Chapitre 46

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PDV de Bakhta Fellah

Avec mon roi, nous venons à nouveau de nous changer. Je portais une gandoura, une robe en velours noire brodée de fils dorés. Je ressemblais à une vraie souveraine de la royauté :

 Je ressemblais à une vraie souveraine de la royauté :

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Le sultan avait tronqué un smoking noir et blanc :

Le sultan avait tronqué un smoking noir et blanc :

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Tous nos invités attendaient pour souper. À la table des mariés, un banquet nous attendait bien tranquillement :

 À la table des mariés, un banquet nous attendait bien tranquillement :

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Il y avait de quoi nourrir tout un régiment. Je meurs de faim. Il y avait différents variétés de plats : en entrée, il y avait les salades composées de tomates, de betteraves, de maïs, d'œufs, de carottes râpées, de jambon de dinde blanche. La chorba frik, avec les vermicelles, restait toujours chaude. Un tajine au poulet et aux olives était la star de ce banquet. En accompagnement, des briques et des bourecks feuilletés au thon, au fromage, à la pomme de terre et aux herbes aromatiques. Il y avait un autre plat savoureux : une souris d'agneau accompagnée de ses quelques frites croustillantes. Ce n'était pas un repas de mariage mais un grand festin.

Nous mangions à notre fin. Avec mon mari, je parlais de tout et de rien. Soudain, le dj vient nous faire une annonce de la part du roi. Il me regardait :

---- Ya cheikha, notre roi a un cadeau pour vous.

---- Un cadeau pour moi ?

Soudain, le roi du raï, Cheb Khaled, s'invitait à ma fête. Ce chanteur vieillisait comme du bon vinlais dans son esprit, il incarnait la jeunesse algérienne. Il commençait à chanter sa chanson. Mais une minute ? Je reconnais aussitôt un des poèmes dont Abdelkader m'a rendu hommage. Je suis émue. C'est la première fois qu'un artiste parle de moi dans une musique. Je n'ai pas l'habitude d'entendre mon prénom.

Abdelkader a demandé à Cheb Khaled de mettre en valeur son poème, qui m'a dédicacé, sous une chanson. Je n'ai rien de spécial, de cela je suis sûre. Je suis une femme commune avec des pensées communes et des rêves pleins la tête. Jamais je n'aurai cru qu'on me rendait un hommage. Dans quelques années, je serai un monument, une légende dans mon pays. Mon nom sera gravé dans tous les esprits des algériens. Cette chanson, pleine d'amour, résonnera dans tous les murs de Wahran.

Je ne sais plus quoi dire de ce moment. Je me laisse bercer par le son du violon, la derbouka et le message de l'artiste. Je regardais mon roi qui me rendit mon sourire. Avec le sultan, nous sommes enfermés dans notre bulle, loin des invités de notre fête. Il n'y a que lui et moi, regards échangés dans ce court instant, nos messages complices et quelques éclats de rire enfouis en nous. Sa silhouette se déplaçait doucement. Mon regard le suivait religieusement. Il n'y a que ses yeux qui m'encapsulent et que j'ai fini par connaître par coeur, à force de chercher ma place dans son royaume. Ce n'est pas une aventure, c'est la plus belle des aventures comme le plus beau des voyages. Je devinais les montagnes des Lions. Avec lui, j'avais l'impression de voir la mer à perte de vue, partout. J'ai la nette sensation d'être avec lui dans son palais avec ses escaliers, qui ne menaient à rien, et ses couloirs secrets. C'est cet homme et son souffle coupé. C'est un voyage qu'on ne pourrait pas prendre en photo ou regarder sur un écran. Aucun image ne me serait infidèle.

C'est une succession de souvenirs qui forme un nuage invincible qui est venu se loger à l'intérieur de nous. Nous avons des témoins qui nous croisent quand nous marchions ensemble, vite ou lentement, rien que tous les deux. Tout cela nous dévisagent, les femmes jalouses ne me laissent rien. Elles ne me font pas de cadeau. Certaines se retournent sur moi ? Qu'est-ce que je fais là, si tard dans la nuit, autour de cette table ? Avec Abdelkader, nous avons des complices comme nos proches cousins, cousines, nos tantes, quelques gentils amis, les gardes qui nous laissent passer, Loubna, le vizir...

Nous avons comme gardienne, Wahran, au gré du jour et de la nuit, qui mue au gré des heures et des quartiers, qui va mourir par un endroit et qui semble tout refermer dans un étau. L'Oran, visible ou invisible, l' Oran magique qui peut se transformer en une fraction de secondes en une belle princesse, du laid au sublime tout comme ses habitants. C'est tout cela que je devrai dire à ma mère c'est que mon histoire n'est pas la plus belle de toutes les contes de fées mais cela reste grandiose. J'imagine les mots de ma mère : "Toutes les jeunes femmes aimeraient être à ta place. Tu as une bonne étoile avec toi".

Mon rêve de plaisir s'éclatait quand l'amour de ma vie, Abdelkader, s'approchait de ma table et me tendit un cadeau. Je l'ouvris et je découvris une cassette audio du nouvel album de Cheb Khaled. Il s'intitule N'ssi N'ssi :

Khaled m'expliquait le concept de son album : les chansons ont été produites à l'étranger, sauf ma musique qui a été faite à Wahran, sous la surveillance du prince des poètes

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Khaled m'expliquait le concept de son album : les chansons ont été produites à l'étranger, sauf ma musique qui a été faite à Wahran, sous la surveillance du prince des poètes. Le but de Cheb Khaled est d'incarner l'espoir à cette jeunesse, par ces nouvelles musiques. Je vais être la première du royaume à écouter ce nouveau bijou.

Parmi tous les nouveaux morceaux de l'artiste, il y avait ma chanson Bakhta. C'est le plus cadeau qu'un homme puisse faire à une femme. J'ai une chanson !!!! C'est incroyable !!!! Ça va être un succès dans les charts.

Abdelkader embrassait tendrement mon front. Tout le monde fit des youyous. C'est un grand honneur de finir la moitié de ma vie avec l'écrivain le plus reconnu de toute l'Algérie : le cheikh Abdelkader El Khaldi, le prince de tous les poètes. Je suis une femme comblée, la plus heureuse de toutes. Nous finissons notre repas. Le Dj remet de la musique. Avec Abdelkader voulait avoir son avis :

---- Qu'est-ce que tu en penses, habiba ?

---- Je n'ai pas les mots. Tu m'as fait le plus beau de tous les cadeaux !!!

---- À la bonheur, dit mon mari, rassuré, avec son sourire en coin.

Contente pour notre couple, ma mère nous alertait qu'il ne fallait pas perdre de temps et passer directement essayages. Nous ne trainions pas. Nous quittions la salle avec le cœur en fête. Ma chanson se gravait à jamais dans mon âme.

Musique du Chapitre 46 : Cheb Khaled - Bakhta (Version live 1994)

Musique du Chapitre 46 : Cheb Khaled - Bakhta (Version live 1994)

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Bakhta ou la muse de Wahran Where stories live. Discover now