14. THE SHADOW SIDE (PARTIE VI)

402 72 12
                                    

— Tu trembles, me fit remarquer Josie, contre qui j'étais appuyée. Ça va ?

Je contemplai la main de Norin dans la mienne, sentant son regard peser sur moi.

— Oui, mentis-je.

— Si je peux me permettre, tu mens très mal, répliqua-t-elle en me gratifiant d'un clin d'œil complice. Sans vouloir t'offenser.

J'esquissai un sourire.

— Ce n'est pas la première fois qu'on me dit ça.

— Y'a aucun mal à avoir peur, tu sais. Regarde, moi, je suis morte de trouille !

— Tu donnes bien le change, reconnus-je.

Elle rit.

— Et pourtant, si tu savais ! J'ai deux gosses qui m'attendent à la « maison ».

— Quoi ?

J'étais ahurie.

— Mais qu'est-ce que tu fais là ?

— Tu veux dire, sur le champ de bataille, au lieu de rester en sécurité auprès de mes enfants ? J'essaye de me battre pour leur avenir, aussi saugrenu que ça puisse paraître comme idée. Me cacher en attendant que ça se tasse est illusoire, et si on ne prend pas les choses en main, il y a toutes les chances pour qu'on vive comme des parias pour le restant de nos jours. Au bout de presque quatre décennies passées sur cette putain d'île flottante, j'ai envie, non, j'ai besoin de changement, tu comprends ?

— Je crois, oui, admis-je en me perdant dans mes pensées.

Son discours fit écho aux réflexions que j'avais nourries juste avant de partir en disant au revoir à Nate. Enfin, dire était un bien grand mot. Pour être honnête, je n'avais pas eu la force de lui refaire le même coup que la dernière fois. Combien de fois étais-je partie en lui promettant que je ne recommencerais plus et ce, pour commettre une erreur chaque fois pire ?

Tout cela me ramenait bien trop à mon départ à l'Union Bleue, devant la mine déchirée de mon petit frère et l'inquiétude d'un Fox encore bien vivant, qui craignait des représailles à force de traîner. Non, je n'avais pas eu la force de recommencer.

Ma dernière lâcheté à son égard avait été de le coucher dans son lit en suppliant Marie – encore choquée par les évènements mais reconnaissante que son homme soit sain et sauf – de veiller sur lui. Sur sa promesse, j'avais glissé un morceau de papier sur le ventre de Baruch, qu'il serrait dans ses bras. Les mots tournaient en boucle dans mon esprit.

Coucou mon grand,

Ne t'inquiète pas si tu ne me vois pas à ton réveil, ni au cours des quelques jours qui vont suivre. Je compte revenir très vite, il faut juste que je règle des histoires de grands. Sois courageux et bien sage avec Marie, comme tu le serais avec moi.

Ne m'en veux pas.

Ta grande sœur qui t'aime très fort.

Je crois que je n'aurais pas pu trouver plus pourri comme message. Si je ne survivais pas, il allait évidemment m'en vouloir pour le restant de ses jours.

— Je sais à quoi tu penses, chuchota N.J. Tu as fait ce qu'il fallait, je t'assure.

— Espérons. Parce que c'est peut-être la dernière fois que je pourrais faire quelque chose pour lui.

Le regard de mon compagnon plongea dans le mien – il ne pouvait ni ne comptait me contredire. Et ce fut à ce moment-là que je sus que nous y étions. Que nous étions arrivés au dernier chapitre.

Media : Helena, My Chemical Romance.

ENDLESS RAINOù les histoires vivent. Découvrez maintenant