ፈᏂᏗᎮᎥᏖᏒᏋ 8

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ᎦᏋᏝᎥጀ

J'étais déjà au courant que le Labyrinthe d'Hadès utilisait nos peurs, nos espoirs et tout ce bordel pour nous affaiblir, mais un couloir interminable ne faisait pas partie de mon programme.

J'ai l'impression que nous marchons depuis 3 heures. Sans un mot, à prendre des virages au hasard en espérant trouver une autre porte pour échapper à ce cauchemar sans fin. On a déjà travaillé l'endurance au camp, mais pas la force mentale.

Contrairement à moi, j'ai l'impression que Hyunjin fait une petite balade de santé. C'est vrai que, avec cette histoire de bannissement, il a dû se forger un mental d'acier. Je me surprends à le respecter un peu plus, juste pour ça. 

Je dois avouer que, quand nous étions plus jeunes, il est le premier à avoir attiré mon regard au camp. Je suis arrivé quand je devais avoir 13 ou 14 ans, et il a été banni quand nous avions tous deux 16 ans. Je n'ai jamais réellement eu l'occasion de lui parler, à vrai dire les enfants d'Arès n'ont pas l'air très amicaux à première vue. Malgré tout, je ne pouvais m'empêcher de me surprendre à laisser mon regard divaguer sur lui, surtout lorsqu'il s'entraînait. Il avait cette sorte de respect qu'on lui donnait, même s'il ne parlait presque à personne. 

Et puis, tout s'est effondré lorsqu'il a été banni il y a 5 ans. Je les ai oubliés, lui et ses beaux yeux marrons aux reflets rouges, mais mon cœur tressaillait toujours étrangement quand on prononçait son nom. Celui de Chan aussi, mais lui c'était par envie de meurtre. 

Hyunjin m'impressionnait, c'était bien un des seuls à qui je n'osais pas parler, moi qui traînait avec tout le camp. C'est simplement sa beauté et sa force qui attiraient mon regard et me faisaient peur en même temps. C'est peut-être pour ça que je n'ai jamais réellement réussi à le détester, après son bannissement. 

Perdu dans mes pensées, je m'écrase contre son dos brusquement.

- Mais- Bordel, tu peux pas prévenir ?

Je frotte mon front en grommelant dans ma barbe inexistante, mais quand je relève la tête je me fige. Je comprends pourquoi il s'est arrêté si brusquement sans prévenir. 

Une pièce, dans un large cul de sac. Pas de portes ni pour y entrer ni pour y sortir, mais bien un sablier géant suspendu à ce qui ressemble au plafond flou du Labyrinthe. Dans les couloirs, quand on lève la tête, il semble infini, comme un ciel de nuit sans étoiles, mais ici il tangue un peu. Comme... une illusion.

Le sable coule, mais je ne sais absolument pas le temps qu'il représente, ni ce qu'il se passera lorsqu'il sera écoulé. Son bruit est assourdissant, pas parce qu'il tombe vite, mais parce que chaque grain résonne comme un battement de cœur avant notre fin. Je suis le premier à m'y approcher pour cette fois, mais je me rends compte que je n'aurais pas dû. 

Lorsque je pose le pied sur une dalle, le sablier et le sol commencent à trembler brusquement autour de nous, le sable tombant d'un seul coup dans la partie inférieure de l'objet géant. Je n'ai même pas le temps de cligner des yeux qu'une lumière aveuglante éclate dans ma direction, sa force me faisant tomber en arrière. 

Je ne suis plus dans la salle, je ne sais plus si ce que je vois ou ressens est réel. C'est comme une illusion, un rêve éveillé. Je me trouve dans une pièce blanche, comme une chambre terne, avec de fortes odeurs de... d'antiseptiques. Un lit, surmonté de draps trop grands, accompagné de bips trop réguliers. Et puis cette voix, si douce, qui chante comme un oiseau au petit matin.

- Tu es mon rayon Felix, même dans la nuit...

Je tends la main, espérant qu'elle l'attrapera gentiment comme elle le faisait si souvent quand j'étais bébé. Mais ce moment n'arrive jamais. 

Plus de chant, plus de bip, plus de froissements de draps sur sa poitrine qui se soulève. Je ne sais plus si c'est moi qui hurle, ma mère ou les voix dans ma tête. Il y en a tellement, autant que les larmes chaudes qui roulent sur mes joues et s'échouent sur le sol de pierre. 

- Maman ! Maman, maman, maman...

Je hurle, je me déchire la gorge, implore mon père. Je le supplie de venir, de la guérir, de faire quelque chose, n'importe quoi. Je voulais juste revoir ce sourire, doux comme une brise matinale, comme un chocolat chaud un jour d'hiver. 

Mais rien n'est venu. Pas une lumière, pas un miracle, pas un Dieu et encore moins un père. Ce jour-là, j'ai maudit mon don de vision. Je n'avais rien vu venir.

Je hurle en oubliant de respirer, ma voix craque et ma langue commence à goûter au sel de mes larmes, ma main crispée sur ma poitrine. Mon cœur est dans ma gorge, il force, il fait mal, se serre et semble arrêter de battre pendant quelques instants. Les grains du sablier qui frottent l'un contre l'autre résonnent dans ma tête, agressent mes tympans comme si on y avait mis plusieurs haut-parleurs. 

Et là, je l'entends. Hyunjin.

- Felix ! Ce n'est pas réel, tu m'entends ? Tu es là, avec moi. Felix, t'entends ? Avec moi !

Je suis secoué dans tous les sens, mais je ne sais plus si ce sont les mains de Hyunjin ou l'étau qui semble compresser mon cœur. Je ne sais plus où je suis, pourquoi, je ne ressens que douleur. Je sanglote, sans fin, la lumière qui m'entoure semblant vaciller dangereusement. Je brûle de l'intérieur. 

- S'il-te-plaît... mon ange. Pense à un souvenir heureux, n'importe quoi. Il y a une jarre au fond de la salle, d'accord ? On y va, et je te sors d'ici. C'est promis. Tu m'entends ?

Cette fois-ci, il ne criait pas. Ses mains ont arrêté de me secouer, elles maintiennent simplement mes épaules droites pour que je ne m'effondre pas. Je commence à voir plus clair, la main qui ne serre pas ma poitrine effleure le sol dallé, sa chaleur contrastant avec le froid de la pierre. 

Comme je tremble moins, je sens ses mains passer sous mes cuisses et derrière mon dos, avant d'être soulevé comme si je n'étais qu'une plume. Je ne sais pas où il m'emmène, pourquoi, je sais simplement que sa présence semble apaiser mes tremblements. Malgré tout, je goûte toujours à mes larmes, qui ne semblent pas vouloir s'arrêter même avec mes yeux qui commencent à me brûler. 

Son pouce semble essuyer ma joue, comme pour essuyer ou recueillir mes larmes. Je suis aveuglé, déboussolé, mais je sens qu'il s'arrête quelques secondes avant de recommencer à marcher en direction de je ne sais où. La lumière aveuglante se calme lentement, le bruit des grains cesse, comme s'ils avaient arrêté de couler. Je sanglote toujours dans son torse comme un enfant, mais je me fiche bien de dignité ou d'honneur en ce moment. Tout ce qu'il me faut, c'est ma mère. Mais même ça, on me l'a refusé.

Hyunjin s'arrête à nouveau, semble s'asseoir mais il me garde contre lui. Sa main tremblante caresse mon dos et mes cheveux, comme ma mère le faisait souvent avant de s'en aller. Mes sanglots sèchent sur mes joues, s'étranglent dans ma gorge avant de se calmer petit à petit, jusqu'à ce que j'arrive à distinguer un murmure.

- C'est fini Felix, c'est fini... 

𝐀𝐏𝐎𝐋𝐋𝐎'𝐒 𝐒𝐎𝐍 ᴴʸᵘⁿˡⁱˣWhere stories live. Discover now