Chapitre 12 : Antonyme

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Le lendemain, je me réveillai avec une sacrée gueule de bois, des nausées et le regard vide. Ma mère m'était d'un grand secours en me servant une tasse de café et en me tendant des comprimés de paracétamol.

Il me fallut bien deux heures pour me remettre sur pied, et après une douche revigorante, je commençai enfin à ressembler à un être humain. Mon père était, lui aussi, en proie à la même malheureuse condition que moi, et nous étions tous les deux affalés sur le canapé, marmonnant en chœur notre malaise, sous l'œil amusé de ma mère.

Aux alentours de seize heures, sentant que je reprenais un peu du poil de la bête, je récupérai mon téléphone, délaissé dans ma chambre. Les souvenirs de la conversation de la veille commencèrent à refaire surface. J'avais échangé pendant un bon moment avec le frère de Clemente. J'avais partagé un certain nombre de détails sur Clemente et ma propre vie. La honte commença à me submerger. Je réalisai à quel point j'avais pu me montrer risible. Plus d'alcool pour moi, décidai-je alors. Heureusement, il était peu probable que je recroise l'un ou l'autre, ce qui me soulageait grandement.

Le vol de retour fut encore plus éprouvant, entre le manque de sommeil et le décalage horaire. C'est dans un état d'épuisement avancé que je sortis de la zone internationale. Cherchant à rejoindre la sortie pour attraper un taxi, je fus surprise de voir un homme brandissant une pancarte avec mon prénom dessus.

Uniquement mon prénom, sans mon nom de famille. Victoire n'était pas un prénom très courant, surtout aux États-Unis, mais n'ayant pas réservé de taxi, je supposai que ça ne pouvait pas être pour moi. Cependant, en m'approchant, je remarquai l'homme tenant la pancarte.

Grand, vêtu d'une veste en cuir marron, les cheveux noirs attachés en une haute queue de cheval, un sourire éclatant sur le visage orné d'une barbe bien taillée, et des yeux verts que j'aurais reconnus entre mille. J'avais devant moi un Santini, mais ce n'était pas Clemente. C'était son frère Valente, qui me souriait chaleureusement et agitait la main. Contrairement à Clemente, que j'avais principalement vu en costumes, Valente portait un jean et des bottes noires.

Je demeurai figée au milieu du hall de l'aéroport, regardant cet homme s'approcher de moi, les yeux légèrement écarquillés, en proie à la surprise.

— Bonjour, Victoire. Bon voyage ? m'interpella-t-il avec enthousiasme.

— Bonjour, euh, oui. Mais, que faites-vous ici ?

— Tu me vouvoies maintenant ? On se tutoyait pourtant lors de notre appel téléphonique. Je suis venu te chercher, ce sera plus pratique que de prendre un taxi.

Je préférai ne pas lui dire que notre rapprochement était simplement dû à mon état d'ébriété à ce moment-là.

— Merci, mais je vais quand même prendre un taxi, répondis-je en tentant de me diriger vers la sortie.

Valente marchait à mes côtés, son expression affichant une déception feinte.

— Pourquoi ? Ma voiture est juste là dehors, et la file d'attente pour les taxis est interminable.

— Disons que je ne suis pas très encline à monter dans la voiture d'un parfait inconnu.

— Nous ne sommes pas tout à fait des inconnus. Nous nous sommes déjà rencontrés, et la dernière fois, au téléphone, on a bien échangé.

— Je ne qualifierai pas cela de "rencontre". Tu étais dans les vapes la plupart du temps. Et n'oublie pas que j'étais complètement ivre au téléphone.

— Alors, viens avec moi. Je vais te ramener, et nous aurons l'occasion de mieux nous connaître. Je te dois bien ça, après tout, tu m'as soigné, dit-il en esquissant un sourire.

Four Aces Of CardsWhere stories live. Discover now