4. DISTURBIA (PARTIE I)

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Au bout d'une semaine, l'ennui commença à me guetter. La routine s'était installée avec une rapidité telle que je m'étais laissée surprendre, alors même que je m'y croyais préparée depuis mon arrivée. Depuis cette soirée où N.J. était rentré amoché de sa rencontre avec les résistants, le contact s'était quelque peu rompu. Plus jamais il ne s'était confié à moi de cette manière, préférant se réfugier derrière son masque d'ironie pour ne plus subir mes éventuels interrogatoires – non que je m'y sois risqué une seule fois.

Tous les matins, j'avais le droit au même rituel : l'un de nous deux lançait les hostilités par une petite pique anodine, et c'était parti pour un concert de répliques mordantes qui ne cessait qu'à son départ sur le terrain, et reprenait dès qu'il franchissait le seuil de cette chambre à des heures indues. Mais pendant que monsieur partait traquer ses cibles pour assouvir sa vengeance personnelle et celle de son équipe, puis fréquentait les fêtes du secteur 29 pour récolter des renseignements à droite à gauche, je me morfondais dans ce trou sans le moindre espoir de me rendre utile pour quoi que ce soit.

Les seules personnes que j'entrevoyais dans la journée étaient la mère de mon insupportable compagnon de chambrée et l'intendante qui remplaçait désormais Davina, et dont tout ce que je savais d'elle était son prénom – Shailene. Bref, Solara avait beau compatir à mes envies de fuir en hurlant, elle ne pouvait malheureusement rien faire d'autre que de me rapporter les maigres nouvelles ou rumeurs qui circulaient dans l'Union Bleue, souvent peu concluantes. Certes, je me serais bien passée de ce qu'il s'était produit le lendemain de mon arrivée, mais passer de tout – voire trop – à rien restait brutal. Et malgré mon amour inconditionnel pour la lecture et la musique, tout cela ne me suffisait plus.

Une idée avait donc commencé à germer dans mon esprit atrophié par l'ennui, un peu stupide de prime abord : j'allais accepter l'invitation que Tessa m'avait lancée le soir de mon arrivée, histoire de voir du monde et peut-être, qui sait, d'en apprendre un plus sur l'existence de cette rébellion. Néanmoins, je n'avais pas la moindre idée d'où trouver la jeune fille et encore moins comment m'y prendre pour la contacter.

Et mon plus grand problème à ce stade, c'était que je n'avais pas le moindre désir de faire connaître mon projet à qui que ce soit. Je ne faisais confiance à personne ici ou presque, et je n'allais quand même pas pousser le bouchon jusqu'à demander un truc pareil à Solara. Je me voyais encore moins charger l'intendante de me donner ces renseignements – surtout qu'elle avait l'air du genre à ne rien cacher à ses employeurs. Non, il n'y avait qu'un moyen d'atteindre mon but : rejoindre le dernier niveau du parking, en espérant que Tessa y traîne avec sa bande.

Là encore, c'était plus facile à dire qu'à faire. Le problème résidait surtout dans la partie technique de la chose, à savoir, la personne qui allait monter la garde durant mon passage dans les couloirs désaffectés. Il valait mieux éviter que je ne retombe sur mon super copain Will, car personne ne serait là pour voler à ma rescousse cette fois-ci – et Dieu seul savait à quel point je voulais refuser ce plaisir à quelqu'un, et surtout à une certaine personne en particulier.

Le seul en qui je mettais un tant soit peu d'espoir était Parson – l'un des nombreux amis d'N.J. certes, mais aussi l'un des seuls qui ne m'avait pas l'air de causer trop d'ennuis. Pour autant, je ne l'avais jamais recroisé depuis notre première entrevue et ne connaissais qu'un seul moyen de le contacter : me rendre au Q.G. des soldats. Ce qui n'était qu'une idée encore plus stupide que la première, j'en avais parfaitement conscience. Il avait fallu des heures de lutte acharnée avant que ma stupidité ne l'emporte.



Media : Disturbia, The Cab (Punk Goes Pop, Volume 2).

ENDLESS RAINWhere stories live. Discover now