#SOLDAT | 75 - CONNOR

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J'avais bien raison que sa permission n'était pas normale. L'armée lui a accordé des jours pour venir me récupérer. Je n'ai pas besoin d'ouvrir la lettre pour savoir ce qu'elle contient. J'en ai vu passer des dizaines entre les mains des chefs. J'aurais tellement voulu me tromper et ne pas faire subir ça à James.

— C'est... Quoi ? me questionne James, inquiet.

Il a perçu mon changement de posture tant je me suis raidi. Mon visage ne doit rien cacher de ce que je ressens à l'instant.

Le sol vient de s'ouvrir sous mes pieds et les ténèbres veulent m'engloutir. À part que ce soient les flammes de l'enfer qui tiennent à me réduire en cendres.

Le sourire narquois de Phil me donne envie de lui casser la gueule pour le faire disparaître. Putain, ce n'est pas possible. Pas maintenant, alors que je suis heureux. Que j'ai trouvé un homme que j'aime ! Qu'une vie normale me tend les bras auprès de ma famille ! Que j'ai un boulot qui me plaît, que je reprends petit à petit ma place dans la société. Que pour la première fois, j'ai un appartement et le sentiment de bien agir !

Alors, pourquoi me rappeler à eux ?

— Il n'est pas question que je reparte là-bas.

James se décompose, il me fait pivoter vers lui pour ancrer son regard noir dans le mien.

— Ils t'ont déclaré inapte à cause de ta blessure. Il doit y avoir une erreur.

— L'armée reconnaît les bons éléments et, quand ceux-ci sont encore sous contrat, elle les récupère si leur état de santé le leur permet, annonce Jefferson, sans éprouver une pointe de compassion dans la voix.

Au contraire, même. Il jubile en lisant la détresse qui broie mon palpitant. Il est heureux de voir que je vais tout perdre si je suis obligé de rempiler.

— C'est une blague ? Non, non, il n'est pas question que tu repartes dans cet enfer.

La détresse de James termine de m'achever. Je suis anéanti. Planté au milieu de tous ces mecs qui font la fête. Alors que je suis en train de tout perdre. Je suis sur le point de péter un câble et ma fureur se dirige vers Phil.

Cet oiseau de malheur.

Mon frère me connaît par cœur et me ceinture les bras le long de mon corps et me pousse vers les escaliers.

— On s'arrache, Soldat !

Je passe en mode automatique. Un ordre est un ordre. Je saisis la main de James et nous exfiltre au plus vite vers la sortie tandis que j'entends le rire diabolique de celui que je pensais être de mon côté. Je marque un temps d'arrêt en le voyant discuter avec Adonis, mais mon frère est en mission et ne lâche rien.

— Avance, Williams !

Après avoir joué des coudes, après avoir bousculé des corps enlacés, James pousse la porte de sortie. La prise d'air à plein poumon m'est fatale. J'ai juste le temps de me déplacer sur le côté pour vomir tripes et boyaux dans les buissons. James caresse mon dos et me donne un mouchoir en papier pour que je m'essuie la bouche.

— Tu as oublié un truc !

Adonis me tend l'enveloppe qui contient mon ordre de mission.

— Je suis désolé pour toi, mec. Ce n'est pas cool ! Bonne chance et reviens-nous vite.

Il s'en va dans les ténèbres de cette nuit sans lune. Je dois être en train de rêver. Adonis ne peut pas se montrer sympa ? Ou bien est-ce la brutalité de l'annonce qui me joue des tours ? Pourtant j'ai bien cette maudite enveloppe dans les mains.

Il n'y a pas que la dinde qui sera fourrée à NoëlWhere stories live. Discover now