Chapitre 15 : Saphora

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Finalement, échanger avec quelqu'un d'autre qu'Impera procurait à Saphora un certain réconfort. Les jours après l'altercation avec le comte furent moins pénibles, surtout après son échange avec le seigneur Volkov. Malgré son apparence distante, il était calme et à l'écoute, leur relation évoluant vers une sympathie mutuelle et respectueuse. Avec lui, elle ne sentait ni jugée, ni menacée. Le pragmatisme du vampire l'aidait beaucoup à faire le tri dans ses pensées tourmentées. Contrairement à elle, il ne perdait pas son temps pour les faux-semblants, peu habitué à côtoyer les salles de jeux, les boutiques de luxe et les soirées mondaines. C'était plutôt rafraîchissant, ils offraient aux sœurs Del Wyn sur ce monde qu'elles ne connaissaient pas.

De fil en aiguille, Saphora s'intéressa un peu plus aux jumeaux et n'hésitait plus à leur poser plus de questions sur leurs coutumes, leurs traditions, fascinée par leur double culture. Ils prétendaient être attachés autant à l'une qu'à l'autre, même si leurs attitudes, jusqu'à leur garde-robe faisait supposer à la jeune vampire que leur terre de cœur était bien Pormorh. Elle ne connaissait la ville que de nom et pouvait la situer au sud de la région de Domov, loin de Rörk. D'après les descriptions fournies par Clematys, Saphora parvint à imaginer facilement ce village pittoresque de pêcheurs et de marchands, à l'écart des intrigues des grandes Cours des vampires.

La veille du retour du seigneur Del Wyn, alors qu'ils jouaient tous les quatre aux cartes dans l'un des salons jouxtant les appartements des sœurs, Impera aborda un autre sujet qui intéressa grandement sa cadette.

— Clem, comment se déroulent vos journées à Rörk ? J'imagine que c'est bien différent de nos simples loisirs à Vseya.

— Oh, eh bien, je seconde souvent mon père lorsqu'il reçoit ses obligés.

— Ses obligés ?

— Ceux avec qui il fait affaire, si vous préférez. Je surveille ses comptes, je lui rappelle ses devoirs, ses rendez-vous importants. Maxius et moi avons aussi été souvent sollicités auprès de la princesse de Funera durant sa régence. La vie à Kiersky est particulière, mais nous nous sommes plutôt bien acclimatés là-bas. Nous sommes des amis de longues dates.

Maxius est-il proche de la princesse de Funera ? se demanda Saphora. Elle doubla la mise et tendit l'oreille, feignant de se concentrer dans son jeu.

— Encore de nouvelles habitudes ! s'exclama Impera. Décidément, vous êtes flexibles.

Clematys réprima un rictus amusé avec son frère. Impera abattit ses cartes et remporta la mise. Saphora tira une grimace : sa sœur adorait détourner l'attention pour mieux gagner. Elle avait baissé sa garde bêtement.

— Vous n'avez pas idée, Impera, expliqua Clematys en repoussant ses jetons vers elle. A Kiersky, nous accompagnions la régente un peu partout en collaborant avec ses deux plus jeunes frères. C'était un privilège d'être à son service. Maintenant que le roi Drimir est sorti de son sommeil, plus rien ne nous obligeait à rester à la cour royale.

— Est-elle aussi belle qu'on le dit ? s'enquit Impera.

— Oui, très. Elle est un peu comme vous. Une beauté peu conventionnelle...à couper le souffle.

Les deux femmes échangèrent un regard qui en disaient long. Maxius s'éclaircit la gorge pour attirer leur attention.

— Voulez-vous jouer ou vous sauter dessus dès maintenant ? râla Saphora.

Elle mélangea hâtivement les cartes pour les distribuer tandis que Clematys pouffa de rire. Maxius fixa avec une mine concentrée les mains de Saphora et lui dit :

De nacre et d'acierWhere stories live. Discover now