Chapitre 1

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I won't disappoint you, Master.
Je ne vous décevrai pas, Maître.

***

Une lumière s'alluma dans la nuit noire. Une faible lumière qui parvenait d'une petite maison cachée au beau milieu de Little Hangleton, ville perdue du monde.

Un homme allumait sa gazinière dans cette même maison alors que la radio vibrait dans une seconde pièce et que le vent sec s'infiltrait dans la cuisine. Cet homme s'appelait Frank Bryce. C'était l'ancien jardinier des Jedusor dont les trois membres de la famille étaient morts quelques années auparavant d'une raison similaire et soudaine. Une famille redoutée et mise de côté. La légende disait, et se racontait encore en étant enjolivée par les régions traversées et par le temps passé qu'un beau matin d'été, la servante des Jedusor avait ouvert le vieux manoir et avait trouvé les trois cadavres de ses maîtres. Elle s'était rendue en toute hâte à la vieille ville et la police avait aussitôt accouru sur les lieux. Le jour-même, leur jardinier avait été arrêté et tout le monde en parlait. Aucun habitant n'avait douté de son crime alors qu'il s'était su innocent. Frank était un homme hanté par la guerre qui boitait et n'entendait presque plus d'une oreille. A son retour du front, il avait pris la place de jardinier chez les Jedusor et n'avait plus jamais embêté personne. Et ce jour là il s'était retrouvé au centre du tableau. Mais plus tard, une autopsie avait révélé que les Jedusor n'avaient ni été poignardés, étouffés, noyés ou quoi que ce soit d'autre, mais qu'ils avaient été la victime d'une simple mort naturelle. "Ils sont en parfaite santé, avait cité un médecin légiste. Ils sont simplement morts." La raison de l'extinction de la famille était restée inconnue, bien que incongrue. Pourquoi Tom et ses parents au même moment ? Pourquoi la famille entière ? De quelle façon ? Comment se faisait-il qu'il n'y avait pas eu de trace ? Personne ne connaissait les réponses, et tout le monde continuait d'accuser le vieux Frank qu'on avait libéré. Les corps avait été enterrés, et le vieil homme continuait toujours de travailler pour les nouveaux propriétaires du manoir après ce triste drame, mais personne ne restait bien longtemps à cause de sa réputation et de la froideur de l'endroit. Plus tard, ça avait été les enfants qui s'étaient mis à y pénétrer et à s'y cacher. Ils faisaient ça pour le provoquer. Personne ne l'aimait et les adolescents s'amusaient à l'embêter. Mais Frank ne disait rien. Il restait impassible et ne soufflait mot.

Cette nuit là, la douleur à sa jambe qui se faisait plus forte chaque jour l'avait extirpé de son sommeil et il était descendu se préparer une bouillotte pour la soulager.

Il leva les yeux vers la fenêtre abîmée qui donnait sur le sombre manoir plongé dans la nuit et découvrit qu'une petite salle était éclairée.

Frank grogna dans sa barbe. Les enfants étaient encore entrés dans la maison et il allait devoir les chasser lui-même. Frank n'avait pas de téléphone. Depuis son arrestation, il se méfiait de la police et doutait même qu'elle vienne l'aider. Quelque part, tout le monde désirait qu'il déserte la ville.

Il s'empara d'une lampe torche, d'une vieille clé toute rouillée à cause des années passées et sortit de sa vieille maison, direction le grand manoir qui se perdait dans les ténèbres de la nuit.

Il traversa le long jardin effrayant et grimpa les marches de pierre. Le manoir était protégé par des haies tortueuses qui abritaient des nids de corbeau. Personne ne s'y aventurait à une heure pareille. Le soleil parvenait à peine le jour et le vent ressemblait plus à des tourbillons déchaînés de feuilles qui dressaient les poils de quiconque s'impatientait dans cet endroit. On y entendait les chiens aboyer et les loups hurler dans la pénombre. Certains disaient que les Jedusor avaient adopté une bête qui attaquait quiconque osait pénétrer le jardin. Personne n'avait pu confirmer, mais aucun n'osait le démentir. Les Jedusor avaient été des gens si cruels qu'aucun habitant de la petite ville ne doutait de la violence dont ils avaient été capables. Seuls Frank et l'ancienne servante savaient que les corbeaux avaient été les seuls bêtes qui avaient tenu compagnie à l'endroit et qui continuaient de le faire.

Jane Windia et la Coupe de FeuWhere stories live. Discover now