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[musique en média]


Harry


    Le mois de janvier était passé calmement, sans embûches ni querelles. Morgan et la mère de Miyu n'avaient pas refait surface, Mr Greem se contentait de faire ses cours le plus naturellement du monde et Miyu s'en portait bien. Elle commençait tout juste à s'habituer au nouvel aspect de son papillon mais peinait à retrouver leur complicité si forte d'antan. Elle allait de plus en plus à la bibliothèque accompagnée de Catalina ou bien seule. Et quand je la rejoignais dans sa chambre, en fin de journée, je la trouvais allongée sur son lit, à inspecter le plafond, Lou Reed tournant en boucle en musique de fond.


    Je sentais qu'elle se confiait de plus en plus à moi. Elle partageait plus facilement ses ressentis, qu'ils soient minimalistes ou non, et se montrait très tactile – non pas que cela me déplaise, je n'étais juste pas habitué à autant d'élans d'affection de sa part.


    Le bal de la Saint-Valentin arrivait à grands pas. J'avais eu l'autorisation de retourner chez moi pour récupérer mon costume et mes chaussures en cuir mais je n'avais pas eu le temps d'acheter un cadeau à Miyu. Alors je me creusais la tête chaque soir pour trouver de quoi lui offrir, que je puisse me procurer ou bien fabriquer avec ce que me proposait le manoir. Il ne me restait plus que quatre jours pour dénicher la perle rare.


    Ma classe et celle de Miyu avaient une heure de libre en milieu de matinée, j'en ai donc profité pour la retrouver à la bibliothèque. J'espérais qu'elle soit seule et non avec Catalina. En arrivant, j'ai salué rapidement Mlle Stanley qui me souriait joyeusement – ce qui m'a valu un froncement de sourcils car d'habitude, elle osait à peine me regarder dans les yeux. Peut-être qu'après trois ans à me côtoyer, elle avait enfin vaincu sa timidité.


    J'ai sorti le sachet de viande séchée que je gardais dans ma poche et en ai extirpé un morceau pour le tendre à Gabriel sur mon épaule. Moi aussi, j'avais déjà faim mais il me fallait attendre deux heures avant le déjeuner. J'ai ignoré les multiples étagères bourrées de bouquins anciens et poussiéreux et me suis rendu directement à l'espace de travail. Bizarrement, toutes les chaises étaient prises, paradoxalement au silence qui régnait en maitre. Jusqu'à ce qu'un faible rire le brise. Mes yeux ont directement divagué en direction de la source bien trop familière.


    Miyu rirait le plus doucement possible. Elle essayait d'atténuer le bruit avec sa main tout en baissant la tête pour ne pas voir les regards de représailles des élèves qui étudiaient autour d'elle. Et de lui. Ethan Jones gloussait avec elle, une cuisse appuyée sur la table et son autre jambe fortement tendue contre le sol pour le stabiliser. Il la surplombait, me cachant la vue magnifique de Miyu souriante. Mais la voir sourire en sa compagnie me plaisait beaucoup moins. Je le voyais parler, faire de grands gestes avec ses bras dénudés – étant donné qu'il portait un simple tee-shirt dont les manches courtes étaient retroussées jusqu'à ses épaules. Il frimait. Pire ! Il la draguait. Sous mes yeux !


    La colère bouillant dans mes veines, j'ai pris une attitude sereine, détendue et me suis avancé vers eux en toute tranquillité. Ethan ne m'avait pas remarqué puisqu'il était de dos. Cependant, j'étais pile dans le champ de vision de ma petite-amie. Elle a relevé ses splendides yeux gris dans les miens. Et j'ai été immédiatement rassuré – sans le laisser paraître – quand j'ai vu que son sourire n'avait fait que croitre à ma vue. Abordant un rictus aguicheur et charnel, j'ai contourné Ethan et, en ne lui portant aucune attention, ai plongé ma tête dans le cou de Miyu. J'ai respiré son odeur enivrante de lait de coco et ai laissé une infinité de baisers savoureux sur sa peau lisse, créant de faibles frissons dans sa nuque.


Butterfly | hsWhere stories live. Discover now