Draco Malefoy

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12 avril 1996, Manoir Malefoy, Wiltshire.


- Bella ?

Bellatrix reposa sa dague qu'elle venait d'affuter, et alla ouvrir la porte de sa chambre à sa sœur.

- Oui ?
- Lucius et moi allons chercher Draco à King's Cross.
- Oh...ok. Bon voyage.
- Y a-t-il quelque chose que nous pouvons te prendre en chemin ?
- Euh... mes stocks de potion s'amenuisent donc...si tu pouvais...
- Pas de soucis. Autre chose ?
- Du whisky.
- Ah...euh...d'accord. Très bien. Bon et bien... nous allons y aller. À plus tard.
- À tout à l'heure.

Narcissa fit demi tour et alla rejoindre Lucius qui l'attendait déjà dehors. Bellatrix resta au pas de sa porte, l'air grave. Narcissa lui avait dit que Draco n'était pas au service du Seigneur des Ténèbres, et qu'elle ne comptait pas qu'il devienne un jour mangemort. Bellatrix était très réticente à l'idée de rencontrer le garçon. S'il était comme son père, cela risquait d'être compliqué entre eux. Mais, après tout, il était encore jeune, et donc malléable. Avec un peu de volonté, Bellatrix pourrait en faire ce qu'elle voudrait. Et de la volonté, la mangemort n'avait que cela en réserve.

Bellatrix jeta un coup d'œil à la porte à quelques mètres de sa suite. Derrière, il y avait les appartements du Seigneur des Ténèbres. Il n'en sortait presque jamais. Bellatrix se demandait même s'il prenait la peine de manger tant il était rare de le croiser. Lord Voldemort n'avait jamais déjeuné ou dîné avec les Malefoy. Cela serait bien trop familier. Et puis, avec ce nouveau corps qui était le sien, peut-être qu'il s'était débarrassé de la nécessité de répondre aux besoins primaires. La nourriture, le sommeil, peut-être que tout cela n'était que superflu pour lui désormais. Bellatrix avait remarqué de nombreux changements chez son Maître ces derniers mois. Pas seulement physiques, mais aussi dans ses habitudes. Il était à la fois infiniment plus calme, mais aussi bien plus effrayant. Lorsqu'il s'énervait, c'était avec la force d'un ouragan. Bien souvent, lors de ses accès de rage, un pauvre malheureux perdait la vie, ou l'une de ses facultés s'il était chanceux. Son ton était presque toujours menaçant, même lorsque sa voix était doucereuse. Il se déplaçait comme s'il n'était qu'un spectre porté par le vent, avec une fluidité et une majesté infinie. Et, aussi, il se déplaçait pieds nus. Cela avait d'abord étonné Bellatrix, mais elle avait fini par s'y faire. D'une certaine manière, Lord Voldemort n'était plus humain.
C'était de notoriété publique désormais que le mage noir était immortel. D'une façon qui était inconnue de tous, il avait réussi à aller au-delà des limites de la vie et de la mort. Peut-être était-ce dans sa quête de la vie éternelle qu'il avait abandonné son apparence mortelle pour devenir la créature fascinante qu'il était aujourd'hui. Bellatrix n'avait pas de réelles réponses à ses questions, simplement des hypothèses. La vérité ne l'intéressait pas, car elle savait pertinemment que les affaires de son Maître n'étaient pas les siennes. Mieux valait-il ne pas s'interroger trop longuement sur tous ces changements. Un jour, peut-être, Lord Voldemort lui partagera ses secrets. Pour le moment, Bellatrix devait se contenter d'obéir afin que, lorsque son Maître serait au pouvoir, elle puisse continuer à être à ses côtés.

C'était son plus grand rêve.

Il serait le Maître du Monde, et elle, elle serait sa meilleure lieutenante. Ensemble, ils feraient de grandes choses.

Alors qu'elle s'apprêtait à retourner à l'intérieur de sa chambre, elle entendit une porte grincer au bout du couloir. Elle se figea, et vit une ombre se détacher. Puis, elle entendit le sifflement de Nagini, et retint son souffle.

- Maître...
- Te serais-tu perdue, Bellatrix ? dit Lord Voldemort.
- Non, non, je...je retournais dans ma chambre, balbutia la mangemort.

Voldemort s'approcha d'elle, prit délicatement son visage dans sa main, et l'observa avec attention.

