20 - Fierté destructrice

61 6 0
                                    

Chapitre 20 : Fierté destructrice

Céleste Haase observait le plafond entièrement construit avec des tôles qui faisaient résonner la pluie battante à l'intérieur du bâtiment. Le printemps avait fait son grand retour quelques semaines plus tôt et l'été commençait dans seulement un mois, mais les conditions météorologiques se trouvaient déréglées par le changement climatique. Les températures avoisinaient les dix degrés, et les routes étaient inondées à certain moment, rendant la circulation plus longue due aux détours effectués pour se rendre au lieu désiré. Céleste avait grandi dans une région montagneuse où l'hiver était aussi rude qu'un octobre dans des pays nordiques et supportait plutôt bien le froid. Ses quatre couches aidaient bien en général, mais elle ne grelottait pas quand les portes ne s'ouvraient pas en raison d'une serrure glacée quand certains étaient obligés, pris de court par ce temps glacial. Les arbres penchaient dangereusement dans le bosquet où elle s'était promenée avec Eden, et menaçaient depuis plusieurs années de s'abattre sur le lac. Les collectivités territoriales et la marie s'activaient afin de conserver cet endroit de biodiversité exceptionnelle.

Eden apparaissait de plus en plus souvent dans ses pensées, et occupait une place que la jeune patineuse jugeait trop importante. Elle ignorait toujours ce qu'elle devait dire en le croisant dans les couloirs, si elle devait insister pour faire la conversation où fuir comme elle l'avait si bien fait. Il ne lui reprochait rien, acceptait systématiquement sa compagnie et discutait pour deux quand Céleste était mal à l'aise. Les secrets avaient été enfouis, les deux adolescents ayant saisi l'enjeu d'une révélation, et ils parlaient beaucoup plus librement, sans peur du jugement. Mais récemment, la seule pensée qui la terrassait était son potentiel départ comme son père avait fait part de ses futures intentions quant à la direction de ce centre. Il n'avait donné aucun nom pour son remplaçant, et cela jouait sur l'humeur de la jeune fille. Certains avaient toujours fait le nécessaire pour lui donner sa chance de réussir quand d'autres restaient stoïques sur ses performances aux différents championnats. Les deux combinés provoquaient une tension sans pareil comparable à la pression ressentie lors de ses programmes. Son prochain directeur serait celui qui la fera réussir où échouer.

A chaque discussion, les deux adolescents évitaient le sujet, qui s'avérait tout aussi sensible pour Eden que pour elle. Son père ne l'avait pas prévenu de son idée, et il avait été mis sur le fait accompli, alors que ça le concernait suffisamment pour être mis au courant avant la presse. Il lui avait raconté que les premiers jours, chez-lui, avaient été un carnage. Les repas étaient pris dans un silence funèbre, l'ambiance était lourde et planait toujours sur la famille et Eden ne regardait plus ses parents en face. Un cauchemar dont il souhaitait se réveiller. Elle ne pouvait pas l'aider mais comprenait sa détresse, plusieurs fois, elle s'était retrouvée à sa place, emplie de doute sur leurs décisions à son égard, sans la concerter. Céleste ne se faisait plus d'espoir, Eden partirait une fois la période d'essai du nouveau directeur achevée, et elle n'aurait plus que Conrad pour la détendre. Les deux garçons étaient les seuls à considérablement diminuer son stress, en lui changeant les idées où en la privant de son téléphone, source de son angoisse permanente.

Après plusieurs minutes à attendre les instructions de Félix et des autres coachs des patineurs qui avaient eux aussi été réunis dans la pièce centrale, ces derniers finirent leur tour de piste qui servait à repérer les lieux pour mieux les répartir, et décidèrent d'enfin prendre la parole. Une femme que Céleste n'avait jamais aperçu se tenait à l'écart, les bras croisés et le visage impénétrable, qui la fixait au travers de sa paire de lunettes noire. Autrement, elle reconnaissait tous les autres entraîneurs, avec plus où moins de difficulté pour chacun. Ludmila avait elle aussi fait le déplacement, mais la patineuse n'en comprit pas la raison. Peut-être qu'ils avaient finalement décidé de la reprendre pour enseigner à des jeunes prometteurs, étant donné les bons résultats que la femme d'origine russe était capable d'apporter. Céleste se détourna d'elle, et fit le tour pour constater que tout le monde s'approchait d'eux. Ne voulant pas être prise pour cible de son manque de rigueur, elle se précipita pour rejoindre Olivia et Esther, qui chuchotaient sur la présence de la femme aux yeux de serpent.

Le Revers de la MédailleDove le storie prendono vita. Scoprilo ora