27 - Peignons les roses en rouge (2/2)

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Il y a des années,

Un cartographe, presque trentenaire, posa sa tête contre le bureau de bois, une plume rousse au bout cendré qu'il avait choisi de nommer Plume de Phoenix, devant les yeux.

Il l'avait trouvée au cours d'une expédition, sa plus belle de toutes. Sur Elenie, une île tout juste émergée de l'Atlantique. Un véritable mystère scientifique, puisque ce petit bout de terre contenait dès son premier souffle, une flore et une faune endémiques. Et puis, des semaines plus tard, l'île sombra tout aussi rapidement qu'elle eut  apparu, ne laissant pour preuve de son passage que quelques plantes et plumes comme celle du Phoenix.

Le cartographe avait l'habitude d'en faire son porte bonheur, mais ce jour là, il ignorait à quelle point elle lui en apporterait.

Il avait décidé d'installer un miroir, un simple meuble pour mieux se peigner le matin. Pourtant durant une nuit, le miroir d'un habituel argenté refleta des éclats de jade. La plume ne gisait plus sur le bureau mais levitait vers la source lumineuse avant de subitement la traverser. Le jeune homme qui n'avait pas loupé une miette de la scène y accourut à son tour. Fasciné, il posa sa paume contre la paroi et la sentit fondre dans une étrange vase. Il n'eut aucune barrière à cette nouvelle curiosité et dépassa le portail, sans savoir les risques qu'il encourrait.

Il venait de trouver un nouveau monde, un monde qui aurait pu être né de l'imaginaire d'un enfant, un monde qui bien plus tard porterait le nom du monde des fanfictions.

***

Aujourd'hui.

—Qu'on leur coupe la tête.

Le sang se glaça dans leurs veines, ils eurent beau chercher une nouvelle issue, ils ne voyaient pas comment se dégager de l'emprise des cartes vivantes. La reine de cœur souleva son menton fièrement, les toisant du regard.

—Votre majesté, ne faites pas cela, nous...

Raisonner la reine de cœur était une idée des plus absurdes puisqu'incorruptible, sa majesté des cartes ne changeait que très rarement de position pourtant cette fois-ci son expression sévère laissa place à de puissants éclats de rire.

—Oh si  vous pouviez voir vos têtes tous les deux, vous êtes tellement drôles.

Assez stupéfait, Sasha se demanda si la reine ne souffrait pas d'une quelconque bipolarité, et s'il ne valait pas mieux  tenter de fuir avant qu'elle ne vire à nouveau dans un excès de rage. Il l'aurait sans doute fait, puisque les gardes avaient décidé de les lâcher, si Rosélia ne l'avait pas retenu.

—Qui êtes-vous ? rugit-elle, certaine que l'identité de véritable reine de cœur venait d'être usurpée.

—Une ancienne amie, rétorqua-t-elle seulement d'une voix malicieuse.

Après avoir fait signe aux soldats de s'en aller, elle retira sa coiffe, laissant apparaître sa longue chevelure châtaine et du revers de la manche, effaça une grande partie de son maquillage. A sa vue, la métisse fronça les sourcils : ancienne, oui, amie, sûrement pas !

—Qu'est ce tu veux ?

Stacie remit sur son front le tricorne qu'elle affectionnait beaucoup, et qui  était à peine usée comme si la répétition se faisait également sur les objets. Cela n'aurait pas été étonnant.

—Quelqu'un désire te parler, répondit-elle avec entrain.

Elle ouvrit de grandes portes ornées de cœurs et de trèfles peints. Derrière, Rosélia put y voir une ombre camouflée par de longs rideaux pourpres. Une ombre qu'elle pouvait reconnaître entre mille, une personne qui lui avait beaucoup manqué.

Reflets D'histoires (terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant