Famille.

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14 mai 1967, École de sorcellerie Poudlard, Écosse.


Le bruit de ses pas résonnait dans les couloirs qui menaient aux cachots. Ses longs cheveux blonds se balançaient contre sa nuque, suivant le même mouvement que les pans de sa robe d'écolière sombre. Les bras remplis de livres tout juste empruntés à la bibliothèque, Narcissa entra dans la Salle Commune des Serpentards. À l'intérieur, les élèves discutaient joyeusement. Parfois, on entendait un éclat de rire ou un petit cri de protestation. Le sourire aux lèvres, la jeune Black balaya la pièce du regard.
Près de la cheminée, Lucius conversait avec Rabastan Lestrange et deux autres garçons du même âge. Non loin d'eux, Maisie Parkinson et Dahlia Greengrass jouaient aux cartes en gloussant, les yeux brillants. Narcissa les observa, le cœur léger. Ces derniers temps, il lui semblait qu'elle vivait un rêve. Sa deuxième année à Poudlard touchait à sa fin, et elle s'était déroulée à merveille.
Alors qu'elle s'apprêtait à rejoindre ses deux amies, quelqu'un lui posa ses paumes contre les yeux. Narcissa laissa échapper un soupir faussement exaspéré avant de pousser doucement les mains qui lui cachait la vue.

- Il n'y a que toi pour faire ça, Dromeda, dit-elle avant de se retourner pour faire face à sa sœur qui était hilare.

Bellatrix et Andromeda regardaient leur petite sœur d'un air malicieux. La plus âgée sortit un paquet de derrière son dos et le présenta à Narcissa, un large sourire aux lèvres.

- Joyeux anniversaire, Cissy. C'est de notre part à toutes les deux.

La fille saisit délicatement la boite et défit le papier cadeau argenté, avant de soulever le couvercle et de récupérer l'objet qui avait été placé à l'intérieur. Des larmes lui montèrent aux yeux quand elle regarda la photo que Bellatrix et Andromeda avaient faite encadrer pour elle. Dessus, les trois sœurs étaient dans leur jardin, en ligne, et riaient aux éclats. Cette photo avait été prise l'été dernier. Ce jour là, Druella était revenue au manoir avec des robes flambant neuves pour ses filles. Les sœurs les avaient essayées immédiatement, et Cygnus avait tenu à les prendre en photo.

- Merci beaucoup, murmura la blonde après avoir longuement examiné l'image. C'est un superbe cadeau.
- On savait que cette photo te plairait ! assura Andromeda en échangeant un regard complice avec Bellatrix.
- T'as plutôt intérêt à la garder, prévint l'aînée d'un ton moqueur. C'était toute une organisation pour mettre la main dessus.

Narcissa hocha vivement la tête et serra la photo contre sa poitrine.

- Je la garderai toujours, affirma-t-elle.

Puis, elle prit ses deux sœurs dans ses bras et les trois restèrent les unes contre les autres. Narcissa pensa qu'elle ne sentirait jamais aussi bien qu'en leur présence, et ferma les yeux pour profiter de cette proximité si apaisante. Comme il était bon, d'avoir treize ans.


Narcissa passa un doigt tremblant sur la vieille photo dont les couleurs s'étaient ternie au fil du temps, puis la rangea dans un tiroir qu'elle referma d'un coup sec. Tout ces souvenirs lui semblaient si lointain désormais qu'ils en devenaient presque irréel. Comment avait-elle pu un jour être si heureuse ?

Les temps avaient changé depuis. Les trois sœurs s'étaient séparées, et leurs sourires s'étaient effacés.

La femme poussa un profond soupir et ferma les yeux. Puis, une main se posa délicatement sur son épaule, l'obligeant à rouvrir les yeux pour voir à qui elle appartenait.
Lucius s'accroupit devant elle, et sa main se posa sur la sienne. Il plongea ses yeux bleus comme la glace dans ceux de son épouse, et Narcissa se sentit instantanément mieux.

- Madame Malefoy serait-elle prête à m'accorder une danse ?

Un petit sourire apparut sur les lèvres de Narcissa, et elle baissa la tête en murmurant qu'il n'y avait pas de musique ; ce à quoi Lucius répondit en levant sa baguette, faisant démarrer le tourne disque qui se mit à jouer un air de valse.
Narcissa leva alors son regard vers lui, et il l'aida à se relever pour l'accompagner au centre de leur suite. Sans détacher leur regard et sans un mot, les deux époux se mirent à doucement danser ensemble.

