Chapitre 8 : Saphora

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— Vous avez l'air étonné, seigneur Volkov ? Je suis une hybride, je vous le rappelle. Même si j'ai besoin de sang régulièrement, je peux me nourrir de certains aliments. Tous n'ont pas un goût de cendre en bouche.

Maxius continua de l'observer, ce qui encouragea la jeune femme à continuer :

— Il y a les oreilles pointues aussi, je les dois à ma mère. Et je dors plus que les autres vampires. A part cela, je suis comme vous : belle et immortelle.

Il ne broncha pas face à son trait d'humour.

Plus froid qu'une tempête de neige en hiver. La nuit va être longue si vous ne dites rien, le seigneur de glace !

Saphora se retint de lui dire le fond de sa pensée et reprit :

— Vous n'êtes pas sensible à l'humour, visiblement. Vous pourriez au moins essayer de me répondre, non ? Bon, allons dans la salle de musique. Là-bas, il y a du papier et des stylos, je vous en donnerai, comme ça vous n'aurez plus d'excuse pour continuer à m'ignorer.

Quel muffle. Agacée par son absence de réaction, Saphora sauta sur ses pieds. Maxius consentit à la suivre dans les couloirs sombres du château Une porte massive s'ouvrit pour révéler un espace orné de boiseries claires et de tapisseries richement ouvragées. La salle respirait l'élégance d'une époque révolue, avec un parquet lustré qui craquait légèrement sous leurs pas. Elle n'avait pas été rénovée comme le reste du château et Saphora s'y sentait bien. Sa professeure l'attendait déjà. C'était une sympathique mortelle ayant travaillé de nombreuses années au Conservatoire de Skadïe d'où étaient issus de nombreux artistes réputés d'Orpyr. Avant d'entamer ses gammes, Saphora dénicha un calepin et un stylo plume qu'elle fourra dans les mains de Maxius. Il le posa négligemment sur la table d'appoint à côté du fauteuil sur lequel il était assis et dégaina le même livre qu'il avait feuilleté avant leur dîner en tête à tête. Saphora tenta d'ignorer sa présence durant les deux heures de leçon, même si ses sourcils froncés à chaque mauvaise note lui fit amèrement regretter sa présence. Elle aurait pu jurer qu'à chaque fois, son visage s'animait d'une grimace imperceptible. A la fin du supplice, sa préceptrice prit poliment congé, tandis que Saphora écrasa rageusement ses doigts contre l'instrument de musique. Si elle avait voulu impressionner le seigneur Volkov, cela aurait été un échec cuisant. Pourquoi devait-il être là alors qu'elle venait juste de commencer à apprivoiser le piano hors de prix qu'elle avait réclamé à son père ?

Finalement, Maxius se leva pour se diriger vers elle, son carnet à la main. La jeune vampire soupira et lui demanda :

— C'était si mauvais que cela ?

Il ouvrit les pages pour y griffonner quelques mots. Puis, il arracha la page et la lui tendit, une mine grave sur ses traits. Saphora fut étonnée d'y découvrir une écriture, presque enfantine et perdit patience lorsqu'elle y lu un simple « oui ». Elle se contint de lui adresser toute une série de nom d'oiseau qui lui iraient comme un gant. Muffle, muffle, muffle ! voulut-elle lui hurler. A la place, elle lui adressa une moue pincée :

— Vous pourriez au moins mentir, se plaignit-elle. Je me suis engagée à jouer un morceau pour les fêtes de fin d'années en assurant à mon père que cet investissement en valait la peine.

Autre page déchirée. Saphora y vit des pattes de mouches. « Pourquoi ? », pouvait-elle lire avec difficulté.

— J'ai fait ... Disons une scène, pour avoir un nouveau piano auprès de mon père. Je lui ai assuré que je serai assidue, cette fois-ci. Je crois que je n'y entends rien en musique, c'est ainsi.

Au vu des sourcils levés de Maxius, il devait sûrement confirmer sa nullité.

