Ils allaient se faire tuer par ma faute. Ces fous étaient prêts à mourir plutôt que de me voir tomber aux mains de l'ennemi. Je ne pouvais pas les laisser faire.

Je fonçai dans le couloir, j'ouvris avec fracas la porte de la partie privée, sous le regard médusé de Booba qui m'interpella au passage. Mais je ne l'écoutai pas et je me précipitai dehors en espérant arriver jusqu'à Keran et Trevor avant qu'il ne soit trop tard.

J'ouvris les deux portes battantes d'un coup sec et pilai net juste devant l'entrée.

A cet instant, je pris pleinement conscience de l'épouvantable tableau qui se dressait devant moi, et je réalisai par la même occasion que la scène à laquelle je venais d'assister était bien réelle. La voir à travers un écran avait atténué le choc, me protégeant un minimum de la gravité de la situation. Donnant à toute cette affaire une dimension virtuelle. Mais je m'apercevais que je n'avais pas vraiment eu le temps de réaliser.

Et, maintenant que j'y faisais face, que j'y étais confronté directement, l'émotion me frappa de plein fouet.

Trevor gisait un peu plus loin, inconscient. Était-il mort ? Non, je ne pouvais pas le penser. La culpabilité qui s'emparait de mon être était déjà beaucoup trop douloureuse pour que je puisse envisager cette éventualité.

Mes yeux me piquaient, tout cela ne pouvait pas être vrai. Ce n'était pas possible.

Le désespoir me gagna. Maintenant que Trevor était définitivement hors jeu, Keran ne pouvait pas même espérer avoir le dessus, ils étaient bien trop nombreux à se dresser devant lui. S'il avait pu s'en sortir face à un ange seul par le passé, il ne ferait jamais le poids face à cinq d'entre eux...

Je reportai mon regard sur lui, j'étais mortifiée, tout s'effondrait. Le bonheur que je venais à peine d'entrevoir s'était envolé en un rien de temps. Je n'avais fait que l'effleurer.

Je regardai Keran et je sus. Je sus que tout était fini.

Je compris à cet instant que l'unique chance que j'avais encore de le sauver allait par la même occasion, et de façon inévitable, m'arracher le cœur. C'était atroce, mais je n'avais plus le choix.

De son côté, Keran semblait épouvanté de me savoir là. Je lisais la terreur dans son regard, il ne s'attendait pas à ce que je vienne. Il me croyait toujours en sécurité dans le bunker et réalisait que ce n'était plus le cas.

— Nae ! Retourne te mettre à l'abri ! Tout de suite ! m'ordonna-t-il.

Je perçu la détresse dans sa voix mais je ne dis rien. C'était trop dur.

Alors je me forçai plutôt à détourner mon regard pour le poser avec appréhension sur celui qui était à l'origine de ce chaos. J'avais senti son regard sur moi à la minute où j'étais sortie du club et il ne m'avait pas quitté depuis.

Seul un pantalon venait l'habiller, rendant visibles les muscles de son torse et ne laissant aucun doute sur leur efficacité. Il était toujours aussi impressionnant que dans mon souvenir, dégageant une aura de puissance écrasante. La force de son regard me bouleversait complètement, c'en était insupportable. Sa simple vue me coupait le souffle.

— Te voilà, ma reine...

Sa voix m'électrisa.

— Tu as changé, observa-t-il de son regard pénétrant.

— Nae, me supplia Keran à nouveau. Fais-moi confiance... retourne à l'intérieur.

Mais je ne lui répondais toujours pas. Je préférai faire un pas en avant, fébrilement, pour vaincre ma peur et affronter cet ange qui menaçait mes amis et qui représentait paradoxalement ma seule chance de les préserver d'un sort funeste.

Comme s'il pleuvait des anges (Édité)Where stories live. Discover now