- Tu te souviens de notre première danse ? demanda Lucius après un moment.
- Oui, répondit Narcissa. Nous avions sept ans. C'était au second mariage de ton oncle Aslan.
- Ma mère avait encore fait une crise ce jour là. J'étais tellement embarrassé. Puis, quand j'ai dansé avec toi, j'ai tout oublié. Ma mère, la maladie, le regard des gens. J'étais si fier de danser avec Narcissa de la maison Black que je n'ai prêté attention qu'à ma cavalière ce jour là.

Un peu contre sa propre volonté, des larmes commencèrent à se former aux coins de ses yeux. Narcissa soupira, et Lucius déposa un baiser sur son front.

- Nous sommes toujours ensemble, dit-il d'une voix douce. Et nous le resterons, toi, Draco et moi, quoi qu'il advienne. Nous serons toujours une famille.

La femme releva la tête, et plongea à nouveau son regard dans celui de son époux.

- Toujours, répéta-t-elle dans un murmure ému.


****


20 février 1998, Manoir Malefoy, Wiltshire.


Elle ne pleurait presque jamais.

Jamais Bellatrix n'avait vu d'enfant aussi calme. La mère observa la petite dormir paisiblement dans son berceau, et poussa un soupir profond. Était-elle normale ?
Delphini avait déjà un duvet de petites boucles noires sur le crâne, et ses yeux étaient aussi sombres que le plumage d'un corbeau. Sa peau était très pâle, et ses petites lèvres avaient la forme adorable d'un cœur. La mangemort sentit une vague d'émotion l'envahir alors qu'elle continuait de regarder sa progéniture. Était-ce ainsi que s'étaient senties Druella et Narcissa devant leurs enfants ?

Bellatrix ne voulait pas aimer cette petite créature à laquelle elle avait donné naissance. C'était censé être une arme, un outil pour le Seigneur des Ténèbres, rien de plus.

- Ta grand-mère aurait été ravie de te rencontrer. Si tu savais à quel point elle m'a pris la tête pour que j'ai un enfant. Dolph aussi voulait fonder une famille. À vrai dire, tout le monde attendait de moi que je devienne mère. Mais moi, je l'entendais autrement. Je savais ce que je voulais faire de ma vie, et tu n'en faisais pas partie. Tu es là pourtant. Qui l'aurait cru ? Pas moi. Je doute d'ailleurs pouvoir être un jour réellement ta mère. Je t'ai donné la vie, parce que j'en avais reçu l'ordre. C'est un honneur pour moi, un véritable honneur. Mais je ne suis pas faite pour être mère.

À ce moment, Delphini commença à s'agiter dans son berceau, et ouvrit doucement ses grands yeux noirs pour les braquer dans ceux de sa génitrice, qui lui adressa un sourire attendrit.

- Tu es la chose la plus étrange qui me soit arrivée, Delphini, murmura Bellatrix. Je ne sais pas quoi penser de ton existence. Je ne sais pas si je dois t'aimer ou pas, je ne sais pas si je t'aime comme une mère est supposée aimer son enfant. Tout ce que je sais, c'est que tu es la preuve de ma valeur en temps que mangemort. Tu me rappelles chaque jour du privilège qui est le mien, celui de servir le Seigneur des Ténèbres. Un jour, tu le serviras toi aussi. Je t'entrainerai pour que tu comptes parmi ses meilleurs soldats. Je t'apprendrai tout ce qu'il m'a appris alors que je sortais tout juste de Poudlard.

La petite répondit à la mère par un gazouillement aigu, et Bellatrix sourit en lui caressant légèrement le bout du nez.

- Il m'a sauvée, tu sais. Le Seigneur des Ténèbres. Il est le seul à m'avoir réellement vue telle que j'étais, même à l'époque. C'est grâce à lui que j'en suis là. Grâce à lui que j'ai pu exploiter l'immensité de mes pouvoirs. À la maison, tes grands-parents nous ont toujours inculqué l'importance du savoir, mais ne nous encourageaient pas à user librement de nos pouvoirs. Mon Maître, lui, m'a offert la liberté. Il m'a fait comprendre que, sans violence, il n'y avait pas de pouvoir ; et que, sans pouvoir, ce monde était vain. Les années passées en prison ne seront rien face au nouveau monde qui nous attend. Nous pourrons bientôt enfin vivre la vie que nous méritons. Tu verras. Cissy, Draco, toi et moi, nous aurons une vie de rêve. Une vie où les Vingt-Huit seront enfin à leur place naturelle, en haut de l'échelle sociale. Et le Seigneur des Ténèbres veillera sur nous. Il le fera toujours. Quand tu seras en sécurité, le monde pourra être mis au courant de ton existence, et tu seras respectée dans tout le pays et au-delà même des frontières. Et moi aussi.

