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[musique en média]

    C'était le grand jour. Je n'avais pas beaucoup croisé Miyu, même à midi. Je la soupçonnais de s'être éclipsée à la bibliothèque avec Catalina. Depuis que Miyu était tombée dans ce coma léger, elles étaient devenues inséparables – ce qui n'enchantait pas Louis qui perdait petit à petit ses chances avec la rousse.


    J'avais enfilé mon costume, et par là, j'appelais « costume », une chemise blanche, un jean brut élégant, de jolies chaussures en cuir et une veste ajustée noire. Et un noeud-papillon. Ma mère les adorait et m'avait obligé à en porter un, ne serait-ce que pour le début de soirée. Alors je l'avais mis, mais je m'étais juré de le retirer avant de manger.


    Tous les garçons étaient réunis dans le réfectoire. Les tables avaient été poussées contre les murs pour dégager une large piste de danse. C'était un immense buffet. Les cuisiniers avaient préparé de multiples mets à l'odeur alléchante. Sur la table normalement réservée aux professeurs, quatre grands récipients débordants de punch non alcoolisé – mais Matt, selon les garçons de ma classe, avait prévu de rajouter quelques gouttes de rhum pour « maximiser la bonne ambiance ». Bien évidement, les professeurs ne verraient rien. Ils ne voient jamais rien.


    Nous attendions alors, tous regroupés au centre de la pièce. Une gigantesque mer noire de jeunes hommes patientant pour enfin voir leur cavalière ; derrière les portes closes du réfectoire. Le silence régnait alors que Wolf annonçait vingt heures pile. Il s'est approché des portes, et avec l'aide de John, nous a finalement laissé voir les filles.


    Des souffles de surprise, des rires joyeux, des compliments, trop de paroles fusaient, mais pas de Miyu à l'horizon. Les robes multicolores se dispersaient à toutes allure dans la pièce. Les perles et les strass passaient devant mes yeux sans que je ne les remarque. Je ne voyais toujours pas Miyu. Elles étaient des centaines à retrouver leur cavalier, Niall avait invité une blonde plutôt mignonne, de sa classe de l'an passé, et Louis, à mes côtés, guettait aussi l'entrée de Catalina.


    Le réfectoire commençait à se remplir, et par conséquent, le couloir à s'éclaircir. Il ne restait plus beaucoup de monde à l'extérieur de la pièce. Je me suis avancé, cherchant, avec un semblant de panique, ma petite-amie, jusqu'à ce que la fourrure particulière de Calypso m'interpelle. Elle était là. Juste devant moi avec un sourire plus éblouissant que jamais. Et alors, tout s'était arrêté autour de moi. Il n'y avait personne, pas de brouhaha, pas de musique, pas de frère pour me demander sans cesse si j'avais aperçu Catalina. Juste elle. Ses yeux gris et son visage harmonieux.


    Elle était époustouflante. Et à moi. J'étais l'homme le plus chanceux de tous les Etats-Unis. Sa longue robe noire épousait ses formes merveilleusement bien. Une fine bande de tissu transparent au niveau de sa taille laissait deviner sa peau pâle. Elle devait porter de petits talons car elle était plus grande que d'habitude. Et elle avait relevé ses cheveux dans une queue de cheval épaisse et ébouriffée. Ils paraissaient légers et soyeux, et une irrésistible envie d'y glisser mes mains m'a pris.


    Retrouvant quelque peu mes esprits, je me suis précipité vers elle en bousculant certaines personnes dans ma course. Miyu semblait amusée, d'autres beaucoup moins. Je m'en fichais pas mal, s'il n'y avait pas eu autant de monde autour de nous, je lui aurais sauté dessus. Mais contraint de me retenir, je me suis posté devant elle comme un idiot et l'ai contemplée un peu plus, la mâchoire à la limite de se décrocher.


    J'ai senti Gabriel s'ôter de mon épaule pour aller virevolter plus loin – et surement voler de la nourriture dans les assiettes des autres. Je ne savais quoi dire. On aurait dit un adolescent pré-pubère qui tentait de demander à la fille qu'il aimait de sortir avec lui. Je me balançais d'un pied à l'autre. Styx est venu me rejoindre, ce qui a permis à mon corps de se détendre légèrement.


Butterfly | hsWhere stories live. Discover now