ne dis pas que j'ai toujours nié mon attirance pour les hommes. Ta mère est au courant de mon orientation sexuelle. Je sais que j'aurais pu faire de meilleurs choix. J'espère qu'un jour vous pourrez me pardonner pour ce que j'ai fait endurer à notre famille.

Je me penche en avant vers lui et réponds :

- Que l'on soit clair je veux que tu sois heureux, mais je ne peux pas oublier ce que j'ai enduré à cause de tes histoires.

Je me lève.

- Je te remercie pour ses explications.

Je commence à partir mais mon père me rappelle.

- Tu penses pouvoir me pardonner un jour ?

- Je t'ai déjà pardonné, je dis en souriant.

Apaisée, je me dirige vers ma maison avec une seule idée en tête.

*****

Ma maison est plongée dans l'obscurité. Les rayons du soleil réchauffent à peine l'ambiance glaciale. Ma mère est assise dans le canapé, un verre de vin dans la main, le regard fixé dans le vide. Ça fait une semaine qu'elle ne vit plus. Depuis que mon père est parti, ou du moins depuis qu'elle l'a mis dehors, la maison est vide.

Personnellement j'ai passé mon temps à vagabonder. J'allais tous les jours à la boutique de Noah et je rentrais le soir pour dormir avant de repartir. Je sais que Darrel a tenté de me retrouver mais mon ami tatoueur l'a mis dehors quand je lui ai expliqué la situation.

Je m'avance tout doucement vers le canapé. Je fais le tour et au lieu de m'installer à côté de ma mère, je m'assois sur la table basse en bois. Ma mère ne me regarde toujours pas, alors je prends le verre, le pose sur la table et lui attrape les mains. Elle me fixe enfin les yeux embués de larmes. Les miennes montent immédiatement quand je vois dans quelle état elle se trouve. Je ne peux m'empêcher de culpabiliser alors que je n'y suis pour rien. J'ai tellement de haine et de rancœur envers elle que je ne sais même pas par où commencer. Mais un seul mot me vient en tête. J'ouvre la bouche enfin déterminée à lui parler.

- Je te pardonne, je lâche en laissant couler mes larmes. Je te pardonne pour ta réaction, pour ta façon de me traiter et de m'aimer. Je te pardonne pour tout le mal de cette dernière année mais aussi les doutes et les fautes que tu m'as fait encaisser. Je te pardonne de m'avoir éloignée de ma propre famille et je te pardonne de ne pas m'avoir cru. Je te pardonne d'être aussi exigeante envers moi. Je te pardonne pour toutes les critiques, les jugements et le sentiment de ne jamais être à la hauteur.

Ma mère a éclaté en sanglots quand j'ai prononcé la première phrase. Je sais que ça va lui faire du mal, et je sais aussi qu'elle ne l'a pas spécialement mérité mais j'en avais besoin. Pour avancer. Pour me reconstruire. Pour me refaire confiance. J'en avais besoin pour me rendre compte que tout ceci n'est pas de ma faute et que j'ai simplement encaissé les pots cassés de ma famille.

Je me lève et pars en direction de la porte pour retrouver la personne que j'aime. Mes chaussures claquent contre le carrelage. Les sanglots de ma mère résonnent dans tout mon être. Je sais qu'elle ne pleure pas seulement à cause de ce que je viens de dire. Elle pleure parce que son mariage n'a pas fonctionné mais aussi parce qu'elle se sent coupable.

- Lizzie?

La voix de ma mère me stoppe net. Mes larmes menacent encore de tomber quand j'entends le surnom qu'elle employait pour me féliciter avant que tout dérape. Je me retourne alors qu'elle est toujours dos à moi.

- Merci, elle souffle soulagée.

- A ce soir maman.

Le sourire aux lèvres, je passe les portes de chez moi et fait quelques pas pour retrouver mon voisin. J'approche ma main de la sonnette et appuie. Je n'attends même pas trois secondes que la porte s'ouvre fort. Darrel est là, tout essoufflé et les cheveux en bataille. Je lui souris légèrement. Il se jette sur moi et enfouit sa tête dans mon cou.

- J'ai cru que tu ne reviendrais jamais, il expire allégé.

Il se décale et me tient fermement à la taille.

- Comment tu vas ?

- Mieux... Beaucoup mieux.

Plus cliché tu meursWhere stories live. Discover now