Chapitre 20

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Point de vue de Maya :

J'ai froid. C'est tout ce que je sais. J'ai l'impression de me réveiller d'un long, très long sommeil. Je ne sens pas mon corps, mes paupières sont lourdes. J'essaie tant bien que mal de les ouvrir, mais rien n'y fait. Et puis où suis-je ? Pourquoi fait-il si noir ? Pourquoi est-ce que je me sens si détachée du monde et de mon corps ? Est-ce que je suis morte ?

Beaucoup de questions se bousculent dans ma tête. Beaucoup de questions dont j'attends impatiemment la réponse. Je commence à paniquer, je crois que mon pouls s'accélère, j'espère. Je n'en suis pas à ma première crise de panique, mais celle-ci est différente. Je suffoque, je n'arrive pas à respirer, je me sens prisonnière de mon propre corps. Je suis incapable de bouger ou simplement d'ouvrir les yeux. Mais pourquoi ?

Bon, Maya, respire un grand coup et calme-toi. On va trouver une solution. Concentre-toi. Maman m'a toujours dit de me concentrer sur mon environnement et mes sens lors d'un moment de panique. Les mamans ont toujours raison non ?

Allez Maya, c'est parti, on essaye. Concentre-toi Maya. Premier sens : l'ouïe. Qu'est-ce que tu entends Maya ? Un bruit. "Bip bip bip". Je le reconnais. Une machine. On dirait... Mais attends, je suis dans un hôpital ? Maya, on arrête les questions. Reconcentre-toi. Le toucher. Ma tête est dans quelque chose de moelleux. Sûrement un oreiller. Et je sens mes doigts toucher quelque chose de doux. Des draps. Je suis allongée, dans un lit d'hôpital. Belle déduction Sherlock. Tiens, Alex aurait dit ça. Alex... Pourquoi est-ce que je sens son parfum ?

Bon, par contre pour ce qui est de la vue et du goût, toujours rien.

Je n'aurais jamais cru que j'aurais autant de mal à me réveiller franchement. Je n'aurais peut-être pas dû faire autant de grass' mat'. Ma mère avait encore raison.

Je tente une seconde fois d'ouvrir mes paupières, si lourdes soient-elles. Je n'aime pas le noir, ça me fait peur. Je suis encore une enfant qui dort avec un doudou et qui a peur du noir. Je veux me réveiller ! Ouvre tes paupières Maya ! Allez !

Un jet de lumière blanche envahit mes yeux. Ça me brûle. Je n'aurais peut-être pas dû les ouvrir si vite. Mais au moins, ils sont ouverts ! Victoire ! Bon, par contre la vue sur le plafond, c'est pas super. Mais je n'arrive pas encore à bouger donc je vais devoir m'en contenter.

La machine s'affole et ses "bip bip" se font de plus en plus forts. Je crois que c'est le signal. Une infirmière rentre dans la pièce, ses yeux fixés sur moi. Je la vois tourner le regard dans un coin de la pièce avant de s'approcher de mon lit.

—    Bonjour Maya. Je m'appelle Isabelle et je suis infirmière ici. Je vais m'occuper de toi d'accord ? Je sais que ça peut faire peur, mais ne t'inquiète pas, tu es en sécurité. Si tu es ici, c'est parce que tu as eu un accident il y a deux semaines. Tu n'as rien eu de très grave, mais le médecin a préféré te placer en coma artificiel. Ne t'inquiète pas, tu vas bien, encore plus maintenant que tu es réveillée. Cependant, le coma artificiel a quand-même affecté ton corps, comme tu as pu le sentir. C'est pourquoi, tu ne peux pas parler ni bouger tout de suite, il faudra attendre quelques heures et quelques soins. Il y a d'autres séquelles comme ta mémoire qui a été affectée. Repose-toi encore un peu d'ici là, et appuie sur ce bouton si tu as besoin de moi. Je reviens bientôt.

L'infirmière me montre le bouton puis s'en va. Bon, les choses sont claires : j'ai eu un accident et j'étais dans un coma artificiel. Je me disais bien que mes paupières n'étaient pas si lourdes d'habitude. En parlant d'elles, je les sens céder à la gravité. Et comme si je n'avais pas assez dormi pendant deux semaines, je repars au pays des rêves.

Cette fois-ci, c'est sans difficulté que j'ouvre mes paupières. Ouf, un stress en moins ! J'appuie sur le bouton pour appeler ma nouvelle infirmière. J'avouerai en avoir marre de ne pas pouvoir bouger ou parler. Donc plus vite c'est fait, mieux c'est. Pas de temps à perdre !

