Chapitre 49

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Milan,

Qu'est-ce que tout cela signifie ? Pourquoi toutes ces photos de moi, de nous ? J'ai peur. Si peur de ce qui m'attend.

Ema

-Ema...

La voix de Milan me fait sursauter. Je lève le visage, le regard hagard, la peur au ventre.

-Ces photos... c'est...

-C'est flippant. Carrément flippant même. Ema, on doit aller voir la police tout de suite.

Mes pensées bourdonnent dans ma tête, je triture les photos dans tous les sens mais aucun doute n'est permis. Ces clichés nous montrent vivant une vie dont je ne me souviens que brièvement mais que quelqu'un surveillait de loin. Des dizaines et des dizaines d'images glissent entre mes doigts. On nous voit au fil des années, tantôt faisant les courses, tantôt en compagnie d'autres jeunes de notre âge.

-Tu m'entends Em' ? On doit aller voir la police.

Ces gens nous ont suivis, ont guetté le moindre de nos mouvements. Une ombre a toujours plané sur nous.

-Em', réponds-moi !

-Hein ? Quoi ?

-On doit aller voir la police. Ces photos prouvent que ces tarés vous surveillaient, ton frère et toi.

-Oui, oui tu as raison mais...

-Il n'y a pas de mais. On arrête de jouer aux justiciers maintenant ! C'est trop grave. Cette histoire est trop grave.

-Je veux juste rentrer et regarder tout ce que contient ce dossier. Ensuite, on ira voir les flics.

Milan acquiesce de mauvaise grâce en me reprenant le dossier des mains. Je m'engage à nouveau sur le périphérique, le cerveau complètement amorphe. A peine arrivés chez lui, nous étalons à la hâte le contenu de la chemise cartonnée. A côté du tas impressionnant de photos s'exhibent des papiers que je n'ai jamais vus. Un document imprimé où est inscrit le nom de ma mère ainsi qu'une liste de dates et de sommes. On dirait un relevé de dons ou un truc du genre. Et douze autres documents de la sorte, tous imprimés recto-verso. Le total astronomique noté sur la dernière page me donne le tournis.

Le reste n'est qu'un charabia de pseudo-naturopathes, un amoncellement de noms de remèdes soi-disant miracles pour soigner ma mère. La liste qu'ils ont dressée est longue comme le bras. Je m'affaisse sur mon siège en soupirant.

-Je ne comprends pas Milan. Que font ces photos d'Enzo et moi dans ce dossier ?

-J'en sais rien mais ça n'augure rien de bon.

-Les relevés, les rapports de séance, les préconisations de pilules... à la rigueur, ce n'est pas surprenant, cela s'apparente à un suivi médical. Mais les photos...

Milan reste silencieux. Les plis de son front et la frayeur qui ternit son regard renforcent mon inquiétude. Il enroule son bras autour de mes hanches.

-Ils surveillaient ta mère, ça on le savait déjà. Mais ils vous surveillaient vous aussi. Et ça, ce n'est pas normal.

-Rien n'est normal dans cette histoire.

-Raison de plus pour aller voir la police.

-Demain, c'est promis.

J'épluche à nouveau longuement notre butin sans rien trouver de plus. Milan me laisse à mes tergiversations puisque les garçons l'attendent pour répéter. Seule dans la grande demeure, je ne parviens pas à penser à autre chose qu'à ces gens qui épiaient nos moindres faits et gestes. Une idée me vient soudain en tête. Putain ! Enzo est seul en Italie. Une personne mal intentionnée rode peut-être autour de lui sans qu'il le sache. Je me jette sur les clichés pour les détailler à nouveau. Les dernières photos datent du printemps. Je me détends légèrement, Enzo ne semble plus être sous surveillance.

Nos Petits Mots (Terminé)Όπου ζουν οι ιστορίες. Ανακάλυψε τώρα