Four Aces Of Cards

Chapitre 5 : Dr Jekyll & Mr Hyde

À minuit quinze, je quittai l'ascenseur et me retrouvai dans un long couloir désert. Avançant à pas lents, je progressai dans le corridor, une certaine hésitation m'envahissant. Devant la porte de la suite, je pris une profonde inspiration pour me donner du courage, puis je frappai légèrement pour annoncer ma présence avant d'ouvrir la porte à l'aide de la carte qu'il m'avait confiée. Je venais d'entrer dans une suite où le goût et l'opulence se mêlaient habilement dans une palette de beige et de gris. Une vaste baie vitrée offrait une vue imprenable sur la ville, tandis qu'une lampe de sol design diffusait une lueur tamisée dans la pièce.

Sur un fauteuil, je remarquai une veste de costume négligemment posée, celle-là même que Clemente portait.

— Victoire, je n'étais pas certain que tu viendrais.

Je détournai le regard vers sa voix. Clemente s'avançait vers moi, sortant de la chambre à coucher tout en dénouant sa cravate d'un geste nonchalant avant de la retirer et de la poser aux côtés de sa veste. Nous avions adopté le tutoiement, une option bien plus appropriée compte tenu de la nature et de l'objectif de notre rencontre dans cette chambre.

— Je n'en étais pas sûre non plus, pour être honnête, soufflai-je, partagée entre mon inquiétude et mon désir.

Les coins de sa bouche s'élevèrent légèrement, formant un sourire subtil.

— Je viens tout juste d'arriver. Aurais-tu envie de boire quelque chose ?

Je déclinai poliment, puis, ne sachant pas trop que faire ni dire, je m'approchai de la baie vitrée pour observer l'extérieur. À quelques dizaines de mètres en contrebas, la ville grouillait de vie et de lumières.

— Est-ce que tu habites dans cet hôtel ?, lui demandai-je.

— Non, j'ai un appartement en ville. Je reste ici exceptionnellement cette nuit, au cas où on aurait besoin de moi en urgence au cours de la soirée.

Clemente m'avait rejoint devant la baie vitrée, un verre de whisky à la main. Il porta le verre à ses lèvres tout en scrutant l'horizon.

— Ne préférerais-tu pas rester en bas avec les autres invités ? Il n'est que minuit, fis-je remarquer.

— Certainement pas. Ce genre d'événement est une corvée. J'ai serré quelques mains, prononcé un discours, mon travail est désormais achevé. Les relations publiques, ce n'est pas vraiment mon fort, mais cela fait malheureusement partie de mes fonctions.

Clemente s'éloigna et s'assit sur le canapé au centre de la pièce. Il posa son verre sur la table console à côté avant de relever les yeux vers moi.

— Viens t'asseoir, Victoire, m'invita-t-il en me faisant signe d'approcher.

Je m'exécutai et m'assis à ses côtés, conservant néanmoins une certaine distance entre nous.

— Tu sembles légèrement tendue. Est-ce que je t'intimide ? Lors de notre dernière rencontre, tu étais bien plus détendue, nous avions conversé sans retenue.

Clemente m'observait les yeux brillants. Appuyé nonchalamment contre le dossier du canapé, il soutenait sa tête avec son bras. Sa jambe croisée était à quelques centimètres à peine de la mienne.

— La dernière fois, tu étais blessé. Tu étais un peu comme un patient, c'était plus simple.

— Qu'est-ce qui a changé depuis lors ?

— À présent, tu es un homme qui exsude la sensualité sur un rayon de quinze kilomètres à la ronde.

Un léger rire s'échappa des lèvres de Clemente, un rire qui me parut étonnamment plus authentique que tout ce qu'il avait exprimé jusqu'alors. Puis, retrouvant soudainement sa gravité, il s'inclina légèrement vers moi et tendit la main vers mon visage. Faisant glisser le dos de ses doigts le long de ma joue, il provoqua un frisson dans tout mon être. Son visage s'approcha du mien et je sentis son souffle caresser ma mâchoire avant de glisser jusqu'à mon oreille.