Partie 23

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Media : Time - Hans Zimmer

La sensation de froid intense que je ressentais me sortit peu à peu de ma torpeur. Je grelottai. Les deux bras qui m'entouraient, me retenant fermement contre un torse puissant, laissaient pourtant passer leur dose de chaleur — les anges étaient-ils donc si chauds ?

Malgré cela, je ne pouvais m'empêcher d'avoir froid.

Le phénomène aurait pu résulter du fait que je me trouvais à présent à des centaines de mètres au dessus du sol et que le vent qui venait me fouetter était d'une fraîcheur polaire. Mais c'était surtout le sentiment de vide qui habitait désormais mon être qui me glaçait le sang.

J'entendais les ailes de mon ravisseur frapper l'air derrière nous et je rêvais qu'elles cessent enfin leur martèlement détestable, qu'il ouvre ses bras et me laisse plonger dans le vide pour rejoindre celui que j'aimais. Il n'y a qu'avec lui que j'aurais souhaité m'élever.

Seulement, la prise de l'ange sur ma taille était bien trop ferme, il me cadenassait contre lui. Aucune chance que je ne tombe. Je le haïssais.

Nous survolions à présent le CDLC. La citadelle se dressait fièrement devant moi, splendide, majestueuse, et je ne pouvais m'empêcher de la trouver laide.

C'était pourtant un joyau d'architecture, digne des plus beaux châteaux que nous offraient les contes de fées. En fait, en y regardant de plus près, je lui trouvais une vague ressemblance avec le Taj Mahal.

Le bâtiment, recouvert d'une superbe coupole d'un bleu diaphane, était entouré par une forêt composée d'arbres que je n'aurais jamais imaginés autrement que dans mes rêves. Ils s'élevaient aussi haut que les plus beaux spécimens de séquoias peuplant la Terre, mais la forme de ces géants était toutefois bien différente. Leurs feuilles cristallines retombaient sur le sol à la manière des saules pleureurs et l'ondulation de leurs longues branches pendantes donnait le sentiment qu'ils étaient vivants.

La sylve reposait sur un amas de terre et de roche et flottait dans les airs sans se soucier d'un quelconque problème de pesanteur. L'ensemble donnait l'impression que l'on avait arraché la cité aérienne au sol de son propre monde pour ne laisser qu'un cratère derrière elle... Après tout, tel avait peut-être été le cas.

Mais ce paysage du merveilleux était surtout le reflet de mon malheur, il abritait les êtres qui avaient déchiré mon âme. Et rien que pour cette raison, je l'abhorrais.

Mes larmes avaient gelé sur mes joues, mon corps était pétrifié lui aussi. L'ensemble de mes forces m'avaient abandonnées à l'instant même où Keran s'était fait transpercer le cœur. Je n'étais plus qu'une poupée inarticulée, simple observatrice dans le corps d'une autre.

J'avais perdu ma raison de vivre.

Je ne comprenais toujours pas comment tout avait pu dégénérer aussi rapidement. Keran avait pourtant été si près du but... il avait réussi à mettre trois anges à terre avant que l'un d'entre eux, le pire de tous, ne le poignarde lâchement dans le dos.

Ce dernier avait attendu que l'incube se tourne vers moi, connaissant ainsi son unique moment de relâchement, pour asséner le coup qui lui avait été fatal.

Le plus insupportable dans cette histoire était de savoir que j'étais celle qui avait causé sa perte. J'étais à l'origine de cette tragédie.

Je pleurai de nouveau à cette pensée accablante. Je me méprisais. Comment allais-je pouvoir me le pardonner ? Sans moi, il n'aurait jamais connu ce tragique destin. S'il ne m'avait pas rencontré à la base, s'il n'avait pas eu à me secourir ce soir là, il serait toujours en vie.

Comme s'il pleuvait des anges (Édité)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant