— Je résisterai au Sénat. Je n'ai pas besoin de vous, peu importe qui vous êtes.

— Mais l'Artivers a besoin de nous. La Terre a besoin de nous. Les deux dimensions se meurent, et sombreront dans le chaos, si nous laissons les choses se faire sans agir. Nous devons établir un ordre nouveau. N'est-ce pas votre but, à vous aussi ?

— Je le répète, je n'ai pas besoin de vous. Par conséquent, je ne vous donnerai pas le masque mimétique.

— Dans ce cas, nous n'avons pas le choix », conclut le troisième Artiste.

Il sortit de sa poche un pistolet, au réalisme dangereux. Les adolescents sentirent qu'il ne s'agissait pas d'une œuvre d'art, et ils commencèrent à craindre pour leurs vies.

« Nous allons devoir l'arracher à votre cadavre. »

Dès le premier tir, une détonation à rendre sourd n'importe qui, le créateur se jeta au sol. Il posa le masque sur son visage. Aussitôt, un nuage de fumée s'en dégagea, se répandit dans l'atelier, et les novices ne virent plus rien au-delà d'un mètre. Ils ne pouvaient rien entendre non plus : ils n'avaient aucune idée de ce qu'il se passait autour d'eux. Lorsqu'ils eurent compris que rester immobiles, confus et angoissés ne servirait à rien, ils ouvrirent leurs sacs et en sortirent leur matériel artistique. Ils préféraient périr au combat, plutôt qu'être assassinés sans se défendre.

Peu à peu, le brouillard s'estompa : il révéla six copies du créateur, chacune aux prises avec un ennemi. Impossible de différentier l'être humain et la création du masque mimétique... à moins que chacune d'entre elles ne recèle une partie de son esprit ? Dans tous les cas, elles utilisaient des œuvres que les novices n'avaient jamais vues. Quand l'une sculptait des projectiles dans un bloc d'argile, pour les jeter à l'hybride, une deuxième affrontait un géant à l'aide d'une épée de fer forgé. Mais si elles paraissaient puissantes, les jeunes Artistes ignoraient si elles fonctionnaient indépendamment. Si l'une d'entre elles tombait, qu'adviendrait-il des autres ? Ils ne pouvaient se permettre d'en laisser mourir une pour le savoir.

Alors ils se lancèrent dans la bataille à leur tour. Valentin se mit à griffonner la silhouette d'un Artiste sur son carnet à dessin. Il devait être aussi fidèle à la réalité que possible, alors il tournait autour son adversaire désigné, pour retransmettre chaque détail. Quand il pensa que son croquis suffisait pour comprendre qui il représentait, il brandit son surligneur orange, le même qui avait incendié son lycée, quelques jours plus tôt, et tira de grands traits sur la feuille. Cette fois-ci, grâce à la panique et à l'expérience, ses gestes gagnaient en ampleur et en vivacité. Il varia les couleurs à l'aide de feutres, afin de rendre son dessin plus réaliste. De petites étincelles naquirent sur les bras de l'ennemi : le dessinateur sourit et continua. Son manteau entier sombra sous les flammes, des flammes suffisamment crédibles pour l'inquiéter. Son visage si assuré se figea, et il céda du terrain au créateur, qui le poussa au sol, et l'emprisonna sous une statue de pierre. Un de moins, pour le moment.

Valentin était très fier de sa prouesse, jusqu'à ce qu'il se retourne.

 Un géant lui fonçait dessus, la hache prête à le trancher en deux. Il se jeta sur le côté, et si la lame frôla son pull, le reste de son corps y échappa. Malgré cela, il eut besoin de quelques instants avant de comprendre ce qu'il s'était passé.

« Il... il manque une copie ! cria-t-il en direction d'un avatar du créateur, qui se battait à quelques mètres de lui.

— Je... je n'étais pas prêt, répondit l'homme. Je manque d'énergie, mes copies sont faibles. Vous devez fuir, pour votre vie !

— On peut pas vous laisser seul ici ! » intervint Anouk.

Ses doigts survolaient son ordinateur, et elle priait pour que Photoshop charge plus vite.

Artistes 1 - Le masque mimétiqueWhere stories live. Discover now