Chapitre 3

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Lundi

Darrel

Je me retourne vers la fausse rousse surpris de la voir en classe. Je n'arrive pas à croire qu'elle soit ici. Nous sommes en mars, je ne l'avais toujours pas remarqué. Je suis un piètre observateur. Quand elle m'a vu, son ignorance face à ma personne m'a touchée. Ce n'est pas très gentil de sa part. Certes je l'ai empêché de sauter son « pont du courage » mais la moindre des choses serait de me dire bonjour.

Je fais la première chose qui me passe par la tête et me lève. Je me dirige vers son bureau et prends place sur la chaise à côté de la sienne.

- Ce n'est pas ta place, elle me dit la voix à moitié endormie.

Elle n'a donc aucune éducation. Je la fixe jusqu'à ce qu'elle lève enfin la tête vers moi. Je n'ose pas lui demander son prénom parce que j'ai peur de la vexer. Ma popularité a augmenté quand j'ai commencé à faire partie de la bande de Carter. Ça m'arrive donc très souvent d'oublier les gens que je rencontre.

Quand j'allais enfin parler, le prof d'histoire entre dans la salle et me rappelle à l'ordre. Je reprends donc ma place pour suivre le cours.

Je regarde la pendule qui avance à la vitesse d'une tortue. J'ai l'impression d'être perdu dans le désert du Sahara sans fin. Je fais rouler mon stylo sur ma table .

- Pouvez-vous répondre à cette question?

Je me redresse à la vitesse de l'éclair par peur que ce soit moi que le prof interroge. Mais ses yeux ne me regardent pas du tout. Je me retourne pour voir les joues de la fausse rousse devenir rouge. Pas le genre de rose mignon qu'une fille peut avoir. Non le vrai rouge, comme une tomate. Je lâche un ricanement qui me vaut un regard noir de sa part.

- Elizabeth, je vous ai posé une question, dit le prof impatiemment.

Elizabeth. Ce nom me dit vaguement quelque chose. C'est vrai qu'il est assez connu mais peu porté de nos jours. Elizabeth souffle un grand coup et ouvre la bouche pour répondre:

- Je suis désolée je n'ai pas écouté.

Tout le monde a un mouvement de recul face à son franc-parler. C'est la première fois que quelqu'un ose dire la vérité à un prof.

- Hastings, lâchez-moi ce livre et suivez mon cours.

Monsieur Brown retourne à son diaporama. Hastings? Comme Carla Hastings? Comme Carla la copine de mon meilleur ami? Je n'arrive pas à le croire. Je pensais que Elizabeth avait disparu de cette ville il y a un an. Elle a coupé les ponts avec toutes ses amies. Il y a à peine un an, elle était cheerleaders et trainait avec sa sœur tous les jours. Les deux étaient inséparables. Je me demande bien ce qu'il a pu se passer. Je me retourne vers Elizabeth et la regarde fixement. Elle ne se ressemble pas tellement. Carla est tellement plus sophistiquée alors que Elizabeth est... Elizabeth.

Elle me fixe à son tour et me tire la langue comme une enfant de cinq ans.

À la sonnerie, je n'ai pas le temps de me diriger vers le bureau d'Elizabeth parce qu'elle est déjà partie comme une furie. J'aurais souhaité lui parler. De quoi? Je ne sais pas exactement, mais cette fille m'intrigue.

Je passe la matinée à suivre de loin Elizabeth qui a chaque fin de cours trace le feu au fesse. Elle ne salue personne. Ne parle à personne.

À la pause déjeuner, quand je pense avoir enfin le temps de lui parler, elle a disparu. Je rentre dans le self pour m'acheter un sandwich mais elle n'y est pas, alors que sa sœur, elle, est bien voyante. Les cheerleaders et les footballeurs sont rassemblés à une seule et même table. De loin je n'avais jamais remarqué que l'on était aussi bruyant. Carter me fait un signe pour que je le rejoigne mais je décline sa proposition. Pendant cinq minutes j'essaie de faire le tour du lycée qui est bien trop grand.

Je me dirige à l'extérieur du lycée pour rejoindre le terrain de football. Les tribunes sont énormes. Chaque année nous accueillons plus de la moitié de nos concurrents. Je suis au milieu du terrain quand je tourne la tête et la trouve. Elle me fixe apeuré.

Plus cliché tu meursWhere stories live. Discover now