26 : La bête du roi

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Mathieu cherchait quoi faire comme bêtise pour le cinquante-huitième anniversaire du roi. Le vieil homme méritait quelque chose d'exceptionnel, car même si le jeune Hidalf détestait voir d'autres que lui obtenir des cadeaux le jour de son propre anniversaire, le souverain n'était pas quelqu'un de mauvais. Il lui avait jusque-là pardonné les bêtises de tous les précédents anniversaires, sans exiger de punition en représailles.

Ce qui n'avait jamais empêché M. Hidalf de punir son fils pour l'exemple, bien évidemment. Mais cela ne faisait pas peur à Mathieu, après tout son père n'avait aucune imagination, contrairement à lui.

Lors du dernier anniversaire du roi, le jeune garçon avait fait parvenir au roi un chapeau pointu que le grand Busier avait été incapable de retirer pendant six mois. Cela n'avait été possible qu'avec l'aide d'un coiffeur, lorsque le souverain avait fini par abandonner l'idée de garder ses cheveux. Depuis le temps, il ne devait pas avoir une chevelure très impressionnante.

Mathieu songea un instant qu'il pourrait faire parvenir au roi une perruque, mais il rejeta aussitôt l'idée. D'une part, l'homme serait sans doute trop méfiant pour la porter, et d'autre part, toutes les perruques de M. Hidalf étaient hideuses, aucune n'aurait pu convenir au grand Busier.

— Et si je lui envoyais un animal pendant la fête ? songea-t-il à voix haute.

Il imagina un ours ou un lion courant dans la salle de Cérémonie en grognant, mais parfaitement dressé pour qu'il n'attaque personne. Ce serait certainement efficace pour perturber le royal anniversaire, mais pas assez longtemps. Les Élitiens mettraient rapidement l'animal en cage, ou le tueraient par précaution.

Mathieu se redressa sur son lit, s'imaginant qu'il lui serait peut-être interdit de passer l'épreuve du Prétendant Élitien s'il tentait une bêtise aussi dangereuse.

L'enfant tourna en rond dans sa chambre, ses yeux noirs s'arrêtant souvent sur un object quelconque de la pièce comme s'il détenait la solution à son problème. Mais après trois heures d'intenses réflexions, il soupira d'une façon dramatique.

— Je suis un génie, alors je trouverai certainement quelque chose, dit-il à la nymphette qui illuminait sa chambre. Mais si je fais quelque chose de trop exceptionnel, je ne pourrai rien faire de plus incroyable encore à mon neuvième anniversaire !

— Vous allez réussir, l'encouragea la petite fée en battant des ailes. Oh, d'ailleurs, tenez, voici le courrier qu'à reçu votre père aujourd'hui.

La nymphette voleta jusqu'à un petit interstice dans le plafond et en sortit des doubles des lettres de M. Hidalf, qu'elle donna à Mathieu avec un grand sourire. Le visage de l'enfant venait de prendre un air redoutable, celui qui indiquait qu'il avait trouvé quel serait son prochain plan.

— Tout de même, ce sera bien embêtant. Il faudra que je donne une contrepartie au grand Busier.

Pendant deux mois entiers, Mathieu se démena pour trouver l'animal parfait à faire parvenir au souverain du royaume astrien. Quand celui-ci reçut un matin un colis signé de la main du garçon, il le fit examiner par Stadir Origan, le plus grand sorcier du royaume en personne. Quand l'homme ouvrit le colis, il n'y trouva qu'un bébé buse très rare, doré, capable de briller lorsque le volatile ouvrait les ailes.

Un mois plus tard, ce fut à Mathieu de recevoir un présent. Un petit portrait du roi avec son nouvel oiseau, ainsi qu'une sculpture en bois d'une biche brillante. L'enfant envoya négligemment la figurine dans la cheminée du salon et regarda Bougetou qui dormait près de lui.

— Tout de même, c'est le roi, il aurait pu m'envoyer un vrai chien à cinq têtes ! 




Publié le 09 / 08 / 2022

Enfance au manoir Hidalf (Writober 2021, spécial Mathieu Hidalf)Where stories live. Discover now