Et puis j'aimerais surtout comprendre pourquoi est-ce que j'ai senti l'odeur d'Alex quand j'ai pensé à elle. Est-ce que mon cerveau me joue des tours ?

L'infirmière arrive rapidement, puis se prépare pour mes soins. De ce que j'ai compris, il faut juste rééduquer un peu mon corps, et plus particulièrement mes muscles et articulations qui n'ont rien foutu depuis deux semaines. Les feignasses ! La séance commence alors.

—    Avant de rentrer dans le vif du sujet, cela ne vous dérange pas que la petite marmotte reste dans la pièce pendant vos soins ? demande l'infirmière.

"La petite marmotte" ? Mais de qui parle-t-elle enfin ? Mais attends, tu crois que ... ?

—    Alex ?

—    Oui, c'est son prénom. Je vois que vous retrouvez déjà la parole. C'est bien, continuez vos efforts ! Enfin bref, la petite marmotte a passé ces deux dernières semaines sur le fauteuil, elle est vraiment trop mignonne, surtout quand elle dort. Elle a vraiment l'air de tenir à vous. Et puis vous savez, elle a pas mal fait le clown dans votre chambre. C'était à la fois drôle et mignon. Soit elle dormait, soit elle faisait des petites vidéos, notamment quand vos copains venaient tous vous voir. Vous êtes populaire dites-moi ! Elle a tout préparé pour votre réveil, si vous voulez, elle a laissé son ordinateur sur la table à côté de vous pour que vous puissiez regarder les vidéos. Ça vous occupera, d'ici là qu'elle se réveille. Non parce que c'est vraiment une marmotte votre copine !

Je lui fais signe "oui" de la tête, pour tout ce qu'elle vient de dire, mais surtout pour les vidéos. Qu'est-ce que tu m'as encore préparé Alex ?

L'infirmière prépare l'ordinateur et le place devant moi, puis elle lance les vidéos.

"Coucou Maya, bon, bah, bienvenue dans ton premier jour de coma ! C'est pas vraiment l'éclat' ici. J'espère que c'est mieux de ton côté. Mathis est avec moi, on s'inquiète beaucoup pour toi. Il faut quand-même que tu saches que ça a été le parcours du combattant pour moi de venir ici, mais bon, je n'allais pas te laisser seule. Puis je suis sûre que je t'aurais trop manqué et vu que je suis la personne la plus gentille de cette planète je suis venue te sauver ! Bon je dois te laisser, je crois que Mathis a cassé le fauteuil, qu'est-ce que tu veux, il a des grosses fesses. Réveille-toi vite mademoiselle."

Les vidéos s'enchaînent, toutes plus mignonnes les unes que les autres. Bon, peut-être pas celle où ils m'ont dessiné une moustache sur la figure. Mais la réaction des infirmières était drôle à voir, surtout quand les copains se sont fait taper dessus. Toutes les vidéos sont différentes. Certaines sont plus tristes que d'autres. Mais cela me fait tellement plaisir de voir tous mes amis réunis, même s'ils ont fait beaucoup de bêtises.

Les vidéos continuent de tourner, jusqu'à ce qu'il n'en reste plus qu'une.

"Coucou Maya. Je t'avoue qu'aujourd'hui je n'ai pas trop le moral. Je commence sérieusement à avoir mal au dos à cause du fauteuil. Franchement, t'aurais pu faire un effort pour que je vienne dans le lit avec toi. Pour couronner le tout, il pleut. Pas une petite pisse, non non, la tempête. Ça donne un petit côté apocalyptique. Ce qui me fait mal, c'est que je sais que t'aurais adoré courir sous la pluie prétextant que ça rend le moment plus intense. Mais le truc, c'est que tu n'es pas encore revenue parmi nous. Il faut que tu continues de te battre parce que je sais que tu en es capable. Et je te promets que si tu te réveilles tu pourras me voler tous mes fruits jusqu'à la fin de ma vie. Tu t'es fait assez attendre, il est temps de se réveiller Maya."

Cette dernière vidéo me met les larmes aux yeux. Elle est si mignonne. Je tente de me relever pour la voir sur son fauteuil. L'infirmière, ayant vite compris ce que j'essayais de faire, vient m'apporter son aide. À nous deux, on a réussi ! Je peux maintenant admirer quelque chose de légèrement plus beau que le plafond : Alex.

Sentant sûrement mon regard peser sur elle, ma petite marmotte daigne enfin se réveiller. Elle sursaute en me voyant réveillée puis court, renversant presque son nouveau copain le fauteuil, pour venir près de moi. Elle s'empresse de me toucher, puis se pince, sûrement pour être certaine qu'elle ne rêve pas.

—    Alors ça y est, la princesse s'est enfin réveillée ?

IdioteWhere stories live. Discover now