Bellatrix garda son regard fixé sur l'enfant, qui la regardait en retour avec ses grands yeux sombres.

- J'espère que tu seras à la hauteur, Delphini, soupira la mère.


****

20 mars 1998, 10, Montagu Road, Oxfordshire.


Il faisait froid dehors. Sur les vitres, Andromeda pouvait voir du gel se former, ce qui aurait été étonnant pour un mois de mars en temps normal. Mais les temps étaient loin d'être normaux depuis le retour du Seigneur des Ténèbres, et surtout depuis la chute du Ministère de la Magie. Les détraqueurs circulaient librement, les né-moldus étaient arrêtés et privés de droits, les opposants au régime étaient éliminés, et les plus grands tueurs connus en ce monde n'étaient plus entre les murs d'Azkaban.
La femme sentit un frisson lui parcourir l'échine. Cela faisait plus de trois mois qu'elle avait été séparée de Teddy. Il n'avait pu lui envoyer que deux lettres pour lui assurer qu'il allait bien, et la dernière datait déjà de plusieurs semaines. Les yeux perdus dans le vague, elle porta machinalement sa tasse de thé à ses lèvres, d'une main tremblante. Puis, elle jeta un coup d'œil à travers la pièce, et ses yeux se posèrent sur la radio de son époux. Chaque jour, à la même heure, elle l'allumait pour écouter Potterveille et s'assurer que le nom de son époux n'était mentionné parmi la liste des disparus.
La sorcière tourna la tête vers l'horloge. Dix-huit heure. Elle sentit son ventre se nouer, et se leva doucement de son fauteuil pour aller allumer la radio. Elle prononça le mot de passe « Albus », et la machine se mit automatiquement sur la chaine clandestine.

- ...nous vous présentons nos excuses pour avoir été momentanément absents des ondes en raison de visites que nous ont rendus quelques charmants mangemorts. N'ayez crainte, nous avons maintenant trouvé un endroit sûr, et j'ai le plaisir de vous annoncer que deux de nos collaborateurs se sont joints à moi, ce soir. Bonsoir les amis !

Les dénommés «Royal» et «Romulus» (qu'Andromeda savait être en réalité Kingsley et Rémus) répondirent à l'animateur. La femme, en même temps qu'elle écoutait, regardait d'un air distrait par la fenêtre qui donnait sur son petit jardin. Un petit oiseau gris s'était perché sur une branche de son pommier.

- ...allons consacrer quelques instants à vous parler des morts que Sorcellerie-Info et La Gazette du Sorcier n'ont pas jugées suffisamment importantes pour les mentionner...

Comme à chaque fois, Andromeda sentit les battements de son cœur accélérer. Sans s'en rendre compte, elle suspendit son souffle. Soudain, il lui sembla que le monde venait de s'arrêter. Seuls résonnaient dans ses oreilles le rythme de son cœur. C'est à peine si elle entendit la phrase que venait de prononcer le garçon à la radio. La voix lui semblait si lointaine, si irréelle.

- C'est avec beaucoup de tristesse que nous informons nos auditeurs des meurtres de Ted Tonks et de Dirk Cresswell.

Andromeda ne sentit même pas ses genoux ployer tout à coup sous son poids. Elle tomba à terre, les yeux écarquillés par l'horreur et la surprise, et resta longtemps immobile, incapable du moindre mouvement, haletante. Puis, peu à peu, elle fut ramenée à la réalité, et elle la sentit. Elle sentit la douleur la plus atroce au monde, pire que la torture la plus abominable, et un hurlement d'effroi sortit de sa gorge sans qu'elle ne puisse le retenir.

Ted était mort. Elle était seule, désormais.

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....non c'est faux, je ne pleure pas. Que racontez vous?

Je publie enfin ce chapitre, j'espère qu'il vous a plu. Je vais essayer d'être plus productive que ces dernières semaines dans les jours à venir...
De toute façon, nous approchons de la fin. Je ne sais pas si je continuerai à écrire après cela. J'ai plein d'idées mais je ne suis pas réellement certaine de leur valeur. Enfin bon... j'espère que, jusque là, vous appréciez mes histoires.

Par ailleurs, je vous souhaite un bon début d'année scolaire, si vous êtes toujours à l'école. Sinon, j'espère simplement que vous allez bien.

xx
Altaïr.

A Black Tale II : the Dark Lord ascendingΌπου ζουν οι ιστορίες. Ανακάλυψε τώρα