Chapitre 26: Noé

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Lundi 9 Septembre 2019:

Noé:

Assis contre le mur et à gauche de Camille, je ne risque rien. L'amphithéâtre est bondé. D'après mon meilleur ami, c'est toujours comme ça le premier jour des cours. Les élèves abandonnent au fur et à mesure des semaines qui défilent. Cam est persuadé que d'ici décembre, nous serons moitié moins.

Mon coeur bat à toute rompe dans ma poitrine, mes mains sont moites et tremblent. Je n'avais jamais suivi un cours magistral. C'est étouffant ce monde autour de moi. Pour penser à autre chose j'allume mon ordinateur, que ma mère m'a offert dimanche. Il a dû lui coûter une fortune, même si elle m'assure du contraire. Comme mon téléphone est synchronisé avec, je reçois les sms directement dessus. Une fois démarré, un message de Malo apparaît.

<Malo>
Hey !
Bonne reprise et
Courage pour aujourd'hui.
Bisous

Je suis touché par ses mots, il a pensé à moi. Je lui réponds un simple merci, en lui souhaitant également une bonne journée. Camille a vu notre échange et il a dû remarquer que nous avons discuté avant ce matin. Il ne dit rien et se contente de me lancer un sourire, que je lui retourne.

Mon meilleur ami se met à glousser, je comprends pourquoi en recevant un autre sms, mais cette fois-ci de Sam. C'est une photo de lui et d'Adriel, les pouces en l'air devant l'objectif, avec comme légende : « C'est enfin à vous bande de fainéant ! ». Cam décide de rentrer dans leur jeu. Il récupère son portable et le plus discrètement possible, il prend un cliché de nous deux. Nous essayons de faire la tête mais c'est peine perdue.

Je suis soulagé de voir Sam sourire si sincèrement. Depuis jeudi dernier, il est renfermé, comme si il était gêné en notre présence. Je compatis avec ce qu'il ressent, puisque j'ai eu la même réaction quand je leur ai parlé de mon agression. Sam a peur de ce que l'on peut penser de lui, que notre regard change sur sa personne, que nous ne voyons plus que son passé chez lui. Il avait besoin de s'isoler quelques jours et je le comprends. Maintenant qu'il sait que rien ne modifiera notre amitié, il sort de sa bulle.

C'est dur de réaliser que Sam et moi, avons plus en commun que ce que je croyais. J'aurais préféré autre chose, bien entendu. Je ne sais pas comment il a fait pour s'en sortir, si il s'en est réellement sorti. Est-ce que cette thérapie dont il m'a parlé l'a aidé ? Je ne perdrais rien à essayer. Après forcement, quand je le vois, je pense à la souffrance qu'il a dû vivre. Même si il insiste sur le fait qu'il n'a pas de souvenirs et qu'il était dans un état presque comateux. J'essaye de ne rien laisser paraître, cela ne lui rendrait pas service et le ferait encore plus culpabiliser.

Notre prof de littérature française qui arrive dans la pièce, me coupe dans mes réflexions. Il se présente et attaque directement sur le programme de cette matière pour toute l'année. J'essaye de prendre le plus de notes possible mais je ne suis pas habitué aux cours magistraux, c'est le premier auquel j'assiste. C'est tellement intense comme rythme que j'ai à peine le temps de faire attention à ce qui m'entoure. Mon angoisse a disparu grâce à ma concentration. 

- Ça été ?, me demande Camille alors que nous sortons de la salle, une fois le cours finit.

- Je crois oui. J'étais vraiment stressé au début mais quand le prof s'est mis à parler, c'est passé.

C'est étrange, que je n'ai senti aucun malaise, j'en suis le premier surpris. Hier, j'étais si anxieux que je n'ai pas dormi de la nuit. Ce matin, j'ai bien failli vomir mon petit-déjeuner et tout à l'heure, j'étais prêt à faire demi-tour en arrivant devant la fac. Au départ, j'avais l'impression que tous les regards étaient tournés vers moi dans l'amphithéâtre, alors que ce n'était pas du tout le cas. La présence de Camille m'a grandement aidé à prendre sur moi.

Pour notre AvenirWhere stories live. Discover now