Chapitre 51

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Pdv Eren

Le manoir bourdonne comme une ruche, tout le monde s'active à faire les bagages pour notre retour à la capitale. Sire Farlan vient, lui aussi, il a été invité par le Roi Erwin en personne, qui estime qu'il est juste pour lui d'assister à la condamnation de ceux qui ont tué ses parents.

Il est très étrange pour moi de regarder la chambre se vider, cette chambre que j'ai partagée avec Sire Levi depuis bien des mois, où nous avion réussi à trouver nos marques, à nous entendre, là où nous nous sommes découverts, presque aimés, mais aussi là où j'ai failli mourir, une dague plantée dans mon épaule.

J'aide Christa à porter la dernière malle jusqu'aux calèches qui nous attendent devant le manoir, et alors que je suis en train d'attacher les bagages sur le toît, je vois dans les jardins Sire Farlan qui semble en grande conversation avec Sire Jean. Je les observe un instant. Sire Farlan prends Sire Jean contre lui, le serrant dans ses bras, et je détourne le regard alors que leur visage se rapprochent. Je n'ai pas besoin de voir ça.

Je croise Sire Farlan peu de temps après, seul.

"- Ah, Eren, tout le monde est prêt à partir ?

- Je crois bien, oui.

- Parfait.

- Monsieur, si ce n'est pas indiscret, je voulais savoir si Sire Jean allait aussi être du voyage."

Il pousse un long soupir.

"- Non, il ne vient pas avec nous. Je pense que c'est pour le mieux.

- Mais est-ce que les choses vont mieux entre vous ?

- En quelque sorte, oui.

- Je suis content pour vous.

- Merci beaucoup, Eren."

Petit à petit, tout le monde monte dans sa calèche. Une calèche vide fera aussi le voyage avec nous, elle contient toutes les affaires de Dame Hange et de Sire Armin. J'ai comme une sensation de déjà-vu, alors que Sire Levi, Christa, Ymir et moi montons dans la calèche, tandis que Connie monte à l'avant avec le cocher. Je regarde le manoir s'éloigner petit à petit, et sens ma gorge se serrer, sans que j'en sache la raison.

Le trajet se fait principalement dans le silence, tout le monde semble fatigué et une ambiance étrange flotte sur le cortège, le sentiment bizarre que tout pourrait enfin être fini, toute cette angoisse et ce malheur, un sentiment qui pourrait être le bonheur si on ne se souvenait pas que ce sont les gens qu'on croyait être nos amis qui nous manipulaient et nous tuaient sans vergogne, tout ça pour accéder au pouvoir, et qui vont sûrement être tués à leur tour. Sire Levi passe son temps à regarder par la fenêtre, tandis qu'Ymir et Christa s'endorment rapidement l'une sur l'autre. Pour ma part, je me laisse embarquer dans le long flot de mes pensées, tant et si bien que je ne vois pas le temps passer, et ce n'est que quand la calèche passe de la route de terre aux rues pavées de pierre de la capitale que je me rends compte que le soleil est en train de se coucher. Je regarde autour de moi, redécouvrant la capitale comme si je ne l'avais jamais vue, et observant le palais qui se rapproche de plus en plus, avec ses immenses tours et ses couloir labyrinthiques.

Les nobles descendent en premier pour faire leur entrée par la porte principale, tandis que les calèches nous conduisent, tous les domestiques, vers l'arrière du château, où nous déchargeons les bagages et les montons dans les appartements, avant de tout remettre en ordre dans les affaires de Sire Levi. Cela me fait bizarre de retrouver les appartements de Sire Levi, de revoir sa chambre, le salon, les cuisines, de voir que rien n'a changé, rien n'a bougé, alors que j'ai l'impression que ça fait des année que je suis parti, alors que j'ai l'impression d'avoir énormément changé, c'est comme si je faisais tout d'un coup un grand pas en arrière.

