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Ses pas claquaient sur le carrelage impeccable alors que, pressé, NamJoon cherchait quelqu'un dans l'un des innombrables couloirs du manoir.
Il avait perdu TaeHyung de vue depuis quelques instants seulement, et ce n'était pas la première fois. Ce gamin paraissait jouer avec lui, réapparaissant à des endroits qu'il n'aurait pas soupçonné et disparaissant comme par magie. C'était à croire qu'il connaissait mieux les lieux que le majordome.
« Par ici ! »
La petite tête brune de TaeHyung apparut au détour d'un couloir, et NamJoon s'empressa de le suivre lorsqu'il détala comme un lapin en bas des escaliers.
Ils passèrent un autre couloir, puis d'autres escaliers qui les amenaient toujours plus bas, toujours plus profondément dans la bâtisse. NamJoon reconnaissait le chemin pour aller au cuisine, mais bien trop rapidement, il s'aventura dans un dédale qu'il n'avait encore jamais visité.
Des portes inconnues, des pièces cachées peut-être. Le domestique se demanda, dans sa course effrénée, si ce manoir avait réellement une fin.
NamJoon finit par s'arrêter devant une porte, au fin fond d'un couloir sans issue. Les murs étaient dénués de décoration, les portes n'étaient même plus faites de bois, mais de métal. Des cartons envahissaient certains coins, entassés comme s'ils attendaient simplement d'être placés ailleurs. Tout cela ressemblait étrangement à une zone de stockage. Il devait sûrement se trouver dans l'espace consacré aux réserves.
Le jeune majordome s'avança, méfiant, vers le panneau de métal entrouverts. La porte, plus imposante que les autres, laissait échappé un courant d'air froid.
Trouvant tout ceci suspect, NamJoon finit par entrer dans la pièce glaciale. L'air frais attaqua instantanément son corps alors que, d'un pas de plus en plus hésitant, il cherchait TaeHyung du regard dans cette chambre froide.
Il n'y avait pas âme qui vive ici. Aussi le grand rose décida de faire demi-tour, puisqu'il n'y avait aucune trace du gamin en ce lieu inquiétant.
Un énorme bruit de fracas le fit sursauter et, précipitamment, il pivota vers l'unique sortie qui, à présent, était close.
NamJoon resta statufié sur place jusqu'à ce la gravité de la situation ne lui saute aux yeux. Le majordome se précipita alors sur la grande porte en métal, tentant de l'ouvrir, sans succès. Il se mit à taper vivement dessus avec son poing.
« Hey ! Ouvrez ! »
Aucune réponse. Le seul son qu'il entendit et qui traversa la porte, entre deux martèlements, fut un rire agaçant que NamJoon identifia instantanément.
« TaeHyung ! cria le rose. Ce n'est pas un jeu, ouvre cette porte ! »
Le silence lui répondit, soudain aussi glacial que l'air de la pièce. Le rire avait disparu, et TaeHyung avec.
NamJoon était maintenant totalement seul, dans une pièce qui devait frôler les degrés les plus bas qu'un humain pouvait endurer. Son unique échappatoire venait de partir sans même lui adresser une dernière parole.
Le jeune homme s'éloigna de la porte, saisit de tremblements incontrôlable. Son souffle chaud créait un épais nuage blanc devant sa bouche alors que, déjà atteint par le froid, le majordome frotta ses propres bras pour conserver la chaleur. Complètement crispé, il commençait déjà à trembler.
« Bon sang, marmonna-t-il, encore sous le choc. »
Qu'allait-il faire maintenant ? Mourir là d'hypothermie, une fin lente et indolore ? NamJoon fronça les sourcils.
Ça ne pouvait pas se finir comme ça. Il s'agissait encore d'une mauvaise blague de TaeHyung, il n'allait quand même pas le laisser là. Il viendra sûrement lui ouvrir plus tard, quand il réalisera son énorme et stupide erreur.
