Phase 2.5☞Victoria Lakes

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V I C T O R I A

J'avais du mal à contrôler le mélange d'émotions qui se bousculaient dans mon cerveau. Assise dans une des belles voitures royales qui m'accompagnait, impatience, bonne humeur, et enthousiasme se battaient, essayant de bousculer la pointe de nervosité qui tentait depuis le début de se frayer un passage. Et pourtant, celle-ci était bien présente. Je le voyais clairement à la façon dont je faisais rebondir ma jambe de haut en bas depuis le début du trajet. Qui aurait cru que ce qui m'attendait, pourtant de nature si douce, généreuse et inoffensive, pouvait provoquer autant de trépignement?

On nous avait annoncé il y a un peu moins d'une semaine, qu'un des prochains jours serait dédié à la réalisation d'une action généreuse parmi le peuple.

Je ne m'y étais pas attendue mais cela s'était révélé être une excellente surprise. Pour ma part, le choix n'avait pas été difficile à faire. Étant plus jeune, j'avais eu l'habitude avec ma mère de me rendre dans des maisons de retraite pour les personnes âgées malades pour discuter avec elles, au moins une fois par mois, quand le temps me le permettait. Jamais je n'oublierai ces sourires étincelants de gratitude sur les visages ridées des personnes avec qui j'avais discuté pendant vingt minutes, dont j'avais écouté les histoires de jeunesse glorieuses, ou à qui, tout simplement, j'avais apporté un pain au chocolat et une tasse de chocolat chaud. Rien que d'y repenser, mes yeux en devenaient brillants.

Tout naturellement, c'est dans la maison de retraite qui recelait tous ces beaux souvenirs que j'avais décidé de me rendre sans la moindre hésitation. Au plus profond de moi, j'espérais que je pourrais retrouver les mêmes personnes qu'il y a un peu plus de cinq ans et les serrer dans mes bras. Un espoir impossible certes, mais j'espérais sincèrement que de la où elles se trouvaient à présent, elles entendraient cette pensée tendre à leur égard.

La soudaine immobilisation totale de la voiture me tira de mes pensées. Nous étions arrivés. Je sortis mon simple petit sac en toile qui abritait mes affaires pour la nuit et remerciai le chauffeur, avant de me diriger vers l'entrée de la petite bâtisse. Tout cela, sous le regard perçant, curieux, et presque impoli selon moi, des caméras. Cependant, je fis bien attention de garder ces pensées pour moi.

Les portes de l'entrée coulissantes passées, c'est un visage souriant, vieilli certes, mais familier qui m'accueillit immédiatement.

- Céline !

Je me ruai dans les bras de l'infirmière.

- Ma Victoria! Comment vas-tu? me glissa-t-elle avant de m'embrasser la joue, comme elle le ferait avec sa propre petite fille.

- Je vais bien mieux. Je suis tellement contente d'être ici!

- Nous aussi, tu n'imagines pas combien on attendait ta visite avec impatience depuis le jour où on nous l'a annoncée par téléphone.

Je souris.

-Viens, je vais te montrer ta chambre pour la nuit ! Puis je vais te présenter aux patients ! Ceux qui ont encore assez de leur tête pour s'en souvenir m'en parlent tous les jours!

Céline me mena à travers les couloirs silencieux jusqu'à une petite chambre blanche toute simple où je passerais donc ma nuit. Je posai mon sac sur le lit, enlevai la jupe droite élégante que j'avais revêtue pour mon voyage pour la remplacer par un jean plus adapté à mon devoir, puis ressortis, plus que sereine après cette arrivée dans un endroit qui enfin, après des mois et des mois, m'était familier, chaleureux et porteur de plein de bons souvenirs.

- Tu es prête à rencontrer les résidents ? questionna Céline.

Je hochai la tête.

- Oui !

Tout en me guidant vers la salle commune, elle ajouta:

- Certains sont encore sûrement en train de faire la sieste, mais ne t'inquiète pas, ils ne vont pas tarder à se réveiller.

Nous entrâmes dans la pièce, où environ six ou sept personnes âgées étaient installées sur des fauteuils roulants ou assoupies sur un canapé. Au fond, deux infirmières discutaient à voix basse. Quand elles nous virent, elles se levèrent immédiatement et vinrent à notre rencontre, un grand sourire sur leur visage.

La première, dont la peau noire faisait ressortir ses yeux pétillants, me prit dans ses bras immédiatement avant de se présenter:

-Victoria. Bienvenue. Nous avons tellement entendu parler de toi !

Puis la deuxième infirmière, blonde et joliment maquillée, fit de meme tout aussi chaleureusement.

Quand tout le monde fut réveillé et que de nouveaux patients avaient commencé à arriver, je pus me présenter.

- Bonjour, déclarai-je avec un grand sourire, je m'appelle Victoria. J'ai dix-huit ans. Je suis tellement heureuse d'être là aujourd'hui et j'ai vraiment hâte de faire votre connaissance. Si vous voulez discuter, jouer à un jeu, ou tout simplement me demander un café, il ne faut surtout pas hésiter.

C'est incroyable comme je me sentais bien ici. Rien qu'à la manière pleine de confiance dont je m'étais présentée; j'avais l'impression d'être une personne différente.

***

- Tu sais, ta nuit va être mouvementée, murmura Celine, presque genée .

- Mais non, ca me fait plaisir, ne t'inquiète pas, la rassurai-je. Ça fait des semaines que je vis dans un palais; je dors aussi longtemps que je veux; j'ai une vie calme et paisible. Et une nuit, ça n'est même pas assez pour faire une difference. Comparé à tout ce que tu fais toi, Céline.

Elle me sourit, touchée.

- Oh Victoria... ton aide nous a été tellement précieuse aujourd'hui. Tu aurais vu les regards illuminés des residents; ils sont rarement aussi heureux. Merci. Passe une bonne nuit, ma chérie.

Effectivement, la nuit ne fut pas de tout repos. Certains faisaient des cauchemars et se réveillaient en hurlant, d'autres avaient besoin d'aide pour aller aux toilettes, ou voulaient un verre d'eau...

Quand le matin arriva, j'étais épuisée mais tellement sereine a l'idée d'avoir pu aider.

Très vite, vint le moment de partir. Je ne pus m'empecher de verser des larmes au moment de dire au revoir a Céline mais je lui promis de revenir bientôt, dès que je serai eliminée. À moins que je ne le sois jamais... Mais cela ne restait seulement qu'un faible espoir; rien de plus.

Dans la voiture qui me ramenait au palais, je restai nostalgique durant tout le trajet; tellement ce séjour avait été merveilleux et si proche de la belle enfance que j'avais passée.

L'aventure ne faisait que continuer...

L A P R I N C E S S E ♛ - Jeu de rôleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant