5 : Qu'on lui coupe la tête !

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531 mots, sur le thème "Qu'on lui coupe la tête !"

Juliette d'Or aimait bien sa petite sœur, même si celle-ci n'avait pas l'air très intelligente. Ses parents lui avaient dit que c'était normal pour un bébé d'un mois, mais le temps lui semblait bien long. C'était quand même amusant de parler à sa petite sœur comme à une grande fille, la petite Juliette d'Argent la regardant avec ses grands yeux noirs, comme si elle l'écoutait vraiment.

Mais pour le moment, Juliette d'Or aurait bien aimé que sa petite sœur se taise. Le bébé hurlait depuis plusieurs minutes, et même si la fillette blonde lui avait chantonné des berceuses pour l'apaiser, ça ne faisait pas effet.

Depuis quelques jours, le bébé avait été placé dans la chambre de Juliette d'Or. En théorie, la chambre de Juliette d'Argent aurait pu accueillir le poupon dès le premier jour, mais Mme Hidalf avait insisté pour garder l'enfant à ses côtés le temps du premier mois. Et elle craignait à présent de laisser sa fille seule la nuit.

Juliette d'Or foudroya sur regard le bébé qui gigotait dans le berceau déplacé dans sa chambre pour une petite semaine. Elle en avait assez d'être réveillée par les pleurs de sa petite sœur, quand bien même elle la trouvait adorable le reste du temps.

Des pas se firent entendre dans l'escalier de la Tour des Enfants, et Juliette d'Or poussa un soupir de soulagement quand ses parents entrèrent dans sa chambre. Mme Hidalf se précipita sur Juliette d'Argent pour la nourrir, puisque c'était visiblement ce qui faisait crier le bébé.

— Papa, Maître Magimel avait dit une fois que quand les gens n'ont pas de tête, ils ne font pas de bruit, se rappela la fillette blonde. C'est vrai ?

— Oui, mais pourquoi... commença Mme Hidalf.

— Alors on coupe la tête de Juliette d'Argent et elle ne criera plus ! s'écria la petite fille sur le ton de l'évidence.

Ses parents la regardèrent avec stupéfaction, et Juliette d'Or étaient persuadée qu'ils étaient impressionnés par son idée.

— Qu'est-ce que c'est que cette sottise ? Juliette, voyons, on ne peut pas faire ça ! répliqua M. Hidalf.

— Mais si ! Et plus tard on lui recoud la tête, continua la fillette blonde.

Elle fronça les sourcils en voyant que ses parents n'étaient pas du tout enchantés par cette idée, mais elle n'arrivait pas à comprendre pourquoi. Après tout, c'était simple comme méthode.

Son père s'assit à côté d'elle sur le lit en prenant un air très sérieux, le même que lorsqu'il s'apprêtait à lui faire un sermon. Juliette d'Or se redressa pour paraître bien sage.

— Je comprends que tu sois fatiguée par ce qu'il se passe, mais sache que tout les bébés sont ainsi.

— Même moi ? osa demander la fillette.

— Non. Toi, tu étais pire, bien plus bruyante que Juliette d'Argent, asséna M. Hidalf. Donc je ne veux plus que tu parles de couper la tête de ta petite sœur, est-ce clair ? Tu seras sage...

— ...Comme du potage, termina Juliette d'Or.

— Très bien.

Entre-temps, Juliette d'Argent s'était calmée, à présent qu'elle avait été nourrie et bercée de nouveau. Sa sœur aînée songea que décidément, il faudrait que le bébé grandisse vite.

À deux, elles pourraient jouer plein de tours à leur père.


Publié le 05/10/2021

Enfance au manoir Hidalf (Writober 2021, spécial Mathieu Hidalf)Where stories live. Discover now