Papillons de minuit

By Pichrounette

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/PREMIERS JETS\ Les Papillons de minuit, ces êtres infâmes et cruels qui côtoient chaque jour les humains de... More

Prologue
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Petite question !
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Bonsoir tout le monde.
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19-1
Chapitre 19-2
Chapitre 20-1
Chapitre 20-2
Chapitre 21-1
Chapitre 21-2
Chapitre 22-1
Chapitre 22-2
Chapitre 23-1
Chapitre 23-2
Chapitre 24-1
Chapitre 24-2

Chapitre 19-3

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By Pichrounette


Tout le monde s'installa dans la voiture et Valentin roula loin de la maison de Malter. Je me remis à la contemplation du paysage et laissai mon esprit vagabonder. Ma main gauche serrait le pommeau de ma « nouvelle amie » et je soupirai. Les évènements étaient encore durs à réaliser. Je savais que j'avais de la chance d'être en vie, de garder des membres mais, je ne m'étais jamais vue avec une canne et j'avais encore beaucoup de mal à me projetter dans l'avenir.

Comment allais-je réussir à me venger alors que j'avais des problèmes aux jambes ? Même un enfant aurait pu me déstabiliser. Et même si j'y parvenais et que je survivais, je voyais mal ma vie avec cette canne.

Arrête de te plaindre.

Mes entrailles se serrèrent et je soufflai. Cette maudite voix avait raison. M'apitoyer sur mon sort ne changerais rien à ma condition. Je devais m'efforcer d'accepter ma nouvelle condition de vie. Sinon, j'aurais vraiment fini par être dépressive.

Nous arrivâmes enfin dans le quartier de Noon. Le soleil descendait peu à peu et le ciel se colorait en un rouge orangé magnifique. Il y avait très peu de Papillons dehors, sûrement à cause des monstres qui s'attaquaient à eux. Valentin gara la voiture et seul Nadian en descendit. Je regardai Noon, étonnée de voir qu'elle et le deux autres ne détachaient pas leur ceinture. Elle me fit un sourire maladroit et se gratta le bras.

— Nous devons faire notre rapport à Dettlaf. Nadian va te raccompagner à l'appartement.

Génial. J'allais me retrouver seule avec l'homme le plus froid de la planète. Eh bien tant mieux, je n'aurais pas eu à faire la conversation. Je hochai la tête et descendis à mon tour. La portière se referma derrière moi et le van redémarra avant de s'éloigner de nous. Je restai là, à le regarder disparaître.

— Je dois les rejoindre, dépêchons-nous.

D'ordinaire, j'aurais probablement sursauté en entendant sa voix grave dépourvue de toute tonalité. Mais tout cela, c'était du passé. J'acquiesçai simplement et nous nous mimes en routes. Personne ne parlait. Je restais à bonne distance de lui, Dieu seul savait pourquoi. Je me disais encore des questions sur son nom et sur son histoire. Je réalisais que je ne savais strictement rien sur lui.

Le trajet à pieds nous pris plus de dix minutes, minutes durant lesquelles aucun mot n'avait été échangé. Nous atteignîmes l'appartement de Noon, mais il n'ouvrit directement pas la porte. Il m'observait désormais de ses yeux glacés et je sentis une boule se former dans ma gorge. Je n'aimais pas ce regard.

— Un problème ? lui demandai-je.

Soupirant, le Sanglant croisa ses bras musclés sur sa poitrine.

— Je crois savoir ce qu'ils t'ont fait, là-bas, et je comprends que tu sois brisée. Je suis vraiment navré du fait que tu doives avoir une canne à ton âge. La vie est injuste, c'est comme cela. Mais Neha et Sumy se sont beaucoup inquiétées pour toi, allant même jusqu'à nous menacer d'aller à ta recherche toutes seules. Je sais que c'est dur, mais tâches d'être moins froide avec elles. Je te le demande.

La colère inonda mes veines. Non pas à cause de ce qu'il avait dit sur Neha et Sumy, mais pour ce qu'il avait dit avant. Il ne pouvait pas comprendre ce que j'avais vécu, personne ne le pouvait.

