Chapitre 21 : Saphora

9 2 2
                                    


Colère. Amertume. Tristesse.

C'étaient là les trois sentiments qui avaient pu faire tenir Saphora durant cette longue semaine de festivités. Fort heureusement, Jiang et Jeva Volkov étaient enfin repartis dans leur horrible région et reviendraient dans quelques semaines pour célébrer le mariage tant attendu. Hélas, Maxius demeurait à Vseya.

A partir de ce moment-là, Saphora ne fit plus semblant de rien, puisqu'elle n'avait plus rien à perdre. Elle détestait ce château et ses murs blancs. Elle haïssait ses leçons de piano, de dessin, le théâtre, l'opéra et les boutiques du quartier nord. Tout ce qu'elle appréciait avant que sa vie ne vole en éclat lui semblait dénué de goût et de couleur. Comme elle s'y attendait, cette rébellion silencieuse passait tout à fait inaperçue.

Comment Maxius avait-il pu accepter ce mariage alors que son cœur refusait cette union ? Pourquoi n'a-t-il pas tenu tête à son père et poussé Clematys en avant ? Les deux femmes avaient pourtant montré leur attachement, toute la cour en avait été témoin. Tout le monde aurait pu s'élever contre eux, Maxius le premier. Pourtant, il n'avait rien fait, obéissant aveuglément à son clan. Il lui avait assuré qu'il l'aiderait pour résoudre les mystères autour de la mort de sa mère. Il lui avait menti alors qu'elle s'était ouverte à lui.

Par Phésas. Elle l'avait touché et même désiré. Parce qu'elle croyait qu'il la comprenait.

Saphora se trouvait bête d'avoir pu penser cela et d'agir de façon spontanée en présence de Volkov. Cela ne se reproduirait plus jamais. Elle évitait avec soin les repas de famille. Clematys n'avait pas fait mieux, elle avait quitté le château pour retourner à Rörk et Saphora n'avait même pas pu discuter avec elle alors qu'elle l'avait entendue pleurer à travers la porte de sa chambre.

La jeune vampire se sentait révoltée en permanence. Son comportement exemplaire ne lui avait servi à rien jusqu'ici. Elle avait toujours tout fait pour contenter son père, la cour de nacre et ses sujets. En retour, on parlait derrière son dos, on la méprisait et la prenait pour une imbécile. Pire encore, elle avait eu le cœur abîmé par un homme qu'elle ne connaissait même pas il y a deux mois de cela. Elle ne voulait plus faire semblant d'être une dame de la cour. L'influence de son père sur son humeur ne fonctionnait plus du tout sur elle. Le seul secret qu'elle devait conserver demeurait ses escapades pour tenter de comprendre ce qui se passait réellement dans la région. Le reste importait peu. On pourrait bien l'enfermer, elle s'enfuirait si nécessaire.

Alors qu'elle attrapait sa besace et descendit par la fenêtre de sa chambre à l'aube, elle tomba nez à nez avec ce maudit Volkov. Elle lui jeta un regard hostile avant de continuer son chemin.

Saphora, attendez !

Elle souffla d'exaspération et se tourna vers Maxius pour qu'il cesse de lui courir après.

— C'est dame Del Wyn, seigneur Volkov. Rien de plus, rien de moins. Que voulez-vous ?

Vous n'êtes pas venue dîner, se contenta d'observer Maxius.

— Et alors ?

Je pensais que vous étiez souffrante.

— Je vais parfaitement bien, merci. Allez vous coucher.

Sa... Dame Del Wyn, se reprit le vampire. Laissez-moi-vous accompagner.

— Pour quoi faire, au juste ? Nous n'avons plus à passer autant de temps ensemble, je vous le rappelle. Vous êtes fiancés maintenant.

Je vous avais dit...

— Vous m'avez dit plein de choses et j'ai bien compris que vous ne tiendrez pas votre parole. Vous voilà libéré de vos obligations envers moi. Satisfait ?

De nacre et d'acierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant