Chapitre 54

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La tête lourde, j'essayais en vain d'ouvrir les yeux. Des acouphènes sifflaient dans mes oreilles à tel point que je me demandais pourquoi mes tympans n'étaient pas encore réduits en bouillie. Tout mon corps me faisait atrocement mal, et je ne me sentais pas en mesure de bouger un seul orteil.

Sans même décoller mes paupières, je savais déjà qui m'entourait. Kayna et toute la bande. Y comprit Clara, ma mère et Mr Jackson. Génial. J'étais sûrement chez les Jackson. Combien de temps avais-je dormi ?

Des murmures incompréhensibles s'élevaient près de moi. Les voix se formaient et se déformaient, mais je ne comprenais pas un traitre mot de ce qui était prononcé. Finalement, je replongeai dans le coma.

Quelques minutes plus tard –ou heures ?-, je me réveillai en sursaut, le cœur battant à tout rompre sans raison apparente. Je fixais le plafond, paralysée.

Les hauts murs étaient recouverts de papier peint rouge sang, et un immense lustre en cristal éclairait la vaste chambre. D'épais rideaux dissimulaient les fenêtres, et le sol était tapissé de moquette bleu nuit, presque noir. Le mobilier tout en acajou agrémentait la pièce. Cela ne faisait aucun doute, j'étais chez les Jackson. Sauf que j'étais seule.

Plus que tout au monde, j'aurais voulu me défaire de ces liens invisibles et arracher la tête de tous ceux qui avaient participé à mon kidnapping. A commencer par Kayna. Puis Aaron, parce qu'il avait tenté la même chose deux fois. Sans oublier ma mère. C'était à cause d'elle que tout ceci avait lieu. Si elle n'avait pas couché avec ce pervers d'Aiden, mon père ne serait jamais mort de cette façon.

Et je ne serais pas née non plus.

La porte grinça, et je sentis ma mère approcher. Quand on parle du loup...

- Comment te sens-tu ?

- Je pète la forme ! raillai-je, immobile.

- Tu sais ce qui t'attend ce soir, n'est-ce pas ?

Ce qui m'attend ? Quoi... ?! Je faillis bondir. Samain, c'était cette nuit.

- Et toi, tu sais ce qui vous attendra, une fois que je serai debout ?

Elle soupira.

- Roxane, je t'en prie. Tu dois briser la malédiction. C'est ton seul essai avant le prochain siècle.

- Eh bien, à dans cent ans. Pourquoi est-ce que tu t'acharnes à ce que j'y mette fin, alors que tu n'es même pas concernée ?

Pourquoi voulaient-ils absolument me faire endosser ce fichu rôle d'Élue ? Je n'avais plus aucune volonté ni motivation. Pour briser la malédiction, il fallait d'abord tuer Aiden, qui, bien entendu, n'était pas mort, puisque je n'avais pas la Dague. Et, à moins de parvenir à l'attraper à la prochaine vision, si j'allais en avoir une, je ne voyais pas comment l'achever. Surtout qu'il avait probablement disparu à l'autre bout du pays.

- Je sais très bien que c'est la dernière chose dont tu as envie. Mais s'il te plaît, fais un effort. Tu n'as qu'à lier tes mains à celles de Lucy et Aaron, et verser quelques gouttes de ton sang, puis tout sera terminé.

- Tu mens. Tu sais parfaitement qu'il faut tuer Aiden avant que la lune brille de tout son éclat, et c'est impossible.

Ne pouvait-elle pas simplement dégager ? Je ne tenais pas à rester dans cette pièce une minute de plus avec une traînée à mes côtés.

Ma mère poussa un nouveau soupir, et s'assit sur le fauteuil près du lit. Elle me regarda, avec cette lueur qui disait clairement « tais-toi et écoute ». Je serrai les dents et la laissai s'emporter dans son monologue interminable.

La nature de Roxane - tome 1 : MauditsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant