Et voilà la suite...
Jake
Je pose un énième carton. Le dernier. Enfin ! Je m'allonge aussitôt dans le canapé. Il fait déjà nuit. Il est vingt-deux heures. On aurait pu ramener les derniers cartons demain en plein jour mais autant tout faire d'un coup.
Bien que Hayley n'ait pas beaucoup d'affaires, le déménagement a été plutôt long. Il a pris toute une journée mais à deux, on a l'impression que ça prend beaucoup de temps, une éternité même. Mitch et Chelsea aurait dû nous aider mais ils sont partis en week-end. Ils souhaitaient le décaler mais Hayley et moi n'avons pas voulu. On n'allait quand même pas leur gâcher un week-end romantique.
- Fatigué ?
Hayley apparaît dans mon champ de vision avec un grand verre d'eau à la main. Depuis le temps que je rêvais de boire.
- Merci. Et non, je ne suis pas fatigué.
Elle ricane.
- Si tu l'es.
Il faut avouer qu'allonger comme ça, je ne peux pas vraiment lui faire croire le contraire.
- Oui, tu as raison.
Je lui souris. Cette femme me connaît tellement bien.
Tout à coup, une idée me vient.
- Pourquoi on irait pas voir ta famille dans la semaine ?
Je la vois aussitôt se décomposer. Plus aucune expression ne passe sur son visage. Mais malgré le fait que je n'aime pas la voir comme ça, je suis bien décidé à rentrer dans le sujet. Je sais pertinemment que si je ne prends pas les devants, elle ne le fera jamais.
- Non, je ne suis pas encore prête.
Mauvaise excuse.
- Et tu ne le seras jamais. Tu as bien trop peur pour ça.
Je vois son visage reprendre vie immédiatement mais hélas pour moi, son expression montre plus de colère qu'autre chose et à vrai dire, ça ne m'étonne pas.
- Non, c'est faux. Je n'ai pas peur.
Je sais qu'elle essaye de se convaincre elle-même et de me convaincre par la même occasion, mais ça ne marche pas avec moi.
- Si tu as peur. Peur de la réaction que va avoir ton père. Tu sais bien qu'il va mal réagir.
Elle est à deux doigts de me frapper. Je sais qu'elle n'aime pas entendre quelqu'un critiquer son père. Pour elle, c'est un héros. C'est vrai qu'il a eu, tout comme ma mère, le courage d'élever deux enfants sans l'aide de personne. Il a du supporter le fait que la femme qu'il aime, meurt en mettant l'un de ses enfants au monde. Mais, il a parfaitement réussi à éduquer ses enfants et je dois le remercier car grâce à lui, Hayley est ce qu'elle est et même si quelquefois, comme maintenant, elle m'énerve, je l'aime.
- Ne parle pas de lui comme ça ! Tu ne le connais pas !
- La faute à qui !
- Tais-toi !
Je ne l'ai jamais vu aussi en colère. J'essaye d'être plus calme.
- Tout serait vraiment plus simple pour tout le monde si on allait lui dire tranquillement que nous avons une relation tous les deux.
- Mais lorsqu'il va l'apprendre, il sera déçu. Il ne veut pas que je suis avec un homme. Durant des années, il m'a dit à quel point les hommes détruisent les femmes. Ils leur prennent leur innocence, leur indépendance, leur cœur et leur liberté avant de s'enfuir. Mon père m'a toujours dit ça et je dois avoué que beaucoup d'hommes répondent à ce portrait. Tu n'es pas comme ça mais jamais mon père n'aura le temps de le découvrir car dés la première fois où il va te voir, il va te détester.
Son père a beau avoir l'air d'être un homme respectable et aimant avec ses enfants, il m'a l'air aussi peu ouvert d'esprit et relativement, strict. Il dit détester les hommes alors qu'il en est un. Ce n'est pas logique. Il veut protéger sa fille de la souffrance et je le comprends mais cette histoire est quand même assez étrange.
- Et bien, laisse-moi te dire que ces propos sont relativement cons et que ton père doit être stupide pour vraiment les penser.
Elle me met aussitôt une gifle. Elle n'y va pas de mains mortes. Ça fait un mal de chien.
- Aie ! Mais tu es malade !
Elle me hurle dessus comme jamais auparavant.
- Je t'interdis de critiquer mon père. C'est un homme incroyable. Il a su nous éduquer avec mon frère en nous apportant le confort matériel et surtout, de l'affection. Il ne s'est jamais plaint de ne plus nous supporter ou de devoir faire des heures supplémentaires car avec un seul salaire, il est difficile de payer à manger, un appartement, une maison, des études et tout ce genre de chose. Beaucoup d'hommes auraient détester leur enfant si la naissance de ce dernier signifiait la mort de la femme qu'ils aiment mais lui, il n'a jamais ressenti une quelconque haine envers Alex. Non, il l'a toujours aimé autant que moi. Il a une force incroyable. Je ne sais pas ce que je serais devenue sans lui.
Je mesure dans ses propos tout l'amour qu'elle porte à son père. Ce qui la relie à lui est tellement fort. Jamais je ne serrai ce que ça fait d'avoir un père. Pour moi, je n'en ai jamais eu. Un homme qui abandonne sa famille, ne peut pas être considéré comme un homme et un père digne de ce nom.
- Oui, tu as raison, ton père a eu beaucoup de courage.
Je la vois se détendre un peu.
- Mais tout ce qu'il a beau dire sur les hommes, ne doit pas t'empêcher d'être heureuse. Si ton père n'est pas content pour nous, tant pis. De toute manière, s'il t'aime, il le prendra peut-être mal au début mais tu verras que très vite, il l'acceptera.
Du moins, je l'espère.
- Oui mais je ne veux pas prendre ce risque. Perdre l'amour de mon père, c'est aussi grave pour moi que perdre ton amour.
- Mais tu ne perdras jamais mon amour. Tout comme tu ne perdras jamais l'amour que te portes ton père.
Elle me regarde de manière à vérifier que je pense ce que je dis.
- Oui mais je reste persuadée qu'il ne va pas accepter notre relation.
- Dans ce cas-là, nous ferons tout pour qu'il comprenne que nous deux c'est vraiment du sérieux et que j'essaye, par tous les moyens, de te rendre heureuse. Mon but n'est pas de te détruire et de te faire souffrir. Bien au contraire. On ne va quand même pas se cacher indéfiniment. Tout le monde sera au courant, sauf lui. Imagine deux secondes si on se mariait. Il l'apprendrait en recevant un faire-part. C'est si on ne lui dit pas rapidement que tout va se compliquer. On n'a pas quinze ans et tu ne vas pas jouer la célibataire auprès de ton père jusqu'à la fin de ta vie.
Elle me fixe longuement avant de dire :
- Je ne reste pas convaincue.
Sa phrase m'énerve. J'ai beau lui sortir cent mille arguments, madame est têtue et ne crois pas un mot de ce que je lui dis. Qu'elle ait peur est une chose, mais le fait qu'elle n'ait pas confiance en mes propos en est une autre. C'est d'ailleurs ça qui m'exaspère.
Je hurle.
- Tu sais quoi ? Tu me saoules ! Je vais dormir dans une des chambres d'amis. Si tu as besoin de me parler, tu sais où je suis.
Je sors aussitôt de la pièce. Elle n'essaye pas de me retenir.
Je me dirige vers ce qui est maintenant notre chambre à tous les deux. Je prends mon pyjama et me dirige vers la chambre d'amis la plus proche du salon.
La pièce est blanche et plutôt lumineuse. Au centre, il y a un lit-double qui est arboré d'une couette blanche elle-aussi. Cette pièce est impersonnelle et pas très gaie mais personne n'y dort. C'est une chambre d'ami mais vu qu'à part, Mitch et Chelsea, je ne traîne pas avec beaucoup de monde, je n'ai pas besoin de la décorer pour qu'elle plaise aux gens.
Je change de vêtements rapidement, m'installe sous la grosse couette et essaye de m'endormir bien que je sais que je n'y arriverai pas sans Hayley à mes côtés.
N'empêche, je n'y peux rien moi si elle ne veut pas le dire à son père. Elle a peur de le décevoir mais son père n'est pas con : il sait très bien qu'un jour ou l'autre sa fille allait trouver le bonheur avec un homme. Il ne pensait quand même pas qu'elle allait finir vieille fille. C'est impossible vu la beauté qu'elle dégage et toutes les qualités qu'elle a. Bien évidemment, elle a des défauts qui sont plus ou moins difficiles à supporter. Tout dépend des circonstances. En ce moment, par exemple, elle m'exaspère car elle n'ose pas affronter son père. Je veux pouvoir me montrer au monde entier à ses côtés et je veux que son père me juge digne d'elle. Je ne suis pas sûre de mériter une femme aussi exceptionnelle qu'elle mais je veux qu'il puisse constater que je ferai tout pour rendre sa fille heureuse.
En tout cas, je ne suis bien décidé à faire la gueule jusqu'à ce que Hayley comprenne enfin que j'ai raison et qu'à ma place, elle serait toute aussi exaspérée. Il est temps qu'elle comprenne mon point de vue. Pour une fois, c'est moi qui vais faire mon têtu et ça aura beau prendre le temps qu'il faut, je ne me rabaisserai pas et j'attendrai qu'elle ravale sa fierté. C'est à elle de faire le premier pas, pas moi. Si elle a envie de se comporter comme une adolescente et bien, je me comporterai, moi aussi, comme tel.
Décidément, je me souviendrai à tout jamais de nos premiers instants dans notre appartement.
Environ une demi-heure plus tard, je suis encore en train d'essayer de m'endormir, quand j'entends la porte de la chambre s'ouvrir. Je ne me retourne pas car je sais que c'est Hayley et je n'ouvre pas non plus les yeux pour vérifier car de toute manière, il fait bien trop noir pour voir quoi que ce soit. Elle doit très certainement penser que je dors car je la sens soulever les couvertures pour s'y glisser en-dessous. Elle se plaque contre mon dos, aligne ses jambes avec les miennes et place ses bras autour de mon torse. Je peux parfaitement sentir qu'elle ne porte qu'un tee-shirt et probablement, une culotte, mais qu'elle ne porte ni bas ni soutien-gorge, comme à son habitude. Ses seins plaquées contre mon dos font monter en moi le désir. Je sens aussitôt ma sexe bander. Merde ! Il faut que je résiste.
- Je suis désolée.
Elle parle d'une voix très douce.
- Je sais que tu dors et que c'est complètement con de parler à quelqu'un qui dort, mais je veux que tu saches que je suis désolée. Tu as parfaitement raison, il faut le dire à mon père. Je ne vais pas lui cacher indéfiniment que je vis avec l'homme que j'aime.
Mon cœur manque un battement à la fin de ses paroles.
Elle m'a enfin compris et je suis, d'ailleurs, content qu'elle ait fait le premier pas car j'ai vraiment horreur de me disputer avec elle. Ce n'est pas notre première dispute et ce ne sera certainement pas notre dernière.
- Je ne dors pas.
Je la sens se tendre contre moi.
- Ah.
Je me retourne pour lui faire face bien que je ne la vois pas.
- Alors tu as tout entendu ?
Je peux sentir son incertitude dans sa voix.
- Oui.
- Tu veux bien me pardonner alors ?
Je sens, cette fois-ci, de l'espoir dans le ton qu'elle emploie.
- Bien sûr que oui.
- Tant mieux. Si tu veux, on peut y aller dans la semaine.
Ça me fait vraiment plaisir d'entendre ça.
- D'accord.
Je tends mes bras et la serre contre ma poitrine. Je sais qu'elle a fait beaucoup d'efforts.
- Merci de me comprendre.
Elle ricane.
- Merci à toi d'être patient et de me supporter.
- Toi aussi, tu dois me supporter et ça, c'est dur.
Elle émet, encore une fois, un petit rire.
- Pas faux.
Je ne peux m'empêcher de sourire face à ce qu'elle vient de me dire.
Elle se serre encore plus contre moi et avant que je ne puisse le comprendre, elle prend ma main et la dirige sous les couvertures. A peine deux secondes plus tard, ma main arrive sur son sexe. Alors durant toutes ses dernières minutes, elle ne portait pas de culotte ?
- J'ai envie de toi.
Moi aussi, chérie. Tu ne peux pas savoir à quel point. Depuis qu'elle est contre moi, mon corps la réclame et veut que je me perde en elle. Elle m'offre ce que je souhaite sur un plateau. Je ne vais pas refuser quand même.
Je me penche vers elle et l'embrasse tout en appuyant ma main sur son sexe. Après tout, c'est notre première nuit dans « notre » appartement alors je suis bien décidé à inaugurer le plus possible ses espaces, à commencer par ce lit où nous allons vivre, j'en suis persuadé, de divins moments.
J'attends vos réactions... A dimanche prochain