Chapitre 2 - Return to True Hills [2/3]

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Un parapluie apparu presque par magie pour m'inciter à m'aventurer hors de l'abri. La pluie tombait de nouveau, obligeant ma tante à me céder sa protection, le temps pour elle de courir jusqu'à la voiture en attendant que je l'y rejoigne.

Le soleil me manquait déjà.

Reprenant la route, ma tante sortit du parking pour nous emmener jusqu'à chez elle.

— Six ans. Cela va faire six ans que tu n'es pas revenue. Tu vas voir, on va être bien toutes les deux, m'assurait Alyssa. Et puis il y a pleins de choses à faire ici.

Mon regard se tourna vers cette femme rousse dont les magnifiques yeux verts resplendissaient de joie. Elle paraissait toujours aussi belle que la dernière fois que nous nous étions vues. Elle ne semblait pas avoir pris de ride.

Un appel téléphonique de temps à autre ne permettait pas de constater les changements physiques de cette dernière.

— Des choses à faire ? remis-je en question ses propos. Dans une ville paumée au milieu de nulle part ?

Elle éclata de rire.

— Tu as raison, il n'y a pas grand-chose à faire dans les parages. Mais une balade dans la forêt est toujours sympa. Tu te souviens ? A l'époque tu t'y perdais tout le temps. A croire que tu aimais ça.

— Tu étais pire que maman lorsque ça arrivait.

Activant son clignotant, ma tante tourna, concentrée sur la route. Ou bien cherchait-elle simplement à faire dévier cette discussion ? Pourtant, le sourire en coin qu'elle esquissait révélait que le sujet l'amusait.

Alyssa semblait plutôt heureuse de ma venue ici, ce qui me rassurait. Le fait de la déranger m'avait traversé l'esprit un instant.

Nous passions devant divers endroits de la ville et elle me rappela de nombreux souvenirs. Le restaurant de Mama Bertha, la petite librairie que je cherchais à fuir au contraire de ma tante, la forêt où j'avais toujours eu l'habitude de me rendre pour me libérer et dans laquelle je ne m'aventurais jamais trop loin de peur de me perdre. Mais comme ma tante me l'avait si bien rappelé, je m'y étais déjà perdue plusieurs fois. Dont une fois en particulier que je me rappellerai sans doute toujours. Ce qui en avait suivi ne fut pas très beau.

Tous ces souvenirs remontaient à loin à présent. Peut-être que ce n'était pas si mal que ça de revenir dans le coin. En fait, la chose au cœur de toutes mes inquiétudes demeurait la même : allais-je pouvoir m'habituer à cette ville, m'y intégrer ?

Alyssa paraissait confiante. Et la voir aussi détendue semblait me remonter le moral.

— Pourquoi tu ne veux plus devenir une sorcière, Ever ? Lorsque tu étais petite, tu aimais ça pourtant.

Encore ce genre de conversation. Alyssa vivait un peu dans un autre monde. Un monde que j'aurai aimé rejoindre lorsque j'étais une fillette. Un monde qu'aujourd'hui j'avais laissé derrière moi.

Pourtant, il fut un temps où moi-aussi j'avais cru en ce monde. Et Alyssa m'avait aidé à sa manière. Mais une fille bizarre restait bizarre.

— J'ai grandi, Alyssa.

Même si cela demeurait plus ou moins vrai, qu'y avait-il de mal à rêver d'un monde empli de magie et de surnaturel ? Quel mal y avait-il à rêver d'un monde meilleur et plus intéressant que le nôtre ? Surtout lorsque nous n'étions qu'une gamine rêveuse...

« Jusqu'à ce que l'on se réveille », me rappelais-je alors.

Inspirant discrètement, je sortis mes médicaments sous le regard inquiet de ma tante, avalant une gélule avec l'eau que j'avais pris l'habitude de toujours emmener avec moi. On pouvait sans passer.

— J'ai grandi, répétais-je de nouveau.

J'avais grandi, puis j'avais rencontré Louise.


***


J'ouvris la porte de cette maison dans laquelle j'avais vécu tant de choses par le passé. Des souvenirs remontaient à la surface, des odeurs du passé, des images oubliées jusqu'à ce jour.

Alyssa arrivait derrière moi, ma valise en main. Nous montions mes affaires à l'étage, traversant le couloir.

Ma tante vivait dans une petite maison principalement construite de bois. Elle adorait cette matière. Une « matière noble » d'après ses propres dires.

— Avant que tu ne viennes, j'ai essayé d'aménager une chambre pour toi en essayant de la faire la plus agréable possible.

J'ouvris la porte de ma nouvelle chambre. Ni trop grande, ni trop petite. Juste ce qu'il fallait. Un sol en lamelles de bois et des murs clairs. La décoration, assez neutre, laissait un sentiment chaleureux dans ses teintes de beiges, de blancs et de quelques couleurs pastels. Une chambre assez moderne se démarquant du reste de la maison. Mais surtout, un balcon. Petite fille, j'avais bien souvent cherché à atteindre le sommet de l'arbre en passant par-dessus la rambarde, donnant des sueurs froides à ma famille. Dangereux, certes, surtout pour une enfant n'ayant pas encore l'âge d'avoir un équilibre parfait.

Je n'eus pas le temps de la remercier que son beeper émit un bruit pour la prévenir. Elle regarda l'appareil avant de se tourner vers moi, un regard désolé sur le visage. Alyssa était infirmière dans l'hôpital de la ville, il arrivait qu'elle soit souvent appelée à cause du manque de personnel.

— Je suis désolée Ever...

— Le travail. Ne t'inquiète pas et fonce. Je suis plutôt fatiguée donc je vais me coucher après avoir rangée mes affaires.

— Très bien, je reviens dès que j'ai fini.

Elle ferma la porte de ma chambre et partit, me laissant seule dans cette nouvelle chambre qui serait la mienne à partir d'aujourd'hui.

Je fermais les volets des fenêtres et du balcon avant de tirer les rideaux et de ranger mes affaires. Seulement, ma main demeura en suspens. Par habitude, sans doute...

Mes affaires restèrent dans la valise. Je ne possédais pas grand-chose de toute manière. Le reste se trouvait encore auprès de mes parents. Lorsque l'on devait souvent partir, que nous n'étions jamais sûr de pouvoir rester plus d'une année, nous nous habituions vite à ne plus s'attacher à beaucoup de choses matérielles. Le strict nécessaire devenait un quotidien de tous les jours.

J'enfilais un pyjama, préférant aller me coucher. Entre le voyage en avion et le décalage horaire, la fatigue était bien présente. Mon corps tomba sur le lit.

Pensive, mon esprit chercha à vagabonder. Cette boule au ventre ne voulait pas m'abandonner. Elle faisait germer un sentiment de doute, comme si quelque chose était sur le point de se produire.

Je retirais la couette de mon lit pour m'en couvrir, m'engouffrant à l'intérieur tout en essayant de mettre de côté ces impressions dues au stress de devoir reprendre les cours dans une école où je ne connaissais personne.

« Tout se passera bien, Ever », me persuadais-je avant de fermer les yeux pour m'endormir.


Date publication : 14/04/2023

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Date publication : 14/04/2023

Habentis Maleficia | Tome 1 - Sweet DreamsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant