Chapitre 30 : Maxius

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— Et tu es Saphora Del Wyn, c'est bien ça ? Par ma barbe, tu es bien plus jolie que je ne le pensais. Maxius, petit chanceux !

— Enchantée de faire votre connaissance, monsieur... ?

— Li, s'extasia le vieil homme. Quel joli timbre de voix ! Venez ! Grand-mère Mei est dans son bureau, comme à son habitude. En attendant, tes appartements sont toujours à ta disposition. Tu connais le chemin.

Ils montèrent à l'étage où se trouvait l'aile dédiée aux invités. Trois suites se succédaient et Maxius prit celle où il avait l'habitude de s'établir. Ses affaires personnelles se trouvaient dans une petite pièce scellée dont lui seul avait la clé, juste à côté de la salle de bain. Il n'y gardait pas de trésors, seulement quelques armes et des vêtements en cas de besoin. Le plus important était conservé par sa grand-mère et il avait la certitude que personne n'aurait l'idée saugrenue de s'aventurer dans sa chambre sans son autorisation.

Après avoir déposé leurs affaires, il contempla Saphora évoluer dans ce lieu inconnu. La voir ici lui faisait un drôle d'effet, ayant l'habitude de ne voir que ses aïeuls ou sa sœur vivre ici. Même les vampires assignés à la surveillance demeuraient si discrets que parfois il doutait de leur présence.

Vous pouvez ranger vos affaires dans cette grande commode là et pendre vos vêtements sur ce portant, indiqua-t-il.

— Pas de domestiques ?

Si, quelques-uns, mais ils n'accomplissent pas ce genre de tâches.

— Ah, je vois, répondit platement dame Del Wyn.

Souhaitez-vous que je le fasse ? sourit Maxius.

D'humeur taquine, il lui prit sa valise des mains en ajoutant :

Si cela ne vous dérange pas que je plie vos dessous...

— Qui vous dit que j'en porte, Yue ?

Le vampire faillit faire tomber la valise, surpris par son audace. Saphora riait tellement qu'elle essuya une larme au coin de son œil d'un geste délicat. Son rire était très communicatif. Puis, elle lui reprit son bagage des mains sans se départir de sa mine enjouée.

Très drôle, râla-t-il.

— Vous auriez vu votre tête, vous auriez autant ri que moi, répliqua-t-elle d'un air malicieux. Et les battements de votre cœur se sont accélérés, du moins assez pour que je les perçoive. Moi qui pensais que vous étiez impassible à toute épreuve.

Il l'observa ranger ses affaires, installé confortablement sur son fauteuil préféré au coin de la pièce Non seulement Saphora avait écouté sa leçon rapide sur la perception du rythme cardiaque, mais elle avait déjà assimilé son enseignement. Clematys aurait adoré intégrer un élément comme elle au sein de la garde de Rörk.

Vous apprenez vite, Saphora.

— J'ai hâte de découvrir ce que vous avez à m'enseigner, sourit-elle en se rapprochant de lui.

Etait-ce un sous-entendu pour autre chose ou Maxius se faisait-il des illusions ? Il leva le regard vers Saphora qui le dominait de sa hauteur. L'odeur de lavande se dégageant de sa chevelure vint tourmenter son esprit, se mélangeant à l'encens de l'air ambiant et ils se contemplèrent bien trop longtemps pour que cela paraisse normal. Alors qu'il esquissa un geste pour lui tenir la main, une voix familière vint briser son initiative :

— Yue, mon enfant !

Maxius se leva prestement pour saluer sa grand-mère. En dix ans, aucun affre du temps n'avait entaché sa beauté propre aux vampires de Sang-Pur. Elle tendit sa main d'albâtre vers son petit fils qui lui offrit un baise main en guise de salutations.

— Je suis heureuse de te revoir ici, sourit-elle. Le voyage s'est bien passé ?

Maxius opina du chef avec un léger sourire. Il se décala ensuite pour présenter Saphora, mais il perçut une tension en elle lorsqu'elle la vit s'avancer prudemment vers elle.

— Enchantée de vous rencontrer, tenta Saphora en s'inclinant d'une façon un peu hésitante.

Comme il s'y attendait, il retrouva le froncement de sourcil caractéristique de sa grand-mère, signe d'une contrariété manifeste.

— Au moins, vous êtes jolie, dit-elle en la toisant. Mais Jeva l'est aussi, alors je préfère rester sur mes gardes.

Saphora eut la présence d'esprit de ne pas réagir à son hostilité ouverte. Elle se redressa enfin alors que Maxius prit sa grand-mère par les épaules pour l'apaiser.

— N'essaie pas de m'amadouer, Yue, grommela-t-elle. Allons prendre le thé avant mon prochain rendez-vous, veux-tu ?

Il espéra que ce moment de retrouvailles ne se transformerait pas en désastre. Grand-mère Mei n'avait jamais eu la langue dans sa poche et il commençait à connaître le tempérament de feu de Saphora. Il se demanda combien de temps elle allait tenir face à ses questions inquisitrices et ses remarques acerbes, car même si elle avait survécu dans le monde sans pitié de la cour de nacre, elle allait avoir à faire avec une adversaire bien plus frontale et coriace.

Pourvu que cela se passe bien, espéra-t-il.

De nacre et d'acierWhere stories live. Discover now