Enfin, NamJoon l'espérait. Bizarrement, il n'y croyait pas tant, mais comme on dit, l'espoir fait vivre. Et dans son cas, c'était à prendre au sens littéral du terme.
Le domestique, retenant ses dents de claquer tant le froid devenait envahissant, se tourna pour observer les alentours. Peut-être y avait-il une autre issue, même s'il n'y croyait pas réellement.
La pièce se trouvait être une simple chambre froide, où l'on stockait toute sorte de produit congelé. De grandes rangées d'étagères occupaient la place, sur lesquelles des cartons étiquetés étaient empilés. Certains étaient éventrés, d'autres n'avaient jamais été ouverts. Tout paraissait en ordre. Il y avait des provisions pour des années.
NamJoon tendit l'oreille, soudain perplexe. Avait-il rêvé ou venait-il réellement d'entendre un bruit ?
Aussi inquiet que perplexe, le rose s'avança, fixant les étagères comme s'il s'attendait à voir surgir une créature quelconque. Ses yeux s'écarquillèrent lorsqu'une silhouette sortit de l'ombre pour se présenter à lui.
« Jae-Hwa ? marmonna NamJoon, terriblement surpris. Mais qu'est-ce que tu fais là ? »
La jeune femme haussa les épaules, l'air préoccupée. Serrant ses bras contre sa poitrine, elle avait tout aussi froid que son collègue, si ce n'est plus.
« Je venais ranger les provisions, mais lorsque j'ai voulu sortir, quelqu'un avait refermé la porte, dit-elle platement. Impossible de l'ouvrir depuis l'intérieur. »
NamJoon afficha une expression perplexe, s'efforçant toutefois de montrer une facette compréhensive. Curieusement, tout ceci lui semblait très louche.
« Et toi ? Comment es-tu arrivé là ? demanda à son tour la jeune femme. Son ton ne paraissait pourtant pas aussi curieux que le voulait sa question.
– Je cherchais TaeHyung, annonça NamJoon. Il se retint d'ajouter que c'était pour lui botter le cul qu'il était sur les traces de ce gamin. À la place, il continua simplement. Il semblerait qu'il m'ait volontairement enfermé ici. »
Jae-Hwa fit mine de comprendre ce qui lui était arrivé, et le rose trouva ça d'autant plus suspect. Le malaise s'installa doucement, les saisissant au même rythme que le froid.
« Alors on dirait bien qu'on est coincé ici pour un bon moment, constata finalement Jae-Hwa, visiblement mal à l'aise. Tous les deux. »
NamJoon ne releva pas la remarque et se contenta de garder le silence, les pieds ancrés au sol, déterminé à ne pas bouger.
De longues secondes s'écoulèrent avant que, enfin, Jae-Hwa ne se décide à agir. Elle alla s'asseoir contre le mur glacé, se repliant sur elle-même pour conserver le peu de chaleur que son corps contenait. NamJoon, quant à lui, alla également s'asseoir dans un coin, à bonne distance.
Le temps s'écoula, les minutes se perdaient. Personne ne parlait. Seul le bruit de leur respiration comblait le silence de mort. Ils restèrent ainsi, sans bouger.
NamJoon frottait ses bras avec frénésie, y mettent autant de force qu'il pouvait. Ses muscles devenaient peu à peu engourdis alors que, inlassablement, il s'activait à se réchauffer, en vain. Il avait l'impression que la température avait encore chuté, comme si quelqu'un s'amusait à dérégler le compteur placé à l'extérieur.
Crispé, le jeune homme jeta un coup d'œil à Jae-Hwa. Sa collègue mourrait de froid autant que lui. Sa tenue de domestique paraissait trop fine pour l'aider à conserver un semblant de chaleur. Ses genoux, serrés entre eux, tremblaient beaucoup alors que ses lèvres d'habitude si jolies, elles, étaient devenues violettes. Avec ses longs cheveux noirs, elle ne ressemblait plus qu'à un fantôme.
