31 - Retour à la réalité

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Chapitre 31 : Retour à la réalité

- Je suis sortie avec Livia. Puis on s'est séparé. Sauf que son copain n'appréciait pas franchement notre proximité sur la glace. Il me l'a fait payer, et je me suis retrouvé à l'hôpital un soir.

Céleste se détourna subitement de la piste sur laquelle leurs concurrents passaient, et grimaça. Son cerveau absorbait toutes les informations inutiles et les transformait en donnée vitale, ce qui, dans l'état actuel de la situation, la dérangeait. Ils étaient censés patiner dans vingt minutes, ce qui signifiait que dans dix minutes, leur échauffement commençait. Elle n'avait pas l'esprit apte à réfléchir à des histoires romantiques qui se finissaient mal, c'était sa dernière préoccupation.

- Pourquoi tu me le dis maintenant ?

- Félix m'a conseillé de te le dire avant qu'on fasse notre programme, pour éliminer toute la gêne qui subsistait selon lui.

- Ça ne t'ai pas venu à l'esprit qu'il sous-entendait plusieurs jours avant ?

Parfois, la jeune fille se questionnait sur l'âge mentale de son partenaire. Cela lui apparaissait comme une évidence qu'il n'était pas question de la déstabiliser avant la compétition, mais leur cerveau n'était pas également réparti de toute évidence. Le fait de savoir lui conférait tout de même un semblant de contrôle sur ce qu'il lui manquait pour finir le puzzle, mais le moment était réellement mal choisi. Sa concentration ne lui permettait pas de répondre comme le garçon le voulait, mais il devait comprendre que son comportement était contre-productif. Céleste ne lui jeta pas un regard, quoi qu'elle fût presque sincèrement désolée pour lui de constater que les gens peuvent parfois être irresponsables, mais son stress l'empêchait d'avoir des pensées qui se mélangeaient fluidement aux autres.

- Je suis désolée qu'un gars t'ai fait du mal pour la simple raison que tu étais sorti avec Livia.

C'était l'unique phrase de soutien et d'encouragement que son cerveau était capable de formuler, le reste était englouti par la tension qui montait. Les applaudissements se faisaient de plus en plus nombreux, atteignant des records ridiculement hauts pour un simple championnat départemental. Céleste écoutait distraitement la musique adverse en jugeant leurs goûts si cela lui déplaisait où en se taisant quand le choix musical lui convenait. Malgré des participations à des évènements plus médiatisés qu'un vulgaire concours entre une dizaine de couple, elle ressentait le même effet de stress, voire ce dernier lui semblait amplifié. Les journalistes les attendaient au tournant, et selon ce que la jeune fille avait lu sur internet, une dizaine s'était même spécialement déplacés afin de voir de plus près, ce que donnerait cette première compétition dans une discipline étrangère à la sienne. Ils n'avaient pas le droit à l'erreur, s'ils la rataient, ils devaient recommencer les mêmes sélections un mois plus tard, dans l'espoir d'être qualifié pour les régionaux, et finalement le national. Céleste visait le plus haut, mais Conrad lui rappelait toujours, très gentiment et courtoisement, que ce serait le miracle du siècle s'ils parvenaient à gagner ne serait-ce que les départementaux. Il avait déjà affronter ses adversaires, et connaissaient tous leur niveau, bien que certains aient considérablement évolué en deux ans.

Elle scrutait et observait les performances du niveau inférieur au sien, qui était déjà propre et soigné sur la prestation artistique. Si la technique et l'artistique ne faisaient qu'un auparavant en individuel, elle savait qu'aujourd'hui, les sauts et les portés ne pouvaient plus être qualifié de bluffante, surtout dû aux nombreuses chutes. Sinon, ils maîtrisaient les bases, et avec ce petit plus qui leur permettait d'acquérir le coeur des personnes qui avaient assisté au spectacle. Lorsque le dernier couple quitta la glace, après une réception ratée d'un saut lancé, une musique douce se fit entendre dans la patinoire, et les doigts de Conrad rencontrèrent les siens. Étonnement, leur proximité sur la glace ne la gênait plus mais le fait de devoir se tenir la main pour saluer juges et public la mettait mal à l'aise.

Le Revers de la MédailleWhere stories live. Discover now