8. I'LL BE DAMNED (PARTIE VIII)

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En dépit de mes efforts, je ne parvins pas à dormir du reste de la nuit. Au souffle irrégulier de mon compagnon, il était évident qu'il ne faisait pas beaucoup d'efforts pour gratter un peu de repos, lui non plus, préférant veiller sur moi. Vers les cinq heures du matin, j'abandonnai enfin l'idée de retrouver le sommeil et pris une douche. Norin m'abandonna à contrecœur, officiellement pour assurer ses fonctions – même si nous savions tous les deux qu'il devait en réalité mettre à exécution le projet que nous avions monté durant la nuit.

La journée passa comme un rêve, seul le stress qui me tordait le ventre me rappelant où je devrais me rendre dans la soirée. Ce ne fut qu'une fois arrivée dans le secteur 36 que le stress se mua en une peur viscérale, qui me donna la nausée dès que nous eûmes débarqué. Il y avait déjà du monde sur place, mais l'ambiance était très différente des regroupements auxquels j'avais déjà pu assister par le passé. Malgré les conversations, l'atmosphère était lourde de deuil et d'expectatives guerrières, et cette impression était accentuée par le fait que tous les résistants présents étaient restreints dans les premiers étages émergés.

N.J. nous fraya un chemin, ainsi qu'à ses hommes en civil, jusqu'au cinquième étage, sur les lieux où tout s'était joué. Certains membres de la Résistance suivirent progressivement le mouvement. Arrivée à l'entrée de la cinquième zone de ce qui avait autrefois dû servir de parking – et ce, malgré l'absence de marquage au sol ou d'indication –, j'inspirai à plein poumons pour essayer de me donner une contenance... et le regrettai immédiatement.

Je restai sur place pendant une bonne minute, essayant de reprendre mes esprits, mais l'odeur de sang et de mort qui flottait dans l'air eut raison de mes efforts. Je me réfugiai dans un coin et rendis le contenu – pourtant vide – de mon estomac.

— Ne t'en fais pas, ça va, parvins-je à articuler en sentant la main de Norin se poser dans mon dos.

Je me retournai et poussai un cri de surprise lorsque je me rendis compte que le long bras mince couvert de tatouages qui me soutenait n'était indéniablement pas celui de Norin, mais bien celui d'un individu de près de deux mètres au regard perplexe. Je lançai un regard éperdu vers le centre de la pièce et vis Norin, déjà en train de s'affairer auprès des corps, relever la tête.

— Blake ! l'interpella ce dernier en repérant ma position. Ramène tes fesses ici.

Alors que je le remerciais d'un vague sourire, N.J. me questionna silencieusement du regard. Je lui fis comprendre que j'allais bien, à défaut de le penser. Il sembla hésiter, mais continua à guider ses compagnons, chargé de recouvrir les corps de mes amis. Mon cauchemar me sauta à la figure avec violence, malgré ma détermination à l'occulter.

Je me concentrai sur la démarche du type qui rejoignait mon compagnon pour me rappeler comment je devais procéder pour avancer, et réalisai que celui-ci me disait quelque chose, sans toutefois réussir à mettre le doigt dessus. Je me postai à deux bons mètres des corps et sentis les larmes affleurer, toute la scène se rejouant dans ma tête avec une précision infernale.

ENDLESS RAINWhere stories live. Discover now