Je finis par monter ma petit valise, et par pousser la porte de ma chambre. Ma chambre. Pas sa chambre, pas notre chambre. Ma chambre, à moi, seul. Je me laisse tomber sur le lit, fixant le plafond. Je me rends soudain compte de ce que ce retour au palais signifie. Je vais être seul. Sire Levi et moi ne nous verrons pratiquement plus. D'un côté, c'est peut être mieux, c'est probablement moins stressant pour lui, il pourra dormir tranquillement, mais en même temps.... En même temps je sens que ça va me manquer, ça va me manquer de passer du temps avec lui comme ça, ça va me manquer de discuter avec lui, de dormir avec lui....

Il va me manquer.

Ça y est, tout est revenu à la normale. Sire Levi a réintégré ses appartements après ce qui semblait être une très longue entrevue avec le Roi et ses minsitres. Je repense à la lettre qu'avait reçue Sore Farlan de la part d'un des ministres. Au final, je suppose que mon inquiétude était infondée. Je ne sais pas vraiment comment va s'organiser le Conseil, maintenant qu'ils ne sont plus que deux. Je suppose que de nouveaux membres vont être désignés par les ministres. En attendant, le Palais tout entier est en fête, célébrant le retour de ses occupants et la fin de cette période de peur.

Sire Levi rentre tôt du grand dîner de célébration, et s'assoit dans le salon, en face de la cheminée, un verre de vin rouge à la main. Je l'observe depuis le couloir alors que je me diriges vers ma chambre. Il regarde tristement les dernières flammes danser sur les braises. Je me tourne pour rentrer dans ma chambre, quand je l'entends m'appeler.

"- Eren ?"

Je m'arrête net, et fais demi tour.

"- Oui, Monsieur ?

- Tu peux venir s'il te plait ?

- Bien sûr. Avez vous besoin de quelque chose ?

- J'ai besoin de parler. Avec toi. Assieds toi s'il te plait."

Je m'avance dans le salon et m'assoit dans le fauteuil qui fait face au sien. Il ne dit rien pendant un moment, sirotant son vin, avant de poser le verre sur la petite table située à côté de lui.

"- Alors c'est vraiment fini ? finit-il par dire. Tout est censé redevenir comme avant ?

- Je suppose, Monsieur.

- Mais comment ?

- Je ne sais pas, Monsieur.

- Après tout ce qui s'est passé, tout ce qu'on a vécu, comment on est censés retrouver nos vies normales ?

- Je ne sais pas, mais si vous avez besoin de quoi que ce soit, vous pouvez faire appel à moi, Monsieur.

- Arrête.

- Pardon ?

- Pourquoi tu te comportes comme ça ? Pourquoi es tu distant, froid et professionnel comme ça ? Ce n'est pas ce dont j'ai besoin, là, tout de suite, maintenant !"

Je marque une pause, surpris par ses mots. C'est vrai que j'ai été exagérément distant avec lui ce soir, je ne sais pas vraiment pourquoi moi même. Je me suis dit qu'il préfèrerait sans doute cela, qu'il voudrait sans doute oublier, que ce serait mieux si je redevenais un domestique comme un autre pour lui.

"- De quoi avez vous besoin ?

- D'Eren. De celui qui a été là pour moi pendant des mois, pendant que je vivais dans la peur, et qui a su me rassurer, me réconforter et me faire me sentir bien pour la première fois de ma vie."

Je pousse un long soupir, et me penche pour prendre ses mains dans les miennes. Elles tremblent légèrement.

"- Je suis là, tout va bien. Je suis là si vous avez besoin de moi, toujours.

- Je ne veux pas que les choses redeviennent comme avant. Parce qu'il s'est passé des choses, des choses qui ont tout changé, et je ne veux pas d'un retour en arrière. S'il te plait, reste le Eren que j'ai connu au manoir. J'ai besoin de lui."

J'entremêle mes doigts aux siens, les serrant doucement.

"- Je reste...."

Le Royaume d'Eldia  {Ereri}Waar verhalen tot leven komen. Ontdek het nu