Alors que l'air glacial les figeait, l'attention de NamJoon fut attirée par du mouvement sur sa gauche. Sa collègue venait de bouger.
La jeune femme, à présent debout, le fixait lui aussi de ses yeux indescriptibles. Son air était peiné, comme si elle s'apprêtait à faire une chose qu'elle allait forcément regretter et qu'elle ne désirait pas vraiment.
« NamJoon, appela-t-elle. Sa voix, faible, brisa le silence presque religieux. »
Le majordome afficha une mine interrogatrice alors que, de son côté, Jae-Hwa vint s'installer plus près de lui. Elle s'assit à un mètre, tremblante et glacée.
« Je sais que ce n'est pas convenable mais, elle se fit hésitante, avant de reprendre. Ça te déranges si je m'assied à côté de toi ? »
NamJoon la considéra longuement. Son cerveau fonctionnait au ralentit, mais il comprenait parfaitement pourquoi. Elle désirait juste un peu de chaleur, rien de plus. Le domestique, même s'il ne se sentait pas à l'aise en sa présence, ne pouvait pas lui refuser cela. Ce serait égoïste et stupide, puisque lui également, souffrait des basses températures.
D'un mouvement mal assuré, il fit signe à la jeune femme que oui, elle avait son autorisation. Ça ne lui plaisait clairement pas, mais c'était déjà mieux que perdre un doigt ou mourir de froid dans cet endroit saugrenu.
Jae-Hwa se cala contre son flanc, se recroquevillant sur elle-même, grelotante. Puis, comme si elle venait de mourir, elle devint quasi immobile.
NamJoon la surveillait du coin de l'œil, suspicieux. Il avait beau penser l'inverse, le fait d'avoir un autre corps contre lui chassait un temps soit peu le froid et ramenait l'illusion de la chaleur. Dans leurs situations, ce n'était pas négligeable. Une poignée de seconde plus tard, la demoiselle bougea encore. NamJoon sentait qu'elle se rapprochait, que sa tête venait doucement de se poser sur son épaule, comme si elle avait un peu peur de le froisser. Discrètement, sa main frôla sa cuisse.
Le majordome déglutit péniblement, soudain tendu. Le malaise revenait peser sur eux, faire pression. L'espace d'une seconde, le regard de NamJoon se posa sur les converses de la jeune femme, avant de s'échouer ailleurs. Il pensa subitement à SeokJin.
Il se demanda ce que son jeune maître faisait à l'instant. Sûrement gueulait-il après lui. Après tout, le grand rose ne lui avait pas encore apporté son goûter. Il avait du retard.
« NamJoon ?
– Mh ? L'appelé tourna la tête instinctivement, battant des paupières pour sortir de ses pensées. »
Une paume se posa sur sa joue froide, le visage de Jae-Hwa s'approcha rapidement, trop rapidement.
NamJoon n'eut pas le temps d'anticiper. Il sentit une pression sur ses lèvres, et il ne lui fallut qu'un seul instant pour se rendre compte que sa collègue était en train de l'embrasser.
Le majordome eut un brusque mouvement de recul. Ce fut direct, instinctif. Malgré tout, il ne parvint pas à se détacher de l'emprise de Jae-Hwa, qui s'accrochait désespérément à ses lèvres.
Son dos heurta soudainement le sol bétonné de la chambre froide alors qu'un bruit de fracas se fit entendre. NamJoon fut enfin libéré. Il inspira vivement l'air frais alors que, juchée au-dessus de lui dans cette position incongrue, sa collègue venait de pâlir comme si elle avait vu la mort de ses propres yeux.
Le domestique à la coloration rose suivit le trajet de son regard, qui se posa alors sur la silhouette debout dans l'encadrement de la porte.
SeokJin se tenait devant eux. Son expression était dure, indescriptible, et une fureur sans nom se lisait dans ses orbes noisette.
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