— D'accord pour Neha et Sumy, soufflai-je, les narines frémissantes. Mais ne t'avises pas de me dire que tu me comprends. Je te l'interdis.

Si un jour on m'avait dit que je parlerais au Papillon blanc sur ce ton, j'aurai éclaté de rire. Mais actuellement, il ne fallait pas me chercher. Je me sentais comme une bombe à retardement prête à exploser à la moindre action.

Il ne releva pas le tutoiement. Au contraire, un sourie froid incurva ses fines lèvres.

— Ce que tu as vécu, Dayanara, débuta-t-il en se rapprochant de moi. Je l'ai vécu aussi, mais en bien pire. Tu en veux à tout le monde car personne n'est venu t'aider pendant que tu souffrais le martyr. Tu as supplié les Dieux, et même la Mort de te sortir de cet enfer. Mais tu n'as reçu aucune aide. Alors tu as sombré. Tu as une enveloppe physique, certes, mais à l'intérieur (il posa son index sur ma poitrine) tu es complétement morte. Une émotion a alors pris le dessus sur toutes les autres : la colère. Elle est devenue ton alliée, ta personne, ton quotidien. Elle te pousse à vouloir te venger ; détruire ceux qui t'ont fait du mal, les torturer comme eux ils t'ont torturé. Crois-moi, je sais exactement ce que tu vis. Je n'ai pas de canne, mais mon corps et mon âme sont marqués au fer rouge. Et laisse-moi te dire une chose, ne pense pas que tu peux te libérer de cet enfer dans lequel ils t'ont plongé de force. Même si tu te venges, même si tu te salis les mains. Une fois qu'on y est, on ne peut plus en sortir.

Je restai sans voix devant sa tirade alors qu'il reculait. Mes yeux plongèrent dans le siens et ma gorge me brûlait. Qu'as-tu vécu ? avais-je envie de lui demander. Mais les mots refusaient de sortir.

Nadian se retourna vers la porte.

— Fais ton plus beau sourire hypocrite, me dit-il.

Et il l'ouvrit. A peine était-il entré que deux masses se jetèrent sur lui, l'assommant de questions. Neha et Sumy secouèrent Nadian pour qu'il réponde, mais elles se figèrent lorsqu'elles me virent. Un méli-mélo de joie, de surprise et de consternation dansait dans leurs yeux et, après un bref instant de silence, elles se jetèrent sur moi et m'enlacèrent. Je souris du mieux que je pouvais et tentai de leur rendre leur étreinte.

— Dayanara, murmura Neha, comme si je n'étais qu'un mirage et que j'allais bientôt disparaitre. C'est vraiment toi ?

— Apparemment oui, répondis-je de mon ton le plus normal.

Elle resserra son emprise sur moi.

— J'étais tellement inquiète !

— Je sais.

— Tu es partie depuis si longtemps.

— Je... Je sais.

Les deux sœurs me relâchèrent et me regardèrent. Leurs yeux se posèrent sur la canne et il eut un moment de silence. Je crois qu'elles ne l'avaient pas encore remarquée et elles semblaient aussi choquées que moi, lorsque Malter m'avait annoncé que j'en aurais besoin. La situation était assez gênante ; elles ne détachaient pas le bâton du regard. Nadian brisa cet instant de malaise e se rapprochant de Neha.

— Il faut qu'elle se repose. Elle va prendre une douche et tu vas lui donner à manger. Demain, sortez-vous promenez, elle doit s'habituer à sa canne.

Neha hocha la tête et l'observa.

— Où vas-tu ?

— Je vais rejoindre ta grand-mère chez Dettlaf, on doit parler. (Il se tourna vers moi). Je ne sais pas quand on rentrera mais ménages toi. Dettlaf viendra de lui-même te parler.

— Je suis toute à fait apte à lui parler aujourd'hui, rétorquai-je.

Nadian soupira et croisa ses bras.

— Ce n'est pas une bonne idée. Tu as eu assez de mauvaises nouvelles aujourd'hui (il regarda ma jambe), tu es fatiguée et tu dois te reposer. Tu le verras après.

Non, je ne voulais pas remettre à plus tard ce que j'étais tout à fait capable de faire maintenant. Et avec le sang de Malter, je me sentais bien. Je devais voir Dettlaf le plus vite possible, pour qu'il me redonne mes souvenirs et que je puisse lui dire ce que je savais. Pour moi, c'était prioritaire. Je secouai la tête et soupirai.

— Je vais bien. Il me faut juste une douche. Attends-moi, je ne serai pas longue.

— Dayanara, murmura Neha.

— Tu es stupide ou quoi ?, me demanda le Sanglant.

Il semblait perdre patience mais ce n'était pas mon problème. Traitez-moi de déraisonnable. Mais lorsque l'on vous kidnappe, on vous torture, on vous mutile et on vous apprend que vous allez passer le reste de votre vie à vous trimballer une canne, croyez-moi, rien ne peux plus vous arrêter.

— Il s'agit de ma vie, de ma santé, et je me sens bien. Je veux voir Dettlaf aujourd'hui, pas demain ni dans une semaine. Alors attends-moi.

Sans lui laisser le temps de parler, je me dirigeai vers la chambre de Neha, celle-ci sur mes talons. Nous nous enfermâmes dans la pièce et la jeune femme s'assis sur le lit.

— Ce n'est pas du tout une bonne idée, Dayanara. Tu dois te reposer, tu es...

Elle me dévisagea de haut en bas. Oh, mais elle pouvait le dire. J'étais maigre, mutilée, boiteuse, et il y avait encore plein d'autres adjectifs pour me designer.

Un laideron.

— Tu as besoin de repos, répéta-t-elle.

Je soupirai et m'adossai sur le mur.

— J'ai tenu un bon moment dans cette prison, donc cela ira. De toute façon, je dois parler à Dettlaf, mieux vaut le faire maintenant.

— Oui, débuta-telle, la voix basse. Tu as du tellement souffrir. Je ne peux même pas imaginer ce qu'ils t'ont fait. Ils t'ont probablement torturée. Et maintenant tu as une canne !

— Neha, soufflai-je, à mi-chemin entre la colère et l'agacement. Arrête s'il te plait.

Je me souvenais très bien de ce que j'avais vécu. Je n'avais pas besoin d'un rappel. Nous nous fixâmes pendant plusieurs secondes avant qu'elle ne sourît tristement. Ses lèvres murmurèrent un petit « ok » avant qu'elle ne s'élève et sorte de la chambre. Je manquai de soupirer de nouveau et me dirigeai dans la salle de bain. Je ne pris même pas la peine de m'attarder devant le miroir. Franchement, qui aurait aimé voir un squelette vivant ? Personne, et surtout pas moi.

Je posai ma canne sur le lavabo et m'appuya sur le mur pour me placer sous le jet d'eau brûlant. Heureusement que je pouvais prendre appuie sur le mur, sinon je serai tombée depuis longtemps. L'eau à mes pieds était sale et témoignait de la quantité de crasse qui me recouvrait. Je me lavai avec une seule main cinq de fois, frottant toujours plus fort sur mon épiderme. Je voulais effacer toutes les traces de ma captivité, même si c'était impossible. Mes cicatrices finirent par me brûler, d'autres s'ouvrirent même. Je grommelai dans ma barbe et me rinçai une dernière fois. Je m'emparai d'une serviette propre dans l'un des armoires et me séchai rapidement. Sortant de la pièce, je vis des vêtements— un simple pantalon bas large et un haut blanc— posés sur le lit.

Je dû m'asseoir sur le lit pour les enfiler et fis abstraction du fait qu'ils me flottaient assez. Ma peau, mon corps, tout mon être me répugnait. Je me trouvais dégueulasse, repoussante, et handicapée. Une boule de colère se forma dans ma gorge. Je m'agrippai à mes genoux pendant quelques secondes, et entrepris un exercice respiratoire. Je devais retrouver mon calme. Ce n'était pas le moment de s'énerver. Je me répétai mentalement que Dettlaf m'aiderai et cette idée réussis à m'apaiser.