- Tu as meilleure mine, dit-il d'une voix aigüe.

C'était un euphémisme. Bellatrix avait retrouvé sa beauté d'antan et tout le monde l'avait remarqué.

- Merci, Maître, répondit la brune dans un souffle.
- J'ose espérer que tu t'es entrainée ces dernières semaines, dit le mage noir en relâchant le visage de sa servante.
- Bien sûr. Lucius s'est porté volontaire pour me combattre en duel plusieurs fois.
- Et ?
- Et je l'ai écrasé chaque fois, mon Seigneur, répondit Bellatrix avec un sourire narquois.

Lord Voldemort demeura impassible, mais Bellatrix crut déceler une lueur amusée dans ses yeux rouges.

- Pourquoi ne pas combattre quelqu'un plus proche de ton niveau ? dit-il d'une voix froide.

Bellatrix baissa les yeux.

- Rodulphus et moi ne sommes pas en excellent termes, Maître.
- Je ne pensais pas à Lestrange.

La sorcière leva de grands yeux vers son Maître. Il était si grand désormais, et elle se sentait minuscule face à lui.

- Retrouve-moi dans le jardin, samedi soir, 21h.

Bellatrix, bouche-bée, regarda le Seigneur des Ténèbres s'éloigner, suivi de Nagini qui rampait derrière lui. Pendant des mois, le mage noir n'avait pas prêté attention à sa servante. Et aujourd'hui, il s'engageait à l'entrainer aux duels, comme il l'avait fait autrefois. Bellatrix sentit des larmes de gratitude lui monter aux yeux. Vingt-six ans plus tard, les cours particuliers reprenaient.


****


Bellatrix entendit du monde s'afférer dans le hall d'entrée, et se dépêcha de descendre les escaliers pour aller voir. Quand elle arriva au bas des marches, elle ralentit l'allure, puis s'immobilisa et regarda le spectacle. Les Malefoy ne l'avaient pas encore vue, mais elle pouvait les observer d'un œil amusé.

- Pourquoi n'avons-nous toujours pas d'elfe de maison ? demanda un jeune homme aux cheveux blonds qui était visiblement exaspérer à l'idée de monter lui-même ses propres valises. Locomotor.

La malle du garçon se mit à flotter derrière lui, et il se dirigea vers les escaliers. Tout à coup, il s'arrêta net, et eut un mouvement de recul. Il venait de voir Bellatrix, qui avait descendu les dernières marches.

- Bonjour Draco, dit-elle avec un sourire malicieux.

L'adolescent lança un regard peu rassuré à sa mère, et Narcissa lui fit un sourire encourageant. Il tendit alors la main à Bellatrix, qui la lui serra.

- Bonjour, répondit-il.
- Tu te rappelles de moi ?

Draco fit non de la tête.

- Hmm. Je l'imaginais plus loquace, ce petit, dit Bellatrix en s'adressant à sa sœur. J'imagine que maman t'a appris à ne pas parler aux inconnus, c'est ça mon garçon ?

Devant le malaise évident de son fils face à sa sœur aînée, Narcissa se dévoua pour proposer du thé. Les deux acceptèrent, et Bellatrix se dirigea vers le salon en riant. Draco, lui, semblait terrorisé. Lucius les suivis, sceptique. Il méprisait de toute évidence sa belle-sœur, qui paraissait encore plus détraquée qu'avant.

Tous prirent place autour de la table du salon. Assise nonchalamment sur sa chaise, Bellatrix fixait Draco avec un large sourire. Droit comme un pique, Draco jetait des coups d'œil nerveux autour de lui, prenant soin de ne pas croiser le regard de sa tante. Narcissa amena le thé, et brisa le silence embarrassant qui s'était installé.

- Draco, pourquoi ne racontes-tu pas à ta tante ce qui se passe en ce moment à Poudlard ?

L'adolescent lança un regard désemparé à sa mère, puis se décida à parler.

- On a une nouvelle professeure de Défense contre les Forces du Mal, dit-il. Elle s'appelle Dolores Ombrage, c'est une employée du Ministère. Elle prétend qu'elle descend des Selwyn, mais tout le monde sait que c'est une sale sang-mêlée.

Le sourire de Bellatrix s'élargit un peu plus lorsqu'elle entendit ses mots. Draco sembla alors se sentir plus en confiance, et se détendit un peu.

- Elle est médiocre, mais au moins elle règle leurs comptes à Potter et ses misérables amis.
- Oh...vraiment ? demanda Bellatrix en se penchant un peu plus vers son neveu, redoublant d'attention.
- Potter a été envoyé en retenue dès le début. Elle a été nommée Grande Inquisitrice de Poudlard, et a créé la brigade inquisitoriale pour ramener l'ordre. J'ai été sélectionné pour en faire partie.
- Pour ramener l'ordre ? demanda la mangemort, suspicieuse.
- Potter a formé une sorte de club avec plusieurs élèves, ils l'appellent l'armée de Dumbledore. Les rassemblements ont été interdits, donc quand on a réussi à les avoir, le club a été dissout.
- L'armée de Dumbledore ? répéta Bellatrix à voix basse.

Cette organisation ressemblait étrangement aux débuts du groupe de résistants qui s'était formé à la fin des années 70. Potter était-il en train de s'inspirer de ses sales rats de parent pour former un nouvel Ordre du Phénix ?

- Oui, on est certains que c'est ce vieux fou d'Albus qui leur a dit de s'entraîner. Ils pensent qu'ils ont une chance. Dumbledore a été renvoyé pour ça, c'est Ombrage qui a pris sa place. De toute façon, ça fait des années que père et moi sommes d'accord pour dire que Dumbledore doit partir. Il aurait dû aller à Azkaban, mais il s'est enfui comme un lâche.
- Enfui ? siffla Bellatrix. Mais enfui où ?
- Ben, on l'ignore, répondit Draco en regardant sa tante comme si elle était née de la dernière pluie.

Lucius ricana.

- Peu importe où il est, tant qu'il n'est pas à Poudlard. J'ai toujours dit qu'Albus était un danger public, dit Malefoy. Nous sommes enfin débarrassés de lui, l'heure est aux réjouissances, et non à l'inquiétude, Bellatrix.
- Personne t'a sonné Lucius, cingla la mangemort.
- Je t'interdis de me parler ainsi sous mon propre...
- Je m'adresserai à toi comme il me plait, et tu ne vas rien dire, et ne rien faire, le coupa sèchement Bellatrix. Voilà, parfait. Comme il fait bon, quand tu te tais...

Draco regardait Bellatrix avec des yeux écarquillés par le choc. Personne n'avait jamais osé s'adresser ainsi à son père devant lui.

- Bon... merci Draco pour ces informations, dit la sorcière. Si tu te rappelles d'un détail que tu aurais omis, n'hésite pas à le partager avec ta chère tante. Sur ce, je quitte cette table. Trop de mauvaises ondes.

Alors qu'elle se leva, elle entendit Lucius marmonner « c'est toi la source de mauvaises ondes ici », et elle se retourna immédiatement vers lui.

- Pardon ?
- Rien. Tu dois entendre des voix, répondit Lucius en lui lançant un regard hautain.

Bellatrix plissa les yeux, sourit, puis retourna à ses appartements jusqu'à la tombée de la nuit.


****

Lorsque Bellatrix alla dans le jardin avec quelques minutes d'avance le lendemain, les lieux étaient déserts. Elle s'assit alors dans l'herbe, et laissa la brise caresser sa nuque. Le ciel était dégagé, et on pouvait voir les étoiles scintiller dans la nuit. La sorcière connaissait le nom de chaque constellation, et pouvait toutes les distinguer. Même si sa mémoire avait été altérée par les visites des détraqueurs, elle se souvenait avec précision de la façon dont son père lui avait enseigné l'astrologie. « Un sorcier qui ne connaît pas les étoiles, c'est un sorcier médiocre », disait-il.

- Tu devrais être moins dure avec Lucius, fit une voix derrière elle. Vous allez être amenés à travailler ensemble dans très peu de temps.

Bellatrix se leva, le cœur battant.

- Si c'est ce que vous m'ordonnez, Maître, alors je serai la belle-sœur la plus agréable du Monde.
- Contente-toi d'être cordiale avec lui. Je veux que mes troupes puissent être efficaces, et cela ne sera pas le cas si mes mangemorts s'appliquent à se détruire mutuellement.

Bellatrix baissa la tête.

- Mais nous ne sommes pas là pour parler de ta relation avec Malefoy, ajouta Lord Voldemort d'une voix froide. Es-tu prête ?

Sa servante leva des yeux brillants d'excitation vers lui.

- Oui, répondit-elle avec un sourire.
- Bien. En garde.