— La musique, moi, je la ressens. Je la danse. Mais la jouer ? Je crois que j'ai surestimé mes capacités.

Le vampire pointa les touches et fit un geste pour qu'elle se décale du centre du banc. Saphora s'exclama :

— Oh, je doute que vous puissiez m'apprendre quelque chose en si peu de temps, seigneur, mais faites donc.

Il s'installa à côté d'elle. Puis, il commença à jouer, tirant une douce mélodie à l'instrument qui criait comme un martyr quelques heures auparavant. Saphora le regarda faire, fascinée. Ses doigts parcouraient naturellement les touches en total contraste avec ceux de la jeune vampire, gauches et maladroits. La musique qu'il jouait était lente, poétique. A l'image de Maxius. La jeune femme repoussa aussitôt cette pensée intrusive.

Ce dernier s'arrêta et plongea son regard dans le sien. Tout à coup, il prit la main de Saphora qui eut un mouvement de recul incontrôlable.

— Ne me touchez pas ! glapit-elle en s'éloignant de lui.

Face à son expression étonnée, Saphora se ravisa, presque honteuse de sa réaction disproportionnée.

— Excusez-moi... Vous m'avez surprise, c'est tout. Que vouliez-vous me dire ?

Dans un geste lent, il pointa ses mains à elle puis désigna le piano. Puis, il fit le même geste en se désignant lui-même.

— Oh, un quatre mains ? Vous êtes vraiment ambitieux, seigneur Volkov. Essayons, mais j'espère que vous êtes patient. Et je vous interdis formellement de vous moquer de moi.

Fort heureusement, Maxius ne semblait jamais rire, alors, il ne le fit pas. En revanche, elle pouvait observer sa mâchoire se contracter à chaque fausse note, et elle en commit de nombreuses. De temps en temps, il la fixait avant de prendre doucement ses mains pour les diriger sur le clavier. Cette fois-ci, Saphora le laissa faire. Lorsqu'ils parvinrent à un résultat acceptable, ils cessèrent la leçon au milieu de la nuit. Le temps était finalement passé plus vite jusqu'à l'heure du prochain repas. Saphora prit poliment congé de son invité en prétextant devoir se changer avant de se rendre à la table de son père. Elle se hâta à se rafraîchir, puis descendit de ses appartements où elle croisa Impera et Clematys en grande discussion. A présent, elle ne serait plus seule et coincée avec Maxius de la soirée.

— Ah, tu es là ! s'exclama sa sœur, ravie de la retrouver.

Bien sûr que je suis là. Je suis toujours là de toute façon, voulut-elle dire. A lieu de cela, elle leur adressa un sourire avant de leur demander :

— Votre journée s'est bien passée ?

Les deux femmes se regardèrent d'un œil complice avant de leur relater leur journée dans le quartier nord, un des seuls endroits où les sœurs Del Wyn pouvaient se rendre en présence d'un chaperon. Tout le reste de la ville leur était défendu. Saphora détestait cet endroit, surtout depuis qu'elle avait franchi ses limites pour traquer des Transformés. Vseya était une belle ville, authentique avec tant d'endroits à visiter. Parfois, elle ne comprenait pas pourquoi sa sœur ne se contentait que des murs du château et du quartier de luxe. Enfin, elle en avait déduit que ce qu'on ne connaissait pas ne pouvait pas nous manquer.

Les trois vampires continuèrent de discuter en riant avec insouciance jusqu'à ce qu'elles pénètrent dans la salle à manger. Plusieurs vampires se levèrent pour les accueillir, comme le voulait le protocole. Lorsque Saphora reconnut l'un des nouveaux invités attablé devant elle, les poils de sa nuque se hérissèrent. Elle se figea pendant quelques secondes. Impera fut la première à réagir :

— Comte Basarab ! Vous êtes de retour !

Saphora, quant à elle, réprima un frisson de terreur en contemplant le visage sinistre du plus fidèle conseiller de Kalagas.


De nacre et d'acierOnde histórias criam vida. Descubra agora