Enfance au manoir Hidalf (Writober 2021, spécial Mathieu Hidalf)

13 : Deus Satan ex Machina

663 mots, écris sur le thème "Deus Satan ex Machina"

Juliette d'Or s'évertuait à expliquer à Mathieu que leur nouvelle petite soeur n'était pas un petit diable, mais le petit garçon était certain du contraire. Depuis qu'ils avaient appris que leur mère était enceinte, cinq mois plus tôt, l'enfant s'était assombri, et était devenu colérique. Mme Hidalf avait tenté de le calmer, de lui faire comprendre qu'elle ne l'aimerait pas moins même s'il y avait un autre enfant dans la famille, mais elle avait renoncé. La mère était encore assez jeune, mais après trois grossesses, celle qu'elle traversait lui paraissait bien difficile. Contrairement aux précédentes, son ventre rond s'était dévoilé tardivement. Trois mois plus tard, elle avait mis au monde une petite fille.

Sans grande surprise, M. Hidalf n'avait pas imaginé voir une troisième fille parmi ses enfants, et n'avait pas davantage réfléchi à un prénom adapté. Le bébé se retrouva affublé du nom de Juliette d'Airain.

Un nom ridicule aux yeux de Mathieu, qui devenait de plus en plus exaspérant alors qu'il l'entendait. Celui de ses aînées ne le dérangeaient pas, mais dans le cas de Juliette d'Airain, c'était une toute autre affaire.

Juliette d'Argent ne fut pas surprise de voir sa soeur aînée entrer dans sa chambre pour venir se plaindre de l'obstination de Mathieu à refuser leur nouvelle petite soeur.

— Il s'y fera, soupira la plus jeune.

— Je ne pense pas, je crois qu'il a un plan en tête...

— Pour se venger de papa qui l'a puni pour ses crises de colère ? supposa Juliette d'Argent.

— Non, je pense qu'il en veut vraiment à Juliette d'Airain.

— Mais elle a deux mois.

Les deux fillettes se regardèrent, et firent une chose de plus en plus normale : un contrat. De la part de jeunes enfants, c'était plus un engagement qu'un vrai contrat, mais Maître Magimel les avait éduqué sur le domaine de la justice, et les contrats étaient sa spécialité, en tant que magistrat, et avocat de M. Hidalf. 

Leur petit contrat, écrit d'une main enfantine, était simple : surveiller Mathieu, et l'empêcher de causer du tort à Juliette d'Airain. Il n'y avait pas de date inscrite de fin de contrat : les deux fillettes comptaient le donner à leurs parents d'ici quelques années, pour exiger une récompense pour leur conduite. 

Le soir même, elles mirent directement leur plan à exécution. C'était d'ailleurs une très bonne chose, car le soir même, Mathieu s'était introduit dans la chambre qui contenait le berceau de Juliette d'Airain, un verre d'eau en main. En voyant ses deux ainées, il versa l'eau sur la figure du bébé, qui ne se réveilla heureusement pas.

Les deux grandes Juliette disputèrent sévèrement Mathieu, qui consentit à paraître penaud. 

Les jours suivants, des incidents similaires se produisirent, alors que Mathieu devenait de plus en plus agressif. Un vrai petit démon.

Les deux Juliette étaient fatiguées de se forcer à rester éveillées le soir pour vérifier que leur frère ne faisait pas de bêtises. Un soir, elles s'endormirent finalement, de fatigue, et Mathieu profita de cela pour aller près du berceau de la petite Juliette d'Airain, un verre de lait en main.

Sa petite taille lui posait problème alors qu'il tentait de faire boire le bébé, et qu'il finit par renverser tout le lait sur le nourrisson. Celui-ci ouvrit de grands yeux noirs, observant Mathieu calmement. Le garçon lui babilla quelque chose d'incompréhensible.

Ce n'était pourtant pas bien compliqué de le comprendre tout de même. Ses soeurs le prenaient pour un sauvageon, mais il voulait juste que Juliette d'Airain grandisse très vite. Maître Magimel lui avait dit que les bébés avaient besoin de rester bien hydratés, et de boire beaucoup de lait pour grandir vite. 

Mathieu se fit évidemment disputer par ses parents pour ses frasques nocturnes, mais le garçon était persuadé que sa petite soeur le verrait comme un grand frère responsable quand elle serait un peu plus grande.

Ça faisait un peu de lui un adulte, ou du moins c'était ce que le garçon s'imaginait.

Publié le 17/12/2021