Chapitre 79 : Vivre

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365 : année du Soleil Couchant ; Village d'Ao

Ces derniers jours furent difficiles pour Euphemia. La magie du sang et les remèdes des prêtresses ne suffisaient plus à la garder en vie. Ils parvenaient tout juste à lui éviter de souffrir. Son calvaire dura encore quelques mois. Et puis un jour, comme décidant qu'elle avait assez souffert, elle partit.

Harry apprit sa mort alors qu'il revenait de la chasse. Il ne voulut tout d'abord pas y croire. Pas tant qu'il ne l'avait pas vue. Comme un fou, il avait traversé tout le village pour retrouver sa maison, ignorant tous les regards peinés qui se posaient sur lui alors qu'il courait.

C'est quand il vit les larmes dans les yeux de son père, quand il caressa la peau froide du visage de sa grand-mère, qu'il comprit. C'était vraiment fini. Euphemia avait quitté ce monde.

Euphemia l'avait laissé. Tout seul. Et il ne lui avait même pas dit qu'il l'aimait. Il n'avait même pas été là pour l'accompagner dans sa mort. Peut-être que s'il avait pu lui tenir la main, elle n'aurait pas lâché prise. Peut-être que s'il avait été là, elle n'aurait pas choisi de partir.

Mais il n'avait pas été là. Son père l'avait envoyé ailleurs. Pourquoi ? Pourquoi est-ce qu'elle était morte ? Pourquoi est-ce qu'il n'avait pas été là ?

Harry aurait voulu crier. Il aurait aimé cracher sa douleur. Mais il ne pouvait pas. Tout restait coincé dans sa gorge. Il ne pleurait même pas.

Les funérailles furent rapides. Ou alors Harry ne sentit pas le temps passer alors qu'on enterrait Euphemia dans le sol. Alors qu'on rendait son corps à la forêt. Ron et Ginny lui avaient tenu la main durant toute la cérémonie et Harry s'y était accroché de toutes ses forces.

Ce soir-là, il s'était mis à pleuvoir, mais Harry n'avait rien senti. Peu à peu, les gens avaient quitté le cimetière pour se mettre à l'abri. Ron et Ginny aussi. Il ne restait plus que James et son fils.

Ce n'est que lorsque James prit Harry dans ses bras que le garçon parvint à laisser s'échapper les larmes. Père et fils avaient perdu un bout d'eux-mêmes avec la mort d'Euphemia. Ils s'assirent tous les deux près de sa tombe, se serrant l'un contre l'autre comme deux garçons perdus. Peut-être qu'ensemble, ils parviendraient à le reboucher, ce trou qu'elle avait laissé.

De longues heures passèrent et James laissa finalement son fils se recueillir seul.

La pluie se calma, les oiseux se mirent à chanter. Alors que le soleil lui caressait le visage, Harry posa la main sur le sol. Il se souvenait encore du chant des battements de cœur d'Euphemia. Il les connaissait sur le bout des doigts. Peut-être qu'à travers la terre, il pourrait les sentir une dernière fois.

Ba-boum.

Le vent se leva et une douce brise caressa la joue d'Harry. Soudain il se sentit enveloppé de chaleur et d'amour. C'était comme si la forêt le serrait dans ses bras. Comme si Euphemia était toujours là. Dans ses souvenirs. Autour de lui. Partout.

Harry savait maintenant. Oui, il en était certain. Euphemia était toujours là. Elle ne l'avait pas abandonné. Elle le protégerait toujours, ce serait juste d'un peu plus haut.

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En souvenir de Rémi Lo Sam Kieou, mon petit papi chéri

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