Bellatrix se mit aussitôt en position d'attaque. Les deux sorciers se faisaient face dans un silence total.

- Oh et... les Impardonnables sont naturellement autorisés, dit Voldemort avec un sourire sombre.

Bellatrix devint livide. L'autorisait-il à utiliser les sortilèges interdits, où la prévenait-il qu'il n'hésiterait pas à les utiliser sur elle ? La mangemort déglutit. Sûrement les deux.
Le Seigneur des Ténèbres et sa mangemort se saluèrent, comme l'exigeait la tradition, puis le duel commença.

Avant qu'elle n'ait pu jeter le moindre maléfice, un jet de lumière verte vint frôler son épaule.

- Allons, Bella, la tenta le mage noir. Je t'ai connue plus active.
- Everte Statum !

Lord Voldemort para le coup avec une facilité déconcertante. Bellatrix enchaina les sortilèges avec une rapidité fulgurante. Diffindo, confringo, incarcerem, bombarda maxima... aucun n'atteint sa cible. Le Seigneur des Ténèbres était intouchable.
Il resta un moment sur la défensive, puis attaqua de nouveau. Bellatrix contra trois de ses sortilèges de façon admirable, mais fut touchée de plein fouet par le quatrième qui, fort heureusement, n'était pas mortel. La mangemort fut projetée au sol, et sentit une douleur fulgurante lui déchirer les entrailles. C'était comme si l'intérieur de son corps était coupé de mille lames. Voldemort n'avait même pas eu besoin de prononcer l'incantation du maléfice, et Bellatrix n'en était que plus impressionnée. Son Maître n'était pas le mage noir le plus puissant du monde pour rien.

- Debout, Bellatrix, siffla le sorcier.

La mangemort obéit instantanément, et se jeta sur ses deux jambes avant de lancer presque aussitôt une énième attaque. Cette fois-ci, elle était restée muette, et comme Voldemort n'avait pas accès à son esprit, il ne sut pas ce qui l'attendait. Un immense dragon de feu sortit de la baguette de Bellatrix et fondit sur son Maître qui disparut dans les flammes. Mais le mage noir ne resta prisonnier qu'un court instant du feudeymon créé par sa servante, et eut tôt fait de le transformer en un immense serpent d'eau qui s'écrasa sur Bellatrix, lui coupant la respiration et l'assommant à moitié.

Le duel dura longtemps, et ne cessa que lorsque la mangemort se retrouva incapable de faire le moindre mouvement. Au bout de quarante minutes, Bellatrix était en sang, drainée de ses forces. Face à elle, Voldemort n'avait reçu que quelques blessures superficielles, même si son épaule droite présentait une large plaie sanguinolente et qu'il avait été touché quelques minutes auparavant par un sortilège de torture que Bellatrix n'avait osé tenir que quelques secondes.
Au bord de l'évanouissement, la mangemort était allongée à terre de tout son long. Il lui était impossible de faire le moindre mouvement. Lord Voldemort s'approcha d'elle, et s'accroupit à ses côtés.

- La jeune femme que j'ai laissée derrière moi en 1981 n'a pas perdu une once de ses talents, dit-il à voix basse.

Bellatrix voulu le remercier, mais ce fut un râle étrange qui sortit de sa bouche à la place.

- Lève-toi.

La sorcière remarqua à cet instant que son corps était devenu plus léger, et que la douleur était partie. Son Maître l'avait ensorcelée. Elle put alors se lever, et lui faire face.

- Lorsque vous irez au Ministère, Potter ne sera sûrement pas seul. Tu pourras tuer tous ses amis si tu le souhaites, mais laisse Lucius s'occuper de la prophétie. Tu es un redoutable soldat, mais Malefoy est un diplomate. Suis ses instructions, et revenez avec ma prophétie.
- Bien, Maître.

Lord Voldemort considéra un instant sa servante, et fit un geste imperceptible vers elle, puis se ravisa.

- Va te reposer. Je suis sûr que Draco ne voudrait pas avoir à faire avec une tante épuisée à son réveil.

Bellatrix fit une révérence, et quitta son Maître à contrecœur. Alors qu'elle se dirigeait vers le Manoir, elle sentit son regard sur elle. Malgré cela, elle n'osa pas faire demi tour, et continua son chemin.

A Black Tale II : the Dark Lord ascendingWhere stories live. Discover now