Peter Pan

3

-Ce que t'écris, c'est des romans d'amour?

Lucie envoyait un message à Éric lorsque Maël leva la tête de l'écran de son ordinateur. Ses cheveux mouillés étaient coiffés en arrière et dégageait son profil fin et aquilin. La pomme croquée sur le rabat de l'ordinateur lui faisait de l'œil. Elle finit de taper sur les touches de son smartphone avant de répondre:

-Comment le sais-tu?
-Internet ça existe.

L'adolescent s'emmitoufla dans le plaid qui traînait sur le canapé. Lucie posa sa tête sur le dossier de sa chaise rembourrée. C'était sa troisième journée dans ce nouvel appartement et elle s'y sentait plutôt bien. Outre ce garnement qui avait la langue bien pendue. Elle se demandait d'ailleurs pourquoi il vivait seul. À présent, même sa petite amie devait hésiter à venir. Si il en avait une.
Lucie reçut une réponse d'Éric qui fut réceptionnée par une petite sonnerie. Elle la lut fébrilement mais le jeune garçon attira son attention:

-C'est beau les romans d'amour, dit-il.
-Oui c'est beau l'amour.
-Non ce qui est beau, c'est les romans. Pas l'amour.

Maël arborait une mine sérieuse. Il ne la regardait plus et avait la tête ailleurs. Sans doute avait-il des réminiscences. L'horloge annonçait quatre heures de l'après-midi. À travers la fenêtre, le soleil prenait des teintes orangées. Des rayons lumineux traversaient le coin salle à manger dans une harmonieuse atmosphère.

-L'amour, reprit-il, c'est ça qui te rend seul.
-Pas du tout. C'est ce qui justement te rend plus fort. Au contraire, on est deux à ce moment là.
-Jusqu'à que tu te retrouves seul. Encore.
-Pourquoi est ce que tu vois le verre d'eau à moitié vide? Dans les romans, au moins, on y croit.
-C'est pour ça que c'est beau, les livres.

Un ange passa.
La vibration du portable de Lucie brisa cet instant. Elle l'éteignit aussitôt.
Mais Maël repoussa la couverture et alla chausser ses baskets.

-Je ne rentrerai pas ce soir. Ne m'attends pas pour dîner.
-Hein? Atten..

La porte claqua sans qu'elle puisse terminer sa phrase.