J'attrapai ma canne qui était à mes pieds et me remis debout. Sortant de la chambre, je me précipitai tant bien que mal dans le salon et découvrit que Nadian m'avait bel et bien attendu.

Parfait.

Lorsqu'il me vit, son regard glissa sur mon corps, s'attarda sur les os visibles de mes bras dénudés, sur mes cicatrices, puis sur mes jambes. Heureusement, il ne fit aucun commentaire et se dirigea vers la porte. Je me tournais vers Sumy et Neha, qui observèrent également mes bras, et leur soupira :

— À toute à l'heure.

Je n'attendis par leur réponse et suivis Nadian. Nous nous dirigeâmes, encore une fois en silence, vers un parking. Nadian s'avança vers une petite camionnette blanche et la déverrouilla. J'étais un peu surprise, étant donné que la première fois, j'étais allée au bureau de Dettlaf à pieds.

— On n'y va en voiture ?

— On se rend au domicile de Dettlaf. C'est un peu plus loin.

Oh.

J'acquiesçai et nous prîmes place dans le véhicule. Le Sanglant ne m'accordait pas une once d'attention et je ne souhaitais pas vraiment faire la conversation, jusqu'à ce que une question me picote la bouche :

— Nadian ?

Il me jeta un coup d'œil qui m'incita à poursuivre.

— Lorsque, débutai-je en cherchant la formulation de ma phrase. A Bath, est-ce que tu as croisé une rousse, à l'apparence menue, et un homme de soixante-dix ans, chauve et aux yeux noirs ?

— Non, répondit-il sans hésiter.

Il paraissait toujours énervé à cause de mon entêtement. Je fis abstraction de sa mauvaise humeur.

— Ah. Et, as-tu vu un homme qui me ressemblait assez ?

J'espérais que mon père ne soit pas parmi les victimes. Il n'avait rien à voir dans cette affaire et je ne voulais pas qu'il lui soit arrivé malheur. Nadian répondit par la négatif et je manquai de souffle.

Papa, dis-moi que tu vas bien.

Il eut un bref moment de silence avant qu'il ne soupire.

— Tu devrais poser cette question aux autres. De mon côté, je ne me suis pas occupé de personnes ayant ces descriptions. Navré.

Je hochai la tête et la suite du trajet se fit dans le calme.

Le domicile de Dettlaf se trouvait dans le quartier de La City. On m'avait toujours dit que cette zone, où logeaient essentiellement les Papillons de minuit, était chic, moderne, parfaite. Les maisons étaient censées être majestueuses, colorées... le rêve quoi ! Eh bien, c'était du grand n'importe quoi. Certes, il y avait de grandes maisons— des duplex— mais elles étaient plutôt sinistres et certaines étaient dans le même état que celles des autres quartiers de Londres.

Nous nous garâmes devant un chalet en bois de chêne où se trouvait le petit van. Nous descendîmes de la voiture et j'observai en détail la maison. Elle était grande mais un peu froide. Le jardin n'était pas en bon état et on pouvait apercevoir des barbelés et de petits fossés ici et là. Un de mes sourcils se leva. Pourquoi diable ne s'occupait-il pas de son jardin ? Lui qui avait la chance d'en avoir un.

Je me remémorais alors l'état de son bureau et la réponse me sauta aux yeux. S'il était trop fainéant pour ranger son propre lieu de travail, sa maison ne devait pas être en meilleure état.

Nadian s'approcha de la porte d'entrée et toqua. Une fois, puis deux, avant que Sansa ne vienne ouvrir. La blonde me regarda, comme si elle avait du mal à me reconnaitre. Comme le Sanglant, elle fixa mes bras striés de cicatrices et bien trop minces et ma canne qui me soutenait. J'aurai juré voir la surprise et l'horreur déformer ses traits mais elle fut assez intelligente pour détourner rapidement le regard et nous inviter à entrer.

Je m'avançai et pénétrai dans la maison du chef des Papillons de minuit.

Et c'est parti !           

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