68 : On devrait y aller, non ?

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Allia

Une heure. Lucas m'avait dit d'attendre une heure avant de prononcer, d'ordonner, d'exécuter ou de faire quoique ce soit. Une putain d'heure où je me rongeais les ongles, où je faisais les cent pas dans la salle de contrôle ne pouvant tenir en place. Les minutes s'égrenaient à la lenteur d'une limace face au vent. Autant dire que j'avais l'impression que cela faisait des jours que j'étais là, à attendre de pouvoir agir pour aller le sauver.

Une demi-heure seulement s'était écoulée et j'en étais certaine à présent, Cameron n'allait pas revenir de si-tôt. Personne n'était revenu du combat qui avait commencé quand il m'avait forcée à entrer dans cette foutue bagnole. S'il en sortait vivant, je jurai qu'il allait passer un mauvais quart d'heure ! De quel droit se permettait-il de me mettre de côté, de refuser ma protection alors même que c'était mon devoir de le faire ? J'étais en colère, sur les nerfs et anxieuse. J'avais peur pour lui, peur pour tous ceux qui étaient restés là-bas. Avaient-ils réussis à se cacher dans les alentours ou étaient-ils restés combattre ?

C'était Léon qui était à l'œuvre de cette bataille. C'était forcément lui. 

De ce que j'avais pu apercevoir, il y avait eu des humains mais aussi des loups. Il avait enrôlé des loups dans sa folle conquête, nous devions donc nous battre non seulement contre des humains enragés mais aussi contre des loups endoctrinés. Quelle chance nous avions ! Quelles étaient nos chances de gagner un tel combat ? Je n'en avais aucune foutue idée et mon cerveau ne voulait pas fonctionner correctement et avoir une seule pensée rationnelle.

Lucie à côté de moi essayait de me rassurer comme elle le pouvait mais elle n'avait pas vu ce qui s'était passé là-bas. Et l'image de Cameron tuant ce loup de sang froid me revenant en mémoire me donnait des frissons d'horreur. Bon sang ! Je n'avais jamais vu autant de violence surgir d'un seul coup. Comment avait-il fait pour garder son calme dans de telles circonstances ? Ce devait être les années d'expérience. Voilà à quoi il faisait allusion quand il me disait que ce n'était pas le moment. Il avait dit que je ne serais pas prête. Et il avait sûrement raison après tout. La brutalité, la rapidité du geste, tout ça m'écœurait. Mais pour Cameron ? Je le ferais sans hésiter. Oui, l'après coup serait dur mais je voulais quand même le sauver. J'étais faite pour ça. Je voulais le faire avec toute la volonté et la force que je possédais. Mais il m'en avait empêché et je n'avais pas réussi à le convaincre de me suivre comme il aurait dû le faire. Chose que je regrettais amèrement à ce moment précis.

Lucas, quant à lui, faisait des allers-retour entre dehors et la salle. Il devait sans doute surveiller l'arrivée de notre chef. Mais il se voilait la face. Cameron ne reviendrait pas tant que nous n'irions pas à sa recherche. Il devait sans doute être prisonnier à l'heure qu'il est ou mort. Mort. Je risquais de ne plus jamais le revoir. Le pincement d'horreur qui m'étreignit la poitrine voulait tout dire. Je n'étais pas prête à ça. Je ne le serais jamais.

Si Lucas sortait encore une fois de cette pièce j'allais sans doute lui sauter dessus. Sans le vouloir, chaque fois qu'il partait j'avais une once d'espoir qui s'insinuait en moi comme un couteau sous ma peau pour me réduire en morceaux à chaque entrée sans lui. Et à chaque fois qu'il revenait je sentais la déception m'envahir un peu plus et la tristesse m'assaillir comme une horde de soldat bien entraînée. Nous nous chamaillons, nous hurlions dessus à tout bout de champs. Mais je le voulais auprès de moi. Je le voulais de nouveau près de moi, voir son regard azur me transpercer la peau jusqu'à l'âme pour me l'empoigner et l'emprisonner dans cet océan de glace.

Les nerfs à vifs, mes yeux voyageaient sans arrêt entre l'horloge et mes mains que je tripotais sans jamais me calmer. Depuis mon retour, je faisais les cents pas, m'arrachais les cheveux, me triturais les mains, soufflais pour tenter de m'échapper à ce stress qui me prenait à la gorge et m'empêchait de respirer. 

Amour Sauvage...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant