Chapitre 5

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Pdv Eren

Je rentre dans ma chambre, perturbé par mes propres actions. Je me laisse tomber sur le lit. Je repasse les images de la soirée dans ma tête. Tout se passait bien, jusqu'à ce que je perde le contrôle. Je ne sais pas ce qui m'a pris. J'ai agi par réflexe. J'ai cru qu'il me donnait un ordre, et je n'ai plus rien contrôlé. Mon corps a semblé prendre le dessus. Pourtant, j'étais dans un état très différent de quand je m'entraînais avec Sasha. Bref, je n'ai pas le courage d'y réfléchir plus. Je me laisse couler doucement dans le sommeil.

Je n'arrive pas à m'empêcher d'être triste. Sire Levi est vraiment distant, il ne fait attention qu'à lui. Je préférais largement Sire Armin, lui au moins il prenait soin de moi. Le seul point positif, c'est que je me suis fait des amis parmi les domestiques privés de Sire Levi. Je m'entends très bien avec Connie, le majordome, Christa, la femme de chambre, et Ymir, la cuisinière. Ils me soutiennent beaucoup depuis que je suis arrivé. Ils essaient tous de me remonter le moral à leur manière. Connie me raconte des anecdotes à propos de Sire Levi, Christa passe beaucoup de temps à parler avec moi, à me divertir, et Ymir nous cuisine des plats délicieux. Nous passons de très bons moments tous ensemble. Ça me change de la solitude écrasante de la salle commune des domestiques du palais. Ici, je me sens un peu plus à ma place. Christa a un an de moins de que moi, Connie a le même âge que moi, et Ymir a deux ans de plus de moi. Je me suis rarement senti aussi proche de gens de ma génération. Ça me fait plaisir, je me suis fait des amis. Christa me fait penser à Sire Armin parfois, elle est aussi énergique et extravagante que lui. Peut être un peu plus timide. Elle et Ymir sont amies de longue date. Parfois, quand je rentre dans la cuisine, elles sont en train de s'embrasser. Cela ne me choque plus. Après tout, elles font bien ce qu'elles veulent.

Mes nouveaux amis me remplissent de joie et de bonne humeur, ce que Sire Levi ne fait absolument pas. Quand il n'est pas au conseil, il passe tout son temps entre son bureau et le salon, toujours avec une tête d'enterrement. Il ne quitte jamais son air sérieux ou ennuyé, et passe ses journées à travailler. Il ne parle à personne, ne reçoit personne, n'accorde d'attention à personne. C'est comme si nous n'existions pas. C'est très différent d'avec Sire Armin. Lui, il prenait le temps de parler avec ses domestiques, il allait les voir, et il les remerciait en les appelant par leur prénom. J'ai même passé de bonnes soirées à discuter tranquillement avec lui, comme si nous étions amis de longue date. Il laissait clairement apparaître sa jeunesse et son ingénuité, ainsi que sa méconnaissance des règles de la noblesse concernant la relation avec les domestiques. Levi, lui, bien qu'il n'ait que trente ans, semble avoir le caractère d'un vieillard ennuyé et sérieux. Jamais il ne prend le temps de s'amuser, ou de discuter avec des gens de son âge d'autre chose que de politique ou d'affaires économiques. Il me ferait presque de la peine.

Enfin si, je l'ai déjà vu sourire. Une fois. Une seule fois. Il était installé dans le salon, et il lisait une lettre. Tous ses traits étaient détendus, et un léger sourire flottait sur ses lèvres. Il était.... attendri ? En tout cas, cela m'a fortement surpris. Il avait enfin l'air de ce qu'il est vraiment : un jeune adulte de trente ans. Je ne sais pas de qui venait cette lettre, je ne sais pas de quoi elle parlait, mais Levi en était transformé. Ainsi, derrière le masque de froideur et de dureté se cache un jeune homme attendrissant, au sourire étonnamment mignon.

J'ai parlé de ce que j'avais vu à Connie. Il m'a expliqué que parfois, en général pendant qu'il lit des lettres, Sire Levi se détend et sourit. Connie m'a même dit l'avoir vu rougir plusieurs fois. Mais personne ne connaît la provenance de ces lettres qui font tant d'effet à mon Maître. Je ne peux pas m'empêcher d'être curieux.

Au final, dans les appartements de Sire Levi, je fais le même travail que lorsque je travaillais en bas, mais je suis payé largement plus, et je me suis fait des amis. En gros, pour le moment, je n'y vois que du positif. Cela va faire trois semaines que je suis ici, et je me suis complètement habitué à ce nouvel environnement.

Ce soir, pour fêter le rétablissement de Dame Hanji, Sire Levi est convié à une fête. Elle comprendra tous les membres du conseil, ainsi que quelques autre invités de marque conviés spécialement par Hanji. Levi va s'y rendre, mais il semble le faire plus par courtoisie et obligation qu'autre chose. Pendant ce temps, nous autres domestiques avons quartier libre. Simplement, l'un d'entre nous doit l'attendre ce soir au cas où il rentre vraiment tard. Connie étant exténué, je me porte volontaire. Après tout, le connaissant, il ne restera là bas que le temps nécessaire pour prouver sa bonne volonté.

Je m'installe dans un des fauteuils du salon. Les autres sont tous partis se coucher. Nous avons discuté longuement, mais les uns après les autres, il sont tous allés dormir. Je me retrouve donc seul à attendre. Il est 1h02 du matin. Je ne pensais pas qu'il mettrait autant de temps. Je lutte contre le sommeil, tranquillement installé dans le fauteuil. C'est à 1h32 que j'entends du bruit au niveau de la porte d'entrée. Levi pénètre dans ses appartements, passablement éméché. Je me précipite vers lui, constatant que son équilibre n'est plus ce qu'il était. Je l'aide à marcher jusque dans le salon, mais la tâche est difficile. Il ne dit rien, son visage semble crispé. Je le fais asseoir dans un fauteuil, et vais lui chercher un verre d'eau. Lorsque je reviens, son visage s'est métamorphosé. Il s'est détendu, mais a aussi pris en couleurs. Ses joues sont écarlates, et ses yeux sont à demi fermés. Sa bouche est entrouverte et laisse passer un souffle erratique. Probablement un coup de chaud dû à l'alcool. Je lui tends le verre, qu'il boit d'une traite. Sa poitrine se soulève à un rythme inhabituel.

"- M- Maître ? Vous allez bien ?"

Je ne reçois pas de réponse. Je commence sérieusement à m'inquiéter. Je me penche sur lui et commence par lui retirer sa veste. Il faut qu'il ait moins chaud. Il se laisse faire. Je lui retire également son gilet. Ces tenues de noble sont impossibles ! Malgré tout, son souffle ne se calme pas. J'hesite à lui retirer sa chemise. Il me regarde, les yeux brillants. Ses joues n'ont pas perdu de leur couleur. Je prends sa main. Elle est brûlante. Bon, là, je n'ai pas le choix. Je me penche et commence à lui retirer sa chemise. Mais à peine ai-je défait deux boutons, que je l'entends gémir. Je m'écarte, choqué. Après quelques secondes, je continue ce que j'étais en train de faire, mais un deuxième gémissement franchit ses lèvres. Cette fois ci, sa main s'enroule autour de mon poignet. Il me maintient contre lui. Son regard est devenu suppliant.

"- S'il te plaît.... Aide moi.... Je t'en prie.... Fais ton travail...."

Le Royaume d'Eldia  {Ereri}Where stories live. Discover now