On ne peut pas dire que ma famille était la plus appréciée. Je pourrais dire, avec modestie, qu'on n'était pas juste appréciés mais adorés. Oui, sur le coup, je n'étais pas prétentieux.
Chacun de nous avait toujours eu cette chose qui apportait du nouveau dans la famille. Lottie est une Johanna en miniature mais elle est plus rebelle que maman. Je suis celui qui vit au jour le jour, je m'en fiche des conséquences de mes actes, et à cause de ça j'ai apporté beaucoup d'ennuis dans la famille. C'est pas papa qui pourrait me reprocher ça ; il a fait les mêmes conneries durant sa jeunesse. Comme coucher avant le mariage. Je vous ai déjà parlé d'Ophelia ? J'ai dû rompre avec elle avant qu'elle ne tombe amoureuse de moi... Eh bien, c'était trop tard. Elle était la meilleure-amie de Lottie à leurs 16 ans. Maintenant, à cause de moi, elles ne l'étaient plus.
Et cette fille que je pouvais qualifier - de façon hyperbolique - de mon ex était présente.
Elle était totalement différente de la dernière fois que je l'avais vu. Et je me demandais ce qu'elle fichait là. Tout ce que je savais c'était que rien que de voir son sourire de cruche et sa robe doré bien trop courte pour ses grandes jambes tourner autour de Vince, qui encore une fois semblait hors de son élément, me donna envie de lui arracher la tête.
Je veux dire ; elle ne sentait pas que Vince n'était pas un loup comme nous ? Quelle sombre idiote.
La cérémonie de mariage à l'église s'était étonnement bien passée.
Lorsque j'avais débarqué, mon père m'a serré dans ses bras - quelque chose qui arrive très rarement, la dernière fois que c'était arrivé devait dater de plus de quatre ans auparavant - et ma mère avait fait couler son mascara à force de pleurer contre mon épaule. Elle a dû elle aussi refaire son maquillage car elle avait les yeux humides et les joues rouges. Elle avait même réussi à défaire sa coiffure.
La voir autant mal et désespérée m'a aidé à éviter de passer pour un gros connard. Depuis le trajet en voiture, j'étais vraiment décidé à reporter ou encore mieux annuler l'union. Mais, arriver devant ma famille et ma promise m'a fait changer d'avis.
Je devais absolument changer et arrêter de penser qu'à ma propre personne. Cette union était avant tout symbolique et il s'agissait d'une tradition qui perdurait depuis des centaines de dizaines de siècles. Et ce n'était pas moi qui allait changer les choses. C'était mon devoir de marier Elle, car je suis le Premier-Fils.
Alors j'ai laissé ma fiancée se refaire belle et j'ai rejoint l'église.
L'atmosphère en dedans était étouffante. Il faisait déjà assez chaud pour un 23 janvier mais en plus, tous les invités étaient eux-aussi très anxieux.
Il y avait qu'à entendre le grand souffle que chacun lâcha lorsque je fis mon entrée. Ils étaient tous soulagés qu'il ne s'agissait que de quelques minutes de retard et non d'une annulation.
Andy se tenait du côté gauche de l'hôtel, il était vêtu d'une veste grise accompagnée d'une chemise blanche avec une cravate noire. Il était bien évidemment mon témoin, étant le seul vrai ami que j'avais.
Il me sourit quand il me vit arriver.
Il semblait totalement remis de son état de la veille. Eh bien, j'étais soulagé car un Andy drogué me faisait légèrement peur, faut l'avouer. Et les paroles de Vince à propos d'Andy voulant me monter me revirent et je fronçais les sourcils.
Cet homme était complètement fou.
Je secouai la tête, vidant ma tête de toutes pensées étranges.
C'était un grand jour et un très important pour la race canine, je ne devais pas me laisser emporter par ce genre de choses qui remettaient ma nature en question.
Andy n'aurait pas envie de me baiser car on était tous les deux des Alphas et des Alphas ne se baisent pas entre eux. C'est génétiquement impossible. Et puis, ce mec est mon meilleur pote... C'est malsain.
Je m'approchai de lui et il me prit dans une accolade.
C'était peut-être la chose dont j'avais besoin car juste après, je me sentais bien et vidé de toutes pensées négatives.
Ce mariage est une bonne chose. Ce mariage est une bonne chose. Ce mariage est une bonne chose. Je me le répétai plusieurs fois afin de me détendre.
Mais tous mes efforts furent anéantis lorsque retentit une mélodie que je connaissais déjà assez bien vu que ce n'était pas la première fois que je l'écoutais.
La musique annonçait l'entrée de la mariée à l'église.
« Ok, détends-toi, Jamie. » Je me répétais à moi-même.
L'entrée d'Elle n'était pas une surprise en soi. Je veux dire, le marié devrait être excité ou stressé de découvrir sa future femme dans sa belle robe blanche, tenant un bouquet de fleur dans ses mains et le visage recouvert d'un voile ? Le seul problème était que moi, j'avais déjà tout vu et là je pouvais toujours voir ses yeux encore un peu gonflés et rouges à cause de ses multiples pleurs.
Je ferai sûrement un très mauvais Alpha, j'imagine.
Dan lâcha sa fille devant l'hôtel, l'embrassa dans les cheveux une fois l'avoir serré dans ses bras. Ses yeux étaient remplis d'étoiles alors qu'il observait Elle pendant quelques secondes, lui soufflant qu'il était triste de la laisser partir et devenir une grande femme. Quand la brune commença à renifler, je sus que je devais faire quelque chose car ça devenait un petit peu gênant pour moi et les gens autour.
— Désolé, Dan, mais tu dois lâcher Elle à présent, elle est à moi maintenant... Enfin bientôt, je plaisantai lui administrant une petite tape amicale sur l'épaule.
Il rit un peu et me fit jurer de prendre soin de sa fille. Ah.
Une fois Dan partit s'asseoir près de Lena, dans le premier rang à droite avec la famille, la cérémonie put réellement commencer.
Et je devins de plus en plus nerveux.
Je fus pris de sueurs froides lorsque le prête récita les vœux, nous faisant jurer et promettre de finir notre vie ensemble, et de ne laisser aucun obstacle entraver notre relation.
J'étais terrifié. Oui, moi Jamie Wilson, j'étais terrifié.
Elle n'hésita pas pour lancer un « oui, je le veux » bien sonore, les dents dévoilées dans un grand sourire parfait.
J'ai donc commencé à culpabiliser car elle devait sincèrement m'aimer et moi ? J'étais juste un parfait connard.
Je repensais aux paroles de ma sœur plus tôt au téléphone.
La pauvre fille a été sur le point de faire une crise en apprenant que j'avais peut-être annuler le mariage, alors comment se sentirait-elle si j'avais prononcé un « non ! » devant une assemblée d'environ 200 personnes, devant nos familles respectives avant de détaler comme le plus vil des voleurs ?
Alors sans réfléchir, je lançai un « oui, je le veux » quoi qu'assez hésitant et tremblant.
Mes sueurs froides semblèrent avoir doublées, comme si c'était possible. Je sentais comme si je n'allais pas tarder à faire une crise moi-même, si toute cette mascarade ne se terminait pas.
Et fort heureusement pour moi, après avoir donné un baiser chaste et rapide sur les lèvres parfaitement maquillées de Elle - j'allais sûrement finir par crever d'empoisonnement à substance fortement chimique si elle comptait porter cette quantité de gloss tous les jours -, elle jeta son bouquet de roses blanches par-dessus son épaule sous les applaudissements d'à peu près toutes les personnes présentes dans la grande salle du style baroque.
L'atmosphère était étouffante et irrespirable pour moi. Je n'attendais qu'un signe pouvant me sortir de là. Comme par exemple ; une invasion de zombies ou d'aliens venus pour nous asservir. Ou la fin du monde ; plus efficace et radical.
Mais rien ne se produit ; enfin rien jusqu'à ce que je vis qui avait réussi à attraper le bouquet.
Vince, totalement perdu et perplexe, se tenait là, le bouquet dans les mains. Il semblait chercher un regard qui pouvait lui sortir de là également. Eh ben, nous étions deux.
Je continuais d'attendre un miracle ; comme un enlèvement par les humains, je ne sais pas, quelque chose. J'imaginais le toit de l'église être arraché et un halo de lumière se placer sur Vince et moi et nous sortir de là dans une soucoupe volante.
Mais rien ne se produit. Jusqu'à ce qu'il croise mon regard et se lèche les lèvres très lentement. Et soudain, je me mis à imaginer le goût qu'elles devaient avoir. Considérant sa couleur délicieuse rose, allaient-elles goûtés la framboise ?
Maintenant, j'étais coincé, complètement ensorcelé par ses lèvres pulpeuses.
— Félicitations, James ! une voix me sauva.
Je fus tiré dans une accolade ferme et chaleureuse.
Très rapidement, plusieurs personnes refirent le même geste.
J'étais totalement ailleurs, seulement mon corps ne bougeait pas, guidé par les étreintes que je recevais.
Je me rendis rapidement compte qu'il s'agissait de mes amis du lycée, ceux avec qui je n'avais plus vraiment aucun contact. Ils avaient dû être invités par Lottie ou encore papa, je m'en fichais pas mal en réalité. Je voulais simplement sortir de là. Respirer l'air frais.
— James, t'es à peine lié que tu sens déjà l'Omega, plaisanta l'un deux après une accolade.
Ben voyons. Très drôle.
Machinalement, mon regard croisa Vince qui était toujours debout quelques mètres plus loin dans mon champ de vision, il jouait avec une rose avec ce rictus qui hurlait les problèmes, les yeux baissés sur la fleure qu'il déshabillait de ses pétales une par une, avec une lenteur presque érotique. Qui rend arracher des pétales aussi pornographique ?
C'est seulement lorsqu'il leva des yeux vitreux et sombres sur moi que je sus que j'étais fichu.