Chapitre VIII

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Les plaines Asgardiennes s'offrent à moi une fois encore. Un léger vent vient s'engouffrer dans ma chevelure châtain alors que mon étalon blanc galope vers les montagnes. A l'horizon une forêt dressent tout haut ses feuilles vertes. Je ne peux m'empêcher de sourire alors que je sens une profonde joie envahir tout mon être. Le bruit des sabots frappant la terre me laisse imaginer que les soldats et moi allons nous envoler vers les cieux, mais nous sommes entrain de parcourir ces terres pour nous entraîner. Alors même si cet air frais me donner le goût de la liberté je sais que nous devons donner le meilleur de nous mêmes comme à chaque fois.
Arrivés à la frontière entre la plaine et la forêt je lève mon bras et abaisse mes doigts pour leur ordonner de s'arrêter. Je fais un tour complet avec mon cheval et l'immobilise. Mes hommes se tiennent droits sur leur montures attendant mes ordres. Alors que j'allais ouvrir la bouche je vois l'étalon noir de mon second venir se poster à mes cotés, place qui lui revient forcément mais qui a tendance à m'agacer. Je crispe les lèvres avant de reposer mon regard sur les soldats pour leur faire part des exercices qui suivront.
« [...] Préparez vos lances!
Dans un geste commun, ils ajustèrent leurs armes, pointes vers l'avant, et à mon signale ils commencent à s'exercer au corps à corps.
Toujours assise sur la selle, je me déplace de droite à gauche pour analyser les techniques utilisées. Mais mon regard est souvent attiré par Loki. Celui-ci n'a pas bougé de sa place, il tient fermement les rênes de sa monture et fixe de ses yeux verts l'herbe légèrement jaunie. Pourquoi ne fait-il pas son métier, pourquoi n'est-il pas entrain de lancer des répliques vexantes aux soldats, pourquoi n'essaye-t-il pas de reprendre sa place?
À présent je ne peux détacher mes prunelles de l'expression triste de son visage. Quelle pensée funeste à bien pu faire fondre ce sourire machiavélique? Et depuis quand est ce que ses pensées m'intéressent ! Je détourne vivement le regard pour me concentrer sur deux soldats en plein affrontement. Heureusement que l'armure protège leur torse, car je sursaute en entendant le son métallique d'une lance heurter la cuirasse. Les soldats me dévisagent quelques secondes, je me détourne et vient me placer à droite de mon second. Celui-ci reste dans son mutisme, toujours obnubilé par des pensées inconnues.
« Je me demande... (je m'arrête quelques secondes sentant les prunelles émeraudes de Loki se poser sur moi. Je me racle la gorge avant de poursuivre)... je me demande ce qui peut vous plonger dans ce silence.
Je tente de lui adresser un sourire sympathique mais je comprends vite que mes paroles ne lui font rien.
« ...je veux dire vous n'êtes pas aussi silencieux d'habitude. »
Je tente de sourire une fois de plus mais son visage curieux se transforme en une expression moqueuse:
— Ce n'est pas le lieu ni l'heure pour une discussion sentimentale.
Je ne m'attendais pas à une telle réplique alors que mes intentions étaient simplement gentilles. Je ne trouve aucune réponses à cet remarque désagréable... je cligne plusieurs fois des yeux avant de relever la tête vers lui. Je lui lance un regard qui me semble méprisant et retourne vers les cavaliers.
        L'après-midi s'écoule assez rapidement étant donné que le programme d'entraînement est chargé.                Quand le soleil s'apprête à se coucher, je fais signe aux soldats de reformer les rangs pour partir. Je me place devant eux et commence à galoper, mon second à mes côtés. Nos deux étalons fauchent l'herbe sous leurs sabots alors que la vitesse les gagnent. Je suis cramponnée aux rênes et demande plus de rapidité. Loki est penché en avant, et se dresse légèrement sur sa monture. Je le regarde du coin de l'œil et à mon tour, lève mon postérieure et donne un coup vif à mon cheval qui s'élance la tête en avant pour augmenter son allure. Un sourire triomphant se dessine sur mon visage alors que je vois peu à peu l'étalon noir et son cavalier disparaître de mon champ de vision. Mais la joie est de courte durée, il revient à la charge, plus ardent que jamais. La crinière brune du pur-sang vole au vent, et Loki est désormais debout sur ses étriers, le dos courbé en avant, avec cet éternel sourire sarcastique. Je tire sur les rênes pour ordonner à mon cheval de ralentir. Mon allure est maintenant redevenue la même que celle des cavaliers derrière moi, et je ne peux m'empêcher de fixer Loki galopant toujours plus vite. Il a tenté de m'humilier et c'est réussi, mais il ne perd rien pour attendre.
      Arrivés au château, je laisse mon cheval aux mains d'un des palefreniers, puis ordonne aux soldats de s'occuper de leur montures. La victoire de Loki m'a laissé un goût amer dans la bouche. Je suis donc énervée, et cela se fait sentir dans ma voix. Je congédie le plus rapidement possible les cavaliers pour me rendre à mes appartements. Je suis attendue à dîner avec le roi et sa tablée, je ne veux pas être en retard.
J'avance toujours furieuse dans les couloirs du palais. Les quelques gardes que je croise me salut mais je ne réponds pas, trop absorbé par ma colère envers Loki. D'ailleurs pourquoi suis-je autant énervée contre lui? Après tout il a juste gagné une course. Le fait de savoir que je suis en position de faiblesse par rapport à lui peut être...
Une fois dans ma chambre je balance mon uniforme sur le lit et cherche une robe qui conviendrait à cette soirée. Je me balade en sous vêtements dans toute la pièce essayant d'attraper chaussures et tenue adéquates. Je sursaute en entendant quelqu'un frapper à la porte. Mes mains viennent automatiquement cacher ma nudité.
« ...j'arrive!...(j'attrape une robe de chambre en soi de couleur prune et vient noué les deux rubans plus clair autour de ma taille)... voilà ! J'arrive! »
Je marche vers la porte avec mes pieds nus, et l'ouvre tout en essayant de cacher ma tenue. Mes yeux s'élargissent en voyant de qui il s'agit: Loki, toujours dans son uniforme noir de second se tient devant moi. Son visage est crispé, comme si quelque chose le tiraillait.
« Que puis-je faire pour vous? » J'essaye de lui faire comprendre par mon ton qu'il n'est pas le bienvenue.
Loki me regarde quelques secondes d'une étrange façon, puis son expression se change en cet air moqueur et méprisant:
— Excusez-moi de faire irruption dans vos appartements, mais je crois que vous avez oublié vos hommes, aucun ordre n'a été donné.
     Mes yeux lancent des éclairs, je n'ai qu'une envie c'est de lui en coller une. Je secoue légèrement la tête de droite à gauche plongeant mon regard dans celui de Loki.
— Je vois, vous n'êtes pas en mesure de commander une armée.
Il se dresse de toute sa hauteur. Je n'avais jamais remarqué à quel point il était grand et majestueux, et le voir me dominer ainsi me fais frissonner. Son visage passe du mépris à la colère, il fait un pas vers moi, je recule, il continue d'avancer se retrouvant dans le petit hall donnant accès au salon, je recule encore et heurte le mur. Il s'arrête à quelques centimètres de moi, se penche lentement:
— Vous m'avez enlevé ce qui me revient de droit ! Ce que je possédais déjà !
Je tremble à présent devant sa fureur. Ses sourcils sont froncés et ses joues prennent des couleurs. Je prend un peu de courage et laisse échapper entre mes dents:
— Vous ne méritez pas la tâche que votre père vous a confié.
Il plonge ses prunelles vertes dans les miennes, ses lèvres fines se crispent, je crois percevoir dans son regard un éclat incertain, et une sorte d'angoisse passe sur son visage. Je profite de cet instant de faiblesse pour lui assener le coup final:
—  Vous êtes un meurtrier indigne de confiance ! Vous causez la souffrance partout où vous vous trouvez! Vous êtes Indigne de la confiance de votre peuple! Indigne de celle de vos parents!
       Tout son corps se tend à mes dernières paroles. J'ai l'impression d'entendre les battements irréguliers de son cœur venir se débattre dans mon propre corps... j'ai la sensation d'un mal être au fond de moi indescriptible... mais je n'ai pas le temps de ressentir toute cette souffrance que Loki enfonce son poing dans le mur juste à côté de ma tête.
— Ne parlez pas de mes parents!
Sa respiration est forte, ses yeux brillent, sa mâchoire ne cesse de se contracter, et son poing est toujours encré dans le mur.
    Je tremble devant tant de fureur. Je ne savais pas que je pouvais le mettre dans cet état. Je n'arrive plus à cacher ma frayeur... Loki s'en aperçoit sûrement car il regarde sa main et la retire en se redressant. Ses prunelles quittent les miennes pour me détailler de haut en bas, il fronce les sourcils puis replonge dans mes yeux. L'angoisse a réapparu sur ses traits, il n'ajoute aucune parole et sort de la chambre.
       Je ne bouge toujours pas, ne sachant quoi faire, les mains plaquées contre le mur. Mon regard se pose sur la marque laissé par le poing de Loki. Sans y faire attention mes doigts viennent caresser la marque. J'attrape ma main dans l'autre et cours à la salle de bain. Dans le miroir je vois que la frayeur m'a fait prendre des couleurs...
     Quel est ce déchirement que j'ai ressenti tout à l'heure? Je ne peux me souvenir exactement de la douleur, mais je sais que celle-ci était puissante, elle enlaçait mon coeur comme pour le faire exploser. Une chaleur vient envahir mes entrailles alors que je ressens le souffle de Loki sur mon visage. Je passe un coup d'eau froide sur mes joues brûlantes et me raisonne... Il faut que je choisisse une tenue pour cette soirée. Mais un trou vient de se former dans ma poitrine, une sensation étrange m'enveloppe... je décide de ne pas y faire attention.

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