C'est ce moment-là que choisit Keran pour refaire son apparition, la porte du bunker claquant violemment derrière lui.

Le bruit que produisit ce fracas eut pour effet de me sortir de ma transe instantanément. A mon plus grand malheur, ou bonheur, je n'étais pas encore vraiment décidée sur la question.

La fureur de Keran était palpable. Dire qu'il était énervé serait un sacré euphémisme. Il nous fusillait du regard tour à tour, et le pire c'était que son état parvenait à déclencher en moi un sentiment de culpabilité comme j'en n'avais rarement ressenti. Je n'avais pourtant aucun compte à lui rendre, en tout cas par pour ce qui était de mes fréquentations, c'était certain.

— Dehors ! tonna-t-il.

Sans que je ne parvienne à comprendre comment, mes pas me menèrent aussitôt vers la porte, tel un pantin dont Keran tiendrait les ficelles. Finalement mon état de transe avait simplement muté. Je me dirigeai vers l'entrée sans même réfléchir à la situation ni réaliser qu'on était ici chez Trevor et que si quelqu'un devait me mettre à la porte, c'était lui et personne d'autre. Non, au lieu de ça, je réagissais à l'ordre de Keran comme un automate. Je n'étais plus en état de penser par moi-même et j'avançai sous le regard perplexe de ce dernier.

Attendez... perplexe ?

Keran me fixait, les sourcils froncés, comme s'il ne comprenait pas ce que j'étais en train de faire. Bon sang, ce n'était pas moi qui allais pouvoir lui expliquer.

Il m'arrêta alors que je passais à côté de lui.

— Pas toi, Nae, se radoucit-il.

Je crois que ces derniers mots furent ceux qui me rappelèrent à la réalité. J'avais été complètement débranchée pendant un instant et enfin j'y voyais clair. Enfin, non, je n'y voyais pas clair du tout, mais disons que le voile qui avait pris possession de mon cerveau se leva et que mes neurones purent enfin se reconnecter entre eux.

— Tu ne peux pas mettre Trevor dehors, c'est chez lui, informai-je Monsieur Sexy des fois qu'il ne le sache pas.

Oui, t'as raison, il a pu passer tout le système de sécurité et arriver jusqu'ici sans problème mais il n'a aucune idée d'où il se trouve ni de l'identité du propriétaire des lieux.

Je reportai mon regard sur Trevor et le découvris encore plus souriant que d'habitude. À croire qu'il se félicitait de la tournure des événements, comme si nous en étions arrivés exactement là où il le désirait.

Il s'aperçut que je l'observais et me fit un clin d'œil. Je soupirai. Keran grogna.

— Je vous laisse, j'ai encore du boulot au club de toute façon, dit notre hôte tout guilleret.

Il me lança un dernier regard enflammé et sortit en me laissant seule avec son ami et les remontrances qui s'ensuivraient inévitablement. Pendant un instant, j'eus très envie de suivre Trevor pour ne pas avoir à affronter l'air de reproche qui s'affichait déjà sur le visage de Keran. Mais j'étais très curieuse de savoir ce qu'il s'était passé avec l'ange, et je devais bien avouer, maintenant que j'avais retrouvé mes esprits, que j'étais rassurée de le savoir sain et sauf.

Quoi que, il avait l'air d'avoir pris quelques méchants coups à en croire le coquard qui encerclait son œil droit et le sang qui coulait de son nez et de son arcade.

— Est-ce que tu vas bien ? lui demandai-je avec sollicitude en prenant conscience de son triste état.

— Tu n'avais pas l'air de t'en préoccuper plus que nécessaire il y a encore quelques minutes.

Comme s'il pleuvait des anges (Édité)Tahanan ng mga kuwento. Tumuklas ngayon