La tour d'astronomie.

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30 juin 1997, École de sorcellerie Poudlard, Écosse.


La nuit tombait sur le Château où des centaines de jeunes sorciers avaient dores et déjà gagné leurs dortoirs pour passer une nuit paisible. Le silence régnait chez les Serpentards, et la plupart des garçons étaient endormis quand Draco se leva discrètement. Deux jours auparavant, il avait donné à madame Rosmerta, la propriétaire du pub « les Trois Balais », une pièce enchantée. Cette pièce, liée à une seconde que Draco avait conservée, devait se mettre à chauffer dès qu'elle apercevait Dumbledore quitter l'école. Cette pièce, dans la poche du jeune Malefoy, venir de devenir subitement brûlante.

L'air grave, il resta un moment assis au bord de son lit, la gorge nouée, le regard perdu dans le vide. Lentement, il se leva, récupéra sa baguette en bois d'aubépine, et sortit du dortoir. Un feu dansait encore dans l'imposante cheminée au manteau de marbre noir de la Salle Commune. En face, dans un fauteuil de cuir, une élève lisait un livre.
Draco se figea quand il la vit. Pansy devait l'avoir entendu, car elle tourna la tête en sa direction. Ils ne s'étaient pas vraiment adressé la parole depuis leur dernière dispute, aussi les deux étaient quelque peu gênés de se retrouver seuls l'un devant l'autre.

- Salut, finit par dire Pansy avec un sourire timide.

Draco lui adressa un geste de la tête. Le temps pressait.

- Promenade nocturne ? demanda la fille.

Draco acquiesça. Il était si nerveux que parler lui semblait impossible. Il allait quitter la pièce quand il s'arrêta, et soupira. Pansy l'observait toujours, et il finit par se tourner vers elle.

- Évite de sortir de la Salle Commune ce soir, dit-il d'une voix blanche.

Pansy ouvrit la bouche pour dire quelque chose, puis se ravisa. Un air d'incompréhension marquait encore son visage, mais elle se contenta d'hocher la tête. Draco la regarda une seconde de plus, puis tourna les talons. Le temps était venu.

Dans les couloirs, des aurors et des membres de l'Ordre du Phénix patrouillaient. Draco dut faire preuve d'une immense discrétion pour ne pas se faire prendre. Il fut soulagé quand il entra enfin dans la Salle sur Demande. Là, il se précipita vers l'armoire à disparaître, qu'il avait cachée sous un épais tissu qu'il fit tomber. Haletant, il saisit le premier objet qu'il vit et le plaça à l'intérieur. Quand le livre qu'il venait de prendre arriverait chez Barjow et Beurk, alors les mangemorts sauraient ce qu'ils auraient à faire.

Draco referma la porte sur le livre et ferma les yeux.

- Harmonia nectere passus.


****


Allée des Embrumes, Londres.


Le visage dissimulé derrière le large capuchon de sa cape sombre, Bellatrix avançait d'un pas décidé vers le magasin de Barjow et Beurk. Derrière elle, les Carrow, Greyback, Gibbon, Yaxley et Rowle suivaient.
Tous les commerces étaient fermés à cette heure tardive. Seul la boutique où les mangemorts se rendaient était encore allumée. Bellatrix entra la première, faisant sonner la clochette accrochée à la porte. Barjow apparut, et son air soucieux se transforma en air de pure terreur lorsqu'il vit la main droite de Voldemort et le loup garou le plus féroce d'Angleterre.

- Madame Lestrange, sussura le vendeur.
- Où est-elle ? demanda Bellatrix d'une voix cassante.
- Par là, répondit Fenrir.

Il passa devant la sorcière et se dirigea vers le fond de la boutique où attendait une vieille armoire à disparaître. Barjow suivit le groupe, le dos courbé, le souffle court. Un large sourire se dessina sur les lèvres de Bellatrix tandis qu'elle contemplait le mystérieux objet.

- Vous êtes sûr qu'elle fonctionne ? demanda Alecto derrière.
- Oui, répondit Greyback. Allez, il n'y a pas de temps à perdre. Les femmes d'abord, dit le loup garou en lançant un sourire carnier à Bellatrix.


****


École de sorcellerie Poudlard, Écosse.


Ce fut le bruit des talons de Bellatrix que Draco entendit d'abord. Puis, la porte de l'armoire s'ouvrit en grinçant, et la mangemort la plus dangereuse du pays apparut avec un grand sourire, suivie de six autres individus.

- Bon travail, Draco, dit-elle d'une voix mielleuse en ébouriffant les cheveux ternes du garçon à l'air soucieux.

En file indienne, les soldats du Seigneur des Ténèbres traversèrent la Salle sur Demande. Bellatrix observait d'un regard curieux les montagnes d'objets autour d'elle. Elle n'était jamais entrée dans cette salle auparavant. Avant qu'ils n'en sortent, Draco s'arrêta et se racla la gorge.

- Il y a des aurors et des alliés de Dumbledore qui patrouillent dans les couloirs. Il faudra que vous vous en occupiez pendant que je monte dans le bureau du directeur. Il est parti pour l'instant, mais c'est là qu'il ira quand il reviendra. Si vous croisez des élèves, évitez de...
- C'est bon, c'est bon, Draco, on a compris, coupa Bellatrix d'une voix cassante. On tue à portée de vue. Il faut y aller, le Seigneur des Ténèbres a assez attendu.

Ce fut la sorcière qui prit la tête du groupe cette fois. Elle sortit de la pièce, mais tomba nez-à-nez avec trois individus qu'elle reconnut aussitôt. Ils faisaient tous partie du groupe qui avait accompagné Potter au Département des Mystères. En voyant Neville, Ron et Ginny, Draco sentit son cœur s'arrêter. Avant que Bellatrix n'ait pu attaquer, il sortit un sachet de poudre d'obscurité instantanée et en lança une bonne quantité dans les airs. Le couloir fut alors plongé dans le noir total, et Draco utilisa sa main de la gloire afin de guider les mangemorts à travers les couloirs et sortir de ce nuage de fumée aussi sombre que la nuit la plus ténébreuse.

Quand ils furent à nouveau dans la lumière, Bellatrix reprit son rôle de leader et marcha droit vers l'aile du Château où se trouvait le bureau d'Albus. Il ne fallut pas longtemps aux mangemorts pour qu'ils rencontrent leurs premiers opposants. Draco regarda sa tante lancer un puissant sortilège d'explosion à un auror qui venait de les apercevoir, et rapidement, d'autres arrivèrent. Le garçon restait en retrait, évitant soigneusement de se mettre au milieu des jets de lumières qui fusaient de tous les côtés.

Bellatrix, sans grande surprise, était celle qui faisait tomber le plus d'adversaire. Elle les maintenait aisément à une distance respectable, permettant ainsi au groupe de progresser. Ils arrivèrent au niveau de la Grande Salle, où plus d'aurors se trouvaient. Puis, ce fut au tour des membres de l'Ordre de surgir et de prendre part au combat. Draco reconnut sa cousine, Nymphadora Tonks, qui livrait un duel acharné contre Yaxley. Non loin, Bellatrix menait une danse macabre, et semblait prendre un malin plaisir à lancer des attaques d'une agressivité totale à son ancien professeur de sortilège, Flitwick. Elle réussit à le mettre à terre, le professeur tombant, à moitié inconscient, sur le sol froid de Poudlard. Bellatrix se rua alors vers une fenêtre ouverte, et l'incantation qu'elle lança ressemblait à un hurlement de joie lorsqu'elle fit apparaître la Marque des Ténèbres dans le ciel.

Dumbledore arriverait d'une minute à l'autre désormais. Draco profita du spectacle sinistre donné par sa tante pour s'éclipser sans être remarqué.
Les couloirs étaient sombres. Derrière lui, les éclats de voix et les détonations des sortilèges résonnaient encore. Draco continua son chemin d'un pas déterminé, le cœur lourd, vers le bureau de Dumbledore. Bientôt, il n'entendit plus le bruit des combats, et à mesure qu'il s'approchait de la grande gargouille d'or qui protégeait l'entrée du bureau, autre chose lui parvint aux oreilles. C'était une voix, une voix qu'il reconnut immédiatement et qui venait de la tour d'astronomie.

- Fais-moi confiance...

Le jeune Malefoy atteint enfin l'escalier de fer qui menait au dernier étage de la tour dont provenaient la voix rauque d'Albus Dumbledore. Il gravit précipitamment les marches et ouvrit la porte qui donnait accès à la pièce circulaire d'un coup de pied.

- Bonsoir Draco, dit le vieil homme qui se tenait aux rambardes du balcon. Qu'est-ce qui t'amène ici, en cette belle soirée de printemps ?
- Qui d'autre est ici ? Je vous ai entendu parler, dit sèchement Draco d'une voix tremblante.
- Oh, je me parle souvent à moi-même...répondit doucement Dumbledore. Je trouve cela extraordinairement utile. Et toi Draco... tu t'es murmuré des choses ?

Draco resta immobile devant le directeur de Poudlard, baguette tendue droit devant lui, une expression douloureuse peinte sur son visage. Ses lèvres étaient sèches, sa gorge était nouée, son souffle était saccadé. Dumbledore, lui, était très mal en point, et semblait avoir du mal à rester debout. Il avait un teint grisâtre, des cernes violettes, l'une de ses mains était comme atrophiée et noircie. Malgré cela, il regardait l'élève devant lui avec une grande bienveillance.

- Draco... tu n'es pas un meurtrier, dit Dumbledore d'une voix douce.
- Comment savez-vous ce que je suis ? J'ai fait des choses qui vous feraient frémir, répliqua Draco en ajustant sa poigne sur sa baguette toujours levée vers l'homme, sans cependant faire le moindre geste pour l'attaquer.
- Oh comme jeter un sort à Katie Bell en espérant qu'elle me remettrait un collier ensorcelé ? Ou remplacer une bouteille d'hydromel par du poison ? Excuse-moi, Draco, mais je ne peux m'empêcher de penser devant des tentatives aussi vaines que tu n'y as pas vraiment mis tout ton cœur.
- Il me fait confiance ! hurla Draco sur un ton qui frôlait la démence, levant en même temps la manche qui couvrait son avant-bras gauche pour prouver ce qu'il avançait. Il m'a choisi !

Le regard de Dumbledore se posa sur la Marque rouge vif qui ornait le membre du garçon, et une ombre traversa son visage. Quand ses yeux rencontrèrent à nouveau ceux du garçon, ils semblaient refléter une profonde pitié.

- Alors je vais te faciliter la tâche, dit Dumbledure avec amertume en levant sa baguette.
- Expelliarmus ! s'empressa de crier Draco.
- Excellent, excellent...

La voix du vieil homme était si faible désormais...
Au même moment, des bruits de pas se firent entendre en bas des escaliers de fer, et un gloussement monta jusqu'aux oreilles de Draco dont la nervosité grandit d'un seul coup.

- Tu n'es pas seul, constata Dumbledore. Il y en a d'autres... Comment ?

Draco leva le menton, et sa voix se stabilisa alors qu'il retrouvait un peu d'aplomb.

- L'armoire à disparaître, dans la Salle sur Demande, dit-il non peu fier. Je l'ai réparée.
- Laisse-moi deviner, dit Dumbledore qui semblait réellement impressionné par l'ingéniosité de son élève, elle a une sœur ? une jumelle ?
- Chez Barjow et Beurk, répondit automatiquement Draco. Ça forme un passage.
- Astucieux ! dit Dumbledore alors qu'un rictus de douleur traversait son visage et qu'il s'affaissait un peu plus.

Draco sentit son cœur se serrer, mais maintint sa garde et son regard froid braqué sur le vieillard. Les pas plus bas se rapprochaient...

- Draco... autrefois j'ai connu un garçon qui a fait tous les mauvais choix possibles... s'il te plait, laisse-moi t'aider...
- Non, vous ne le pouvez pas, répliqua Draco, la main qui tenait sa baguette secouée d'intenses tremblements. Personne ne le peut ! Il m'a ordonné de le faire, sinon il me tuera ! Et il tuera toute ma famille !
- Je mesure la difficulté de ta position, dit Dumbledore. Pourquoi donc crois-tu que je n'ai pas essayé de t'arrêter plus tôt ? Parce que je savais que tu aurais été tué si Lord Voldemort s'était rendu compte que je te soupçonnais.

Draco eut une grimace en entendant prononcer le nom.

- Je n'ai pas voulu te parler de la mission qu'il t'avait confiée et donc j'étais au courant, de peur qu'il se serve contre toi de la legilimancie, poursuivit le vieil homme. Mais maintenant, au moins, nous pouvons dialoguer sans détour... Aucun mal n'a été fait, tu n'as blessé personne, bien que tu aies eu de la chance que tes victimes imprévues aient survécu... Je peux t'aider, Draco.
- Non, vous ne le pouvez pas, je n'ai aucune option ! répéta le jeune homme dans un cri déséspéré.
- Rejoins le bon camp, Draco, et nous te cacherons mieux que tu ne saurais l'imaginer. En plus, je peux envoyer des membres de l'Ordre chercher ta mère dès ce soir pour la cacher aussi. Actuellement, ton père est en sécurité à Azkaban... Le moment venu, nous pourrons le protéger à son tour... Passe du bon côté, Draco... tu n'es pas un meurtrier...

Il y eut un court instant de silence alors. Les deux individus continuaient de se faire face, et de se fixer du regard.

- Je suis arrivé jusqu'ici, non ? dit lentement le jeune Malefoy. Ils pensaient que je ne sortirai pas vivant de ma tentative, mais je suis là...et vous, vous êtes à ma merci...
- Non, Draco, répondit calmement Dumbledore à voix basse. C'est ma merci qui compte à présent, pas la tienne...

Soudain, un martèlement de pas retentit en haut de l'escalier, et des silhouettes sombres ne tardèrent pas à faire irruption dans la pièce. Draco sembla alors se liquéfier sur place. Dumbledore, qui avait gardé son calme, regardait une femme brune s'approcher en lui lançant un regard maléfique, un large sourire aux lèvres.

- Tiens, tiens...regardez ce que nous avons là, dit Bellatrix en passant le bout de sa langue sur ses lèvres alors qu'elle rejoignait son neveu. Bien joué, Draco, susurra-t-elle ensuite à l'oreille du garçon.
- Bonsoir, Bellatrix, dit Dumbledore en regardant un à un les nouveaux venus. Je crois que des présentations s'imposent, non ?
- J'aimerais bien, Albus, répondit la brune. Malheureusement, nous sommes tous un peu pressés.

Tout à coup, elle se tourna vers Draco qui sursauta dès qu'elle posa les yeux sur lui.

- Fais-le ! siffla la sorcière. Ce moment t'appartient... Fais-le !

Le garçon était secoué de tremblements désormais. Ses yeux étaient embués de larmes, et ses dents étaient serrés. Pourtant, malgré la pression de Bellatrix, il n'attaquait toujours pas.

- Allez... FAIS-LE ! TUE-LE !
- Non.

Tous les mangemorts se retournèrent alors vers l'homme qui venait d'apparaître derrière Draco. Un air méprisant se dessina sur les traits de Bellatrix lorsqu'elle vit Severus Rogue s'approcher. On en pouvait entendre que la brise s'engouffrer entre les murs de la tour d'astronomie à ce moment, si l'on ne prêtait pas attention à la respiration haletante de la mangemort qui bouillait de rage.

- Severus... dit Dumbledore dans un souffle faible. Aidez-moi...

Rogue demeura impassible et, doucement, d'un geste sûr et parfaitement maîtrisé, leva sa baguette.

- Avada kedavra.

Le corps d'Albus Dumbledore sembla basculer au ralentis par dessus la rambarde lorsque l'éclair de jade vint le frapper. Draco eut l'impression que son cœur venait de s'arrêter de battre, que le temps s'était figé. Tout devenait flou, et le cri de joie de sa tante ne lui parvint que de manière distante avant qu'il ne sente qu'on l'attrapait par la manche pour l'entrainer hors de la salle.
Albus Dumbledore était mort. Severus Rogue l'avait achevé. Draco Malefoy avait échoué.

A Black Tale II : the Dark Lord ascendingOpowieści tętniące życiem. Odkryj je teraz