#CHEF | 106 - JAMES

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— Retourner au bateau, on vous appelle dès que nous avons des nouvelles.

— Nous repartons dans l'après-midi.

— Nous allons faire de notre mieux.

Connor est prêt à continuer cet échange stérile, mais j'agrippe son bras et le pousse à sortir du commissariat. J'en ai ma claque de ces flics qui ne mettent pas en œuvre tout ce qu'il faut pour trouver la vérité. Après tout – comme ironise Connor –, c'est juste une agression sur deux homos.

— On ne va pas passer notre journée ici. Laissons-les travailler.

Connor râle, mais il me suit tout de même. Après quelques mètres, il retrouve son calme et me demande.

— Que veux-tu faire, Amour ?

— Vu l'heure, on rejoint le bateau pour manger ?

— Ou sinon on retourne au restaurant pour voir...

— Pas question, Connor. Imagine qu'on tombe sur ce connard.

— Justement ! Je veux le forcer à avouer, je connais quelques techniques...

Je me place devant lui afin qu'il arrête sa marche pour qu'il entende mon point de vue.

— Non, on ne peut pas se faire justice soi-même. On va bien et c'est tout ce qui compte. Ces homophobes nous ont assez pourris la soirée, la nuit et la matinée. Il ne nous reste que cette journée à passer tous les deux, je ne veux plus perdre une seule minute à cause de ces connards.

Son baiser est tout aussi passionné que mes paroles. Il reflète la puissance associée au goût amer que nous laisse ce passage chez les flics. Pour le coup, nous ne pensons pas aux conséquences d'un tel baiser dans la rue. C'est une remarque qui ne m'est jamais venue à l'esprit quand j'étais en couple avec Eva. Ce sont des gestes naturels lorsqu'on est hétéro. Mais c'est loin d'être le cas pour des homosexuels.

— Tu as raison, James. Désolé, je voulais juste qu'ils soient arrêtés.

Connor me tient encore dans ses bras et je n'en ai rien à foutre de ce que les passants peuvent penser. J'ai le droit d'être heureux avec mon mari et de vouloir en profiter.

— Moi aussi, mais là, ça traîne trop en longueur. On a porté plainte, donné l'enregistrement, identifié le serveur. On ne peut rien faire de plus.

Nous préférons marcher pour retourner au bateau afin de tenter de digérer tout ce qu'il vient de se passer. Tout en longeant la corniche, nous discutons de tout et de rien tout en admirant le ressac des vagues assez nombreuses en cette fin de matinée.

— Regarde.

Je me tourne dans la direction indiquée par Connor quand je reconnais nos voisins de table d'hier soir au restaurant. Un jeune couple de Français qui se sont mariés il y a quelques semaines. Pendant le repas, nous avons échangé quelques phrases.

— Comme le monde est petit. Vous allez bien depuis hier soir ?

Ravi de voir qu'ils se souviennent de nous, Connor ne peut s'empêcher de leur demander.

— Votre repas s'est bien terminé ?

— Oui. Et votre balade digestive ? veut savoir Claire avec un grand sourire.

— Pas aussi bien qu'on l'aurait pensé. On a été agressé par trois hommes, alors qu'on admirait le phare.

Horrifiée, Claire retient un cri et se raccroche à son mari, qui plisse les sourcils d'incompréhension.

Il n'y a pas que la dinde qui sera fourrée à NoëlWhere stories live. Discover now