ፈᏂᏗᎮᎥᏖᏒᏋ 11

68 11 29
                                        

Mon cerveau a arrêté de réfléchir au moment où j'ai vu Hyunjin se faire happer par la rivière. 

Plus de rêve, plus de prétendue vision ; juste Hyunjin, la rivière et moi. 

Je cours le long de la rive, manquant de glisser sur les cailloux mousseux qui entourent l'eau, suivant le courant calme mais tout de même assez rapide. La rivière est étroite, mais plus profonde qu'il n'y parait. 

Plus je descends et plus je me rends compte que, à sa fin, la rivière se termine en une chute d'eau dans un trou sans fond. Une mort assurée, s'il ne s'est déjà pas évanoui par manque d'oxygène. 

Je vois soudainement sa main se tendre hors de l'eau avec difficulté à cause des courants, mais tout de même à ma portée. Je ne réfléchis pas plus ; je me laisse glisser sur les rochers inconfortables mais humides, et je tends mon bras pour atteindre, je l'espère, le sien. 

Malheureusement, l'histoire ne se termine pas au moment où mes doigts agrippent les siens. 

J'entoure son poignet de mon autre main, usant de toute la force de mes bras frêles pour le hisser hors de l'eau. Avec son pied, il se pousse sur la rive pour s'écraser sur moi ; je découvre alors avec horreur que, malgré la force dont il a fait preuve pour sortir de la rivière, du sang en grande quantité s'écoule sur son corps de je ne sais où. 

Je me redresse brusquement, sa tête ballante sur mon torse comme une poupée de chiffon. Mes yeux écarquillés parcourent son corps rapidement, à la recherche de l'origine de ce soudain écoulement de sang. Car, s'il en perd trop, il est bon pour s'évanouir et se chopper toutes sortes de conneries à cause d'une infection. 

- Hyunjin ! Hyunjin, bordel répond moi !, je panique, mes mains soulevant son corps lourd pour l'inspecter.

Je parviens à le hisser sur mon dos avec difficulté, avant de remonter le long de la rive pour revenir à notre chemin de tout à l'heure, là où je buvais. Comme il est plat et plus large, j'ai plus de facilité pour bouger et ainsi le déposer sur le sol froid.

Je l'allonge, seulement pour remarquer ses lèvres bleutées à cause de la fraîcheur soudaine de la rivière, et du sang qui s'écoule de ses cheveux. Mes yeux s'écarquillent, mon cœur se crispe et ma gorge se serre. 

- Hyunjin... et oh, répond moi...

Je déglutis difficilement en essuyant ses joues froides avec la manche de mon pull. Je ne remarque même pas que, plus les secondes passent, plus mon visage s'approchent de lui. Je prie pour que ce soit encore mon subconscient qui me joue des tours, mais apparemment le destin n'en a pas décidé autrement. 

Je panique, je culpabilise. Et si il était mort en se disant que je lui faisais la gueule, juste après qu'il m'ait sauvé ? Et si c'était un piège, et s'il allait se réveiller pour me planter, comme dans mon rêve ?

Au diable les rêves. Je vérifie malgré tout, mais ses poches sont vides, donc à moins qu'il m'assomme d'un coup de poing il ne risque pas de faire grand chose. Je réussis alors, avec une nouvelle force soudaine, à déchirer un pan du t-shirt que j'avais sous mon pull pour entourer maladroitement la tête de Hyunjin en espérant stopper l'écoulement. Il a dû se taper le crâne contre un rocher pendant que le courant l'emportait ou que je le sortais de l'eau. 

- Hyunjin... s'il-te-plaît... je t'en veux pas, en fait, je suis juste en train de devenir fou à cause de ce Labyrinthe de merde...

Je ne remarque même pas que mes larmes tombent délicatement sur ses joues, sur son nez, dans ses cheveux déjà humides. Je caresse sa joue sans m'arrêter, je veux simplement qu'il me réponde. Qu'il me frappe, qu'il me hurle dessus, qu'il m'embrasse, n'importe quoi tant qu'il bouge. 

Après quelques minutes qui s'écoulent aussi vite que lentement, je laisse ma tête tomber dans le creux de son épaule, mes larmes humidifiant son cou. Je prie pour que ce soit un rêve, rien qu'une mauvaise nuit. 

- Hyunjin... tu m'entends ? Par pitié, réponds moi...

Je renifle et, maintenant que je suis plus proche de son cou, je sens quelque chose contre mon nez. Son pouls. Oh, bordel de merde, son cœur bat. Je jure de le frapper lorsqu'il se réveillera, pour m'avoir fait une frayeur pareille. 

Je parviens à me calmer un peu, à me rassurer et me persuader que je m'excuserai une fois qu'il ouvrira les yeux. Au diable le Labyrinthe, au diable mes rêves et au diable la raison. À quoi sert-elle, lorsqu'on est enfermé dans une création d'Hadès lui-même ?

Soudainement, ses mains effleurent faiblement mon dos, le creux de mes reins. Je relève ma tête, m'appuie sur mes coudes pour mieux voir son visage, mes yeux écarquillés. 

- Hyunjin ? Hyunjin, t'es réveillé ? Tu respires ? Tu m'entends ?

- Crie pas idiot, tu me vrilles les tympans... 

Je laisse échapper un rire nerveux, un sourire étirant mes lèvres. Il en aura pris du temps, pour m'insulter. 

- J'ai cru que t'étais... je suis tellement désolé, j'ai fait un rêve idiot et-

- Chut, c'est bon... Je te pardonne, à condition que tu avoues que tu pleurais sur mon épaule il y a deux minutes.

J'écarquille les yeux, le regardant avec un air ébahi. Il se fout de qui, lui là avec ses beaux yeux et son bandage de fortune sur la tête ? Mais, comme je l'ai dit avant, au diable la raison.

- Oui oui c'est bon. Je t'ai sauvé aussi, même après t'avoir vu me poignarder dans mon rêve. 

Il sourit, sa main se levant lentement pour venir recoiffer une mèche de cheveux derrière mon oreille. 

- Eh bien, tu sais... moi aussi, j'ai rêvé de ça, sauf que c'était toi qui me poignardait. Le Labyrinthe est un sacré petit salopard, pas vrai ?

Je le regarde dans les yeux, et je sens immédiatement tous mes muscles se détendre contre son corps encore humide de la rivière. Je ne sais pas comment il a encore réussi à me faire confiance après ce rêve, peut-être qu'il savait qu'il fallait se méfier. Pas de moi, mais bien du Labyrinthe. 

- Tu sais... ça te va bien mon t-shirt, autour de la tête comme ça, je le taquine en souriant niaisement. Il m'a toujours fait cet effet, sauf qu'en étant plus jeune je bégayais à la place. 

- Et je suis sûr que ça t'irait bien, mon t-shirt trop large sur ton petit torse nu. 

Mes yeux s'écarquillent, je manque de m'étouffer, mais je suis incapable de nier le petit papillon qui a chatouillé mon bas-ventre. 

- T'es con. 

- Tu sais que, quand tu bégayais quand je venais te parler au camp il y a 5 ans, et bien je te trouvais très mignon. 

- T'aurais pas pu rester évanoui un moment, au lieu de m'achever de cette manière ?

- Pour louper ton "Hyunjin, par pitié ne meurs pas" ? Jamais.

- J'ai pas dit ça !, je m'exclame, indigné. 

- Mais tu l'as pensé. 

Je soupire, lève les yeux au ciel avant de marmonner.

- Bah oui, ce serait con que tu crèves avant que... bah que...

- Que j'aie pu t'embrasser comme dans nos visions ? Ce serait idiot, c'est vrai. 


𝐀𝐏𝐎𝐋𝐋𝐎'𝐒 𝐒𝐎𝐍 ᴴʸᵘⁿˡⁱˣWhere stories live. Discover now