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L'enseigne s'étalait sur le fronton du fast-food ; elle était démesurément gigantesque. Des photographies de plats appétissants étaient placardées stratégiquement sur la façade pour appâter le chaland et activer ses glandes salivaires. Une fois à l'intérieur, l'atmosphère était saturée par le graillon et le brouhaha de la faune agglutinée dans l'open Space. Lucie pensait que ce lieu était l'antinomie du raffinement et une tragédie gustative pour qui aime la bonne chère. Heureusement que La température surchauffée du lieu contrastait avec l'air glacial de l'extérieur. Les joues rougies par le froid, Maël semblait reprendre vie. Il prit les poignets de sa colocataire pour lui donner un peu de sa chaleur car Lucie avait le teint pâle et les lèvres légèrement bleutées. A ce contact, elle reprit doucement des couleurs et il se tança mentalement de ne pas avoir su prévoir sa sortie avec elle.
Quand soudain, un groupe se leva de concert pour souhaiter d'une seule et même voix un joyeux anniversaire à Maël, puis ils scandèrent tous son prénom, faisant sursauter certains clients tandis que d'autres secouaient la tête de désapprobation.
Une rousse se détacha du groupe et se rua littéralement sur le blond pour s'accrocher à lui tel un koala.

-Joyeux anniversaire Marelle! Merde quoi, 18 ans! Mon chou est un putain de majeur là!
-Allez Rebecca, lâche-le ! Il atteindra pas les 19 s'il meurt étouffé par ta faute.

Comme pour en rajouter, Maël mima un malaise et provoqua un rire général. La rousse lui frappa l'épaule tout en grommelant mi amusée mi boudeuse. Celui qui lui avait répondu était un métis, lunettes sur le nez, et sourire aux lèvres. Lucie fut sa prochaine attention, il la dévisagea en haussant un sourcil. Rebecca fit de même.

-Bah alors Manivelle? Tu nous présentes pas?
-Dany a raison Mortadelle! Je crois que t'as oublié les bonnes manières chez toi !

À l'entente des ces sobriquets, le blond grimaça. Ce jeu ridicule de l'affubler de surnoms commençant par l'initiale de son prénom et finissant par la syllabe "elle" lui collait à la peau depuis le collège et le rétrogradait à ces années où l'âge bête culminait à son apogée. Mais si en plus, c'était devant Lucie... Il sentit une gêne. Mais, il se ressaisit aussitôt :

-C'est Lucie, ma colocataire. Lucie, ce sont Daniel et Rebecca.

Et désignant du menton le reste du groupe, il déclara:

-C'est des potes !

Pour confirmer leur présence, ses amis firent un tapage monstre en levant le poing en l'air comme un signe tribale distinctif auquel Lucie n'était pas initiée. Elle esquissa alors un sourire timide.

-Ah ! C'est elle la "pouffiasse"! Comme quoi, elle en a pas l'air, hein Pauline! Lança Daniel tout de go.

Pauline, assise autour de la table, afficha une mine mortuaire. Rebecca s'esclaffa :

-Nan mais faudrait peut être lui dire à Pauline que les filles qui approchent Maël s'appellent pas toutes comme ça!

Lucie fut embarrassée, elle ne sut où se mettre ni quoi faire mais l'adolescent décida pour elle. Il lui encercla la taille et lui murmura au creux de l'oreille.

-Viens, on s'installe